Le PQ bat de l'aile gauche

Boisclair - chef du PQ





Avec quelques phrases lapidaires, le chef péquiste André Boisclair s'est mis à dos le mouvement syndical, l'allié traditionnel du Parti québécois. Si bien qu'une collision est à prévoir entre l'aile gauche du parti et son chef aux assises prochaines du PQ.
Au centre de la tourmente, une déclaration récente de M. Boisclair où il prévient sans détour qu'il ne laisserait pas les syndicats, ou tout autre groupe d'intérêt, dicter ses prises de position. Surtout, il promet de tirer un trait sur l'ère où les gouvernements péquistes étaient «copains-copains» avec les centrales et où les négociations se terminaient autour de repas «bien arrosés».
Ces déclarations ont fait péter les plombs à Marc Laviolette, membre du SPQ libre, une faction de gauche au sein du PQ. «Les gens sont en tabarnac Je me demande comment il pourra réparer ces déclarations», a lancé M. Laviolette.
«C'est assez méprisant pour les chefs syndicaux. J'ai eu à discuter avec Lucien Bouchard puis Bernard Landry, et personne n'a brossé autour d'une table», de préciser l'ancien président de la CSN.
Pour les enseignants, le président de la CSQ, Réjean Parent, abonde dans son sens. «On dirait qu'André Boisclair veut se saborder lui-même! Parti comme ça, il n'aura pas l'occasion de faire deux élections à la tête du PQ! Non mais où pense-t-il aller chercher ses votes? Il devrait se rappeler que son parti a perdu les dernières élections à cause du fort taux d'absentéisme», a rappelé M. Parent.
Dans un reportage diffusé il y a quelques jours par le réseau TVA, André Boisclair a réagi à des déclarations du président de la FTQ, Henri Massé, qui disait constater de la «tiédeur» chez les syndiqués à l'endroit d'un chef dont on attendait toujours de connaître le plan de match.
«Il y a peut-être de la nostalgie de cette époque où les leaders syndicaux étaient copains-copains, passaient leurs soirées autour de repas arrosés. Ce n'est pas le type de leadership que je recherche», a répondu M. Boisclair. Il ne cherche pas la caution des syndicats, alliés traditionnels du PQ. «Je ne suis pas le porte-parole d'organisations qui défendent des intérêts particuliers. Je serai le premier ministre de l'ensemble des citoyens», a précisé M. Boisclair.
Dans ce reportage, Henri Massé, le président de la FTQ, confirmait constater peu d'enthousiasme chez ses membres à appuyer le PQ aux prochaines élections. «Il n'y a pas autant d'emballement à l'endroit du PQ dans nos rangs qu'il y en a déjà eu», a-t-il laissé tomber. «La tiédeur vient surtout du fait qu'on ne sait pas encore comment ce chef-là voit la société québécoise. Quelles seront ses préoccupations, ses grandes orientations J'ai hâte de voir!» M. Massé n'a pas rappelé La Presse hier.
«Après avoir vu ce reportage, je peux dire que les nostalgiques ne sont pas dans notre camp. M. Boisclair a une vision assez folklorique des relations avec les syndicats quand il parle de soupers bien arrosés», a dit Claudette Carbonneau, la présidente de la CSN, jointe hier par La Presse. Elle non plus «ne sent pas d'enthousiasme extraordinaire à l'endroit du PQ. On est, dans ce sens, représentatifs d'une couche de la population», de poursuivre Mme Carbonneau.
Elle a surtout été déçue par le refus de M. Boisclair de retirer la loi 142 - le gel salarial - s'il est porté au pouvoir. «Sur la loi 142, je me serais attendue à plus d'ouverture», a ajouté Mme Carbonneau qui précise toutefois « qu'au-delà des individus, il faudra voir les programmes « des partis. Or, M. Boisclair aurait tout de suite «intérêt à montrer où son parti se loge», plutôt que d'attendre le début de la campagne électorale.
Marc Laviolette a déjà croisé le fer avec André Boisclair quand ce dernier avait sans hésiter mis de côté la position que venaient d'adopter les délégués sur l'étatisation de l'énergie éolienne.
M. Parent n'en est pas non plus à ses premières passes d'armes avec le chef péquiste. Il a reçu il y a quelques mois, un coup de fil incendiaire du leader souverainiste parce qu'il avait osé critiquer publiquement une de ses positions. «Il n'est pas capable d'écouter. Je l'ai rencontré une heure et il s'est plus écouté lui-même qu'autre chose», de renchérir M. Parent. «M. Boisclair va finir par battre Jean Charest sur sa droite», a-t-il ajouté.
«André Boisclair oublie que le PQ est une coalition qui réunit des groupes, il doit regrouper les gens qui sont mécontents du gouvernement. Il ne peut pas passer à côté des syndiqués», de lancer Marc Laviolette. Aux prochaines élections, «les progressistes risquent de rester chez eux. La dernière fois, c'est ça qui a battu le Parti québécois», a dit, menaçant, M. Laviolette.
Aux élections de 2003, le PQ avait récolté 475 000 votes de moins qu'en 1998. Le taux de participation avait été le plus faible depuis 1927.
Une collision
M. Laviolette promet de demander des explications au chef péquiste à la prochaine réunion de tous les présidents de comtés du PQ, le 3 février à Québec.
À quelques mois des élections «cela ne va pas bien pantoute, les militants serrent les dents et se préparent à affronter l'adversité», a souligné M. Laviolette.
Ce n'est pas la première fois qu'André Boisclair irrite l'aile gauche du PQ. Dans une entrevue en octobre dernier, il disait souhaiter qu'un gouvernement péquiste puisse «soulager le capital» et favoriser l'investissement. Il avait aussi refusé de s'engager à lever la loi 142 sur le gel salarial, soulignant qu'il n'avait pas comme mission de «fédérer les mécontents» du Québec.
«C'est le discours des libéraux! À ce compte-là, à quoi ça sert de changer de gouvernement», a commenté Réjean Parent.
Interpellé, Gérald Larose reste prudent. «Cela me laisse froid, la question des leaders du parti. Je suis un gars du mouvement social, je suis d'avis que les choses avancent Plusieurs sont en attente de voir ce qui va sortir de tout cela. Des gens souhaitent que des morceaux du programme péquiste sortent avant longtemps.» Jusqu'ici le président du Conseil de la souveraineté constate qu'André Boisclair «attend avant d'abattre ses cartes».


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