Le Québec de commission en commission

Agroalimentaire - gestion de l'offre



Einstein a écrit: «La folie c'est de s'attendre à des résultats différents en adoptant la même approche.» Depuis trop longtemps, on se contente de retoucher le maquillage de nos systèmes, alors que ce sont les paradigmes qui les régissent qu'il faut changer. Trop d'idées reçues, comme celle qui veut que les systèmes purement économiques soient plus forts et plus importants que les hommes et les femmes qu'ils doivent servir, nous rendent aveugles aux possibilités qui s'offrent à nous comme autant de poussières dans l'oeil.
De la commission Coulombe (forêt) à la commission Bouchard-Taylor (accommodements raisonnables) en passant par la commission Johnson (viaduc de Laval) ou la moins médiatisée commission Pronovost (agriculture), le Québec est sans conteste à l'heure des débats. Au-delà des crises qui ont justifié leur mise en place, ces commissions sont en train de toucher les questions cruciales que sont celles de la cohabitation et du vivre ensemble, des voies de la prospérité collective, de la capacité d'entretenir nos fondations pour bâtir et celle de se projeter dans l'avenir.
L'accouchement d'un projet emballant qui remobiliserait la société ne peut se passer de débats. Dans tous les secteurs, le Québec a besoin d'un nouvel élan, comme celui qui, il y a 30 ans, a propulsé le Québec vers la prospérité économique et l'émancipation sociale. Mais un peu de rigueur dans l'exercice actuel ne ferait pas de tort. Si les commissions devaient dédouaner les élus, si le débat ne devait se faire que sur les constats plutôt que sur les propositions, alors nous passerions à côté de l'occasion qui nous est donnée de réinventer le Québec.
Le rôle des médias me semble à cet égard crucial. Qui se surprendra de la visibilité constante dont bénéficiera le travail de la commission Bouchard-Taylor? La commission Johnson a, durant l'été, bénéficié des manchettes de l'actualité des semaines complètes. Au contraire, la commission Pronovost sur l'avenir de l'agriculture et de l'agroalimentaire n'a que très peu attiré l'attention des grands médias. C'est d'autant plus déplorable que cette commission traite d'un sujet crucial pour l'avenir de nos territoires et pour notre sécurité alimentaire à l'heure où six fermes disparaissent chaque semaine, que plus de la moitié de l'agriculture se fait dans seulement trois régions du Québec alors qu'elle se marginalise dangereusement ailleurs et que les trois quarts des emplois en transformation alimentaire se retrouvent concentrés aux alentours de Montréal.
En agriculture comme en forêt, le Québec est à la croisée des chemins. Jusque-là régis par un contrat d'affaires où priment les intérêts sectoriels, ces secteurs déterminants doivent trouver dans un nouveau contrat social les pistes d'un développement durable qui tienne vraiment compte des communautés.
Dans la foulée des commissions et consultations de tout acabit, j'appelle les élus à reprendre leurs responsabilités en proposant aux citoyens un véritable projet de société où les intérêts des collectivités, le bien commun, servira de pierre d'assise. Depuis trop longtemps, on mêle les choses. La gestion centralisée et sectorielle a failli parce qu'elle a permis aux groupes corporatifs de prendre en otages des ministères qui confondent intérêts sectoriels et développement. Et dans l'état actuel des choses, cette recherche du bien commun passe nécessairement par un renouvellement complet de la gouvernance.
Le Québec peut se donner une vision emballante pour sortir gagnant de la mondialisation qui s'impose en misant sur la créativité qui le distingue, la diversité de ses territoires et de ses savoirs. Mais au-delà des beaux mots et des grands énoncés de principe, c'est la force de chaque maillon, de chaque communauté, qui fera la différence dans cette nouvelle aventure. Tant vaut le village, tant vaut le pays.
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Jacques Proulx, Président de Solidarité rurale du Québec


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