Tout le monde est atterré par les catastrophes comme celle qui a frappé Haïti, mais force est de constater qu'elles ont souvent des effets secondaires positifs pour les gouvernements.
La crise du verglas de 1998 était évidemment une peccadille en comparaison du drame haïtien, mais elle avait quand même fait oublier d'un coup tous les griefs à l'endroit de Lucien Bouchard. Son intervention quotidienne à la télévision, aux côtés du président d'Hydro-Québec, André Caillé, avait fait remonter sa cote instantanément.
À moins d'une gestion de crise désastreuse, comme celle de l'administration Bush après l'ouragan Katrina, l'opposition est contrainte de se montrer solidaire, sous peine d'être accusée de sabotage ou de chercher à se faire du capital politique sur le dos des sinistrés.
Gilles Duceppe n'avait donc que du bien à dire de la façon dont le gouvernement Harper a organisé les secours à Haïti, même s'il plaide en faveur d'un assouplissement des critères de réunification des familles.
Depuis une semaine, plus personne ne parle de la prorogation de la session parlementaire à Ottawa, qui avait indigné tout le pays. On semble aussi avoir oublié l'attitude déplorable de M. Harper lors de la conférence de Copenhague sur les changements climatiques.
Le dernier sondage Léger Marketing-Le Devoir a donné la mesure de la dégringolade du Parti conservateur au cours des dernières semaines. À 75 %, l'insatisfaction à l'endroit du gouvernement Harper avait atteint un sommet entre le 11 et le 14 janvier.
En revanche, 60 % des Québécois ont dit approuver sa réaction au tremblement de terre qui a laissé Haïti en ruine. Qui sait, cela pourrait être l'occasion d'un nouveau départ pour M. Harper. Coïncidence, il a choisi ce moment pour remanier son cabinet.
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Au Québec aussi, le drame haïtien semble avoir permis d'effacer l'ardoise. Le débat sur la tenue d'une enquête publique sur la corruption dans l'industrie de la construction, qui a empoisonné la vie du gouvernement Charest durant tout l'automne, a été complètement évacué.
La pétition que le PQ avait mise en ligne sur le site de l'Assemblée nationale n'a pas décollé. À moins de nouvelles révélations, les libéraux peuvent raisonnablement espérer que l'opinion publique est passée à autre chose.
Quand l'Assemblée nationale reprendra ses travaux, le 9 février, tous les yeux se tourneront vers les Jeux olympiques de Vancouver, avant de retomber dans la réalité plus terre à terre du premier budget de Raymond Bachand.
Le sondage Léger Marketing-Le Devoir est plutôt encourageant pour les libéraux. La dégringolade semble terminée. Même s'il demeure élevé (58 %), le taux d'insatisfaction à l'endroit du gouvernement a diminué de deux points depuis la fin de novembre, tandis que les intentions de vote en faveur du PLQ ont augmenté de deux points.
Si des élections générales avaient eu lieu la semaine dernière, l'avance de 20 points que détenait le PQ chez les électeurs francophones lui aurait assuré une majorité de sièges, mais il n'y aura pas d'élections avant trois ans.
M. Charest a repris le contrôle du programme politique et son gouvernement occupe presque tout l'espace médiatique. Même s'il ne faut rien attendre de concret de la rencontre économique qui se tient aujourd'hui à Lévis, un événement comme celui-là peut difficilement lui nuire. D'autant que l'opposition officielle, qui n'aura droit qu'à une intervention de... deux minutes, est reléguée au rôle de plante verte.
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Les effets secondaires d'une catastrophe qui permet au gouvernement de se mettre en valeur sont généralement très nocifs pour les partis d'opposition. Depuis le début de l'année, Pauline Marois a été presque invisible. Pendant que M. Charest exposait les détails de la contribution québécoise aux opérations de secours à Haïti, la chef du PQ en était réduite à l'expression de sa sympathie et aux appels à la générosité.
Elle ne peut faire autrement qu'appuyer M. Charest quand il réclame d'Ottawa un assouplissement du programme de réunification des familles et une plus large définition de la notion de réfugiés.
Malgré l'ampleur de la tragédie, Mme Marois serait également mal venue de reprocher au premier ministre de vouloir tenir compte de la capacité d'intégration de la société québécoise et du coût de l'accueil des sinistrés. Le PQ ne peut s'opposer non plus à la participation du premier ministre du Québec à la conférence internationale de lundi à Montréal.
Daniel Johnson avait vécu une expérience tout aussi mortifiante durant la crise du verglas. Alors que certains l'accusaient d'avoir abandonné ses électeurs de Vaudreuil et d'avoir profité de l'occasion pour prendre des vacances, ce qui était faux, le Globe and Mail lui avait reproché de ne pas avoir saisi l'occasion de démontrer «subtilement» les mérites du fédéralisme.
Non seulement le chef du PLQ avait su résister aux pressions de ceux qui l'invitaient à tirer profit de la situation, mais il avait même félicité Lucien Bouchard pour son efficacité, au risque d'affaiblir davantage son propre leadership.
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mdavid@ledevoir.com
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