Le Québec, terre d'accueil aride pour les immigrants

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Immigration : francisation et intégration


À Montréal, on trouve l'écart le plus important entre le taux de chômage des immigrants et celui des Canadiens de naissance. (Photo Armand Trottier, La Presse)

Violaine Ballivy - Maria Cristina Gonzalez a l'un des plus mauvais profils pour trouver un emploi au Canada. C'est une femme. C'est une Colombienne. Et elle vit à Montréal. Une nouvelle étude de Statistique Canada révèle que c'est au Québec que les nouveaux immigrants ont le plus de mal à décrocher un emploi. Même s'ils sont généralement plus instruits que la moyenne canadienne.



En 2006, le taux de chômage chez des étrangers établis au Canada depuis moins de cinq ans s'élevait à 11,5%, soit plus de deux fois la moyenne observée pour la population née au Canada (4,9%). Leurs chances de trouver un emploi augmentent progressivement au fur et à mesure que les années passent, mais, au Québec, les immigrants afficheront toujours un taux d'emploi bien plus faible que leurs compatriotes établis ailleurs au pays.
Le taux de chômage des immigrants qui sont arrivés entre 2001 et 2006 est trois fois plus élevé que pour les autres Québécois (17,8% contre 6,3%). Enfin, Montréal se compare peu avantageusement à Toronto et Vancouver: c'est dans la métropole québécoise que l'on retrouve l'écart le plus important entre le taux de chômage des immigrants et celui des Canadiens de naissance.
«C'est très décourageant», observe Maria Cristina Gonzalez. «Pour bien s'intégrer, il faut avoir un projet à long terme qui donne un sens à notre séjour et à tous les sacrifices que l'on a fait en quittant notre pays. Un travail satisfaisant, c'est ce qu'il y a de mieux.»
Comme plusieurs, Maria Cristina Gonzalez a dû mettre son orgueil de côté pendant quelque temps, son diplôme et son expérience de psychologue acquis en Colombie n'étant pas reconnus ici. Elle a envoyé des dizaines et des dizaines de CV, en vain. Elle aurait quitté le pays il y a longtemps, si une déclaration d'amour ne l'avait pas retenue in extremis. Ce n'est qu'au bout de quatre années de démarches intensives qu'elle a décroché son premier emploi faisant appel à sa formation initiale.
«Je ne crois pas que la société québécoise soit moins accueillante que les autres», observe Anait Aleksanian, directrice générale du centre d'appui aux communautés immigrantes, le CACI. «Mais il y a un gros problème sur le plan de la reconnaissance des acquis. C'est une procédure excessivement longue et complexe qu'il faudrait revoir et simplifier.»
Le bilinguisme complique aussi les choses, dit-elle: deux immigrants sur trois échouent aux tests de français de l'Office québécois de la langue française exigés pour intégrer un ordre professionnel reconnu. Or le nombre de classes de français est restreint et il faut souvent attendre six mois pour qu'une place se libère au CACI. «Pendant tout ce temps, l'insertion va au ralenti, c'est très dur pour le moral», déplore Mme Aleksanian.
Plusieurs immigrants décideront alors de laisser leur diplôme de côté pour accepter un emploi plus rapidement, mais précaire. Ce n'est pas un cliché: les restaurants et les manufactures embauchent plus d'immigrants que de Québécois.
Au fait du problème, le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles (MICC) a modifié ses critères de sélection l'an dernier et favorise désormais davantage la venue d'employés dotés d'une formation technique, plutôt qu'universitaire. «On ne regarde plus seulement si le candidat a une formation dans un secteur en demande, mais les difficultés reliées à l'intégration de ce secteur», explique Claude Fradette, porte-parole du MICC. Petit baume: selon M. Fradette, les immigrants ayant choisi le Québec travailleraient plus souvent dans leur domaine que ceux établis ailleurs au Canada.


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