Le mammouth libéral décortiqué

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Couillard ment déjà comme Harper

Le projet de loi 28, ce mammouth libéral, été adopté à toute vitesse en début de semaine pour clore la session parlementaire à l’Assemblée nationale. Son titre, d’une subtile complexité, est très révélateur: Loi concernant principalement la mise en œuvre de certaines dispositions du discours sur le budget du 4 juin 2014 et visant le retour à l’équilibre budgétaire en 2015-2016. C’est le «principalement» qui compte dans cette histoire.

Le projet de loi met dans la même marmite des hausses de tarifs, des investissements publics, des dépenses, des modifications aux règles de gouvernance de Fondaction (CSN) et du Fonds de solidarité de la FTQ, et j’en passe. Il y a même des dispositions fixant les tarifs des permis… pour les matériaux de rembourrage !

Le projet ratisse beaucoup plus large que l’atteinte de l’équilibre budgétaire, d’où l’importance du «principalement» dans le titre. L’actualité a passé en revue les 108 pages du mammouth législatif, qui a modifié 59 lois et 8 règlements. En voici les points saillants.

Services de garde. Le projet introduit des nouveaux tarifs en fonction du revenu familial. Le tarif de base reste à 7,30 $ par jour, mais il pourra monter jusqu’à 20 $ pour les familles plus fortunées. Selon les estimations de Québec, le tiers des familles ne subiront aucune hausse de tarif, et six familles sur 10 débourseront moins de 9 $ par jour.

Pharmaciens. Le projet étend le pouvoir du ministre de la Santé, en lui permettant de fixer les tarifs demandés par les pharmaciens, ce qui entraînera des baisses d’honoraires de 177 millions. Il introduit de nouveaux actes à compenser aux pharmaciens, tout en les forçant à accepter le quart du tarif habituel pour les prescriptions des personnes âgées. Le projet donne aussi au ministre de la Santé le pouvoir de négocier des ententes secrètes avec les sociétés pharmaceutiques sur le coût des médicaments payés par l’État.

Exploitation minière. Le gouvernement Couillard se lance dans l’exploitation minière et pétrolière. Le projet transforme Capital Mines Hydrocarbures (un fonds lancé en 2012) pour le placer sous la gouverne du ministère du Développement économique. Ce fonds, doté d’une enveloppe d’un milliard, permettra à Québec de prendre des participations dans les entreprises qui exploitent le sous-sol du Québec ou qui sont actives dans la transformation. Ce faisant, le gouvernement ferme la porte aux opposants du développement des filières minière et pétrolière.

Secret minier. Le projet répond à une exigence des compagnies minières. Au nom du secret commercial, elles ne seront plus forcées de dévoiler certaines données cruciales pour quiconque s’intéresse au développement durable, soit la quantité et la valeur du minerai extrait.

Bars et restos-bars. Les établissements seront forcés de conserver une trace papier de toutes leurs transactions. À titre d’exemple, un bar qui exige un droit d’entrée à ses clients devra leur remettre une facture. Les bars et les restos-bars seront aussi forcés d’installer des modules d’enregistrement des transactions (les fameux mouchards). La mesure, destinée à lutter contre l’évasion fiscale, annonce des lendemains qui déchantent, des faillites et des fermetures pour certains établissements dépendants de l’argent liquide.

Construction. Toujours dans l’optique de lutter contre l’évasion fiscale, le projet impose des exigences accrues dans l’industrie de la construction. Les entrepreneurs et leurs sous-traitants devront obtenir une attestation de Revenu Québec pour tout contrat de 25 000 $ et plus, sous peine d’amendes salées.

Gouvernance. Le projet réduit l’influence syndicale dans les affaires de Fondaction (CSN) et du Fonds de solidarité de la FTQ. Les modifications à la composition des conseils d’administration feront en sorte que les candidats indépendants y seront majoritaires. Deux comités fort importants (éthique et gouvernance et ressources humaines) seront constitués en majorité d’administrateurs indépendants. Ces comités assumeront des tâches importantes en ce qui a trait au recrutement des administrateurs au conseil et à l’embauche et l’évaluation de la performance du p.-d.g.

Gel des primes. Le projet reconduit pour un an seulement le gel des primes fondées sur le rendement pour les hauts fonctionnaires de l’État. Ces primes seront dorénavant attribuées en fonction de l’atteinte de cibles de résultat net. Les dirigeants des sociétés d’État sont cependant exemptés du gel.

Gouvernance municipale. Le projet abolit deux instances municipales importantes, au grand dam des élus locaux: les Conférences régionales des élus (CRE) et les Centres locaux de développement (CLD).

Finances publiques. Le gouvernement Couillard refuse de créer un poste de directeur parlementaire du budget, comme à Ottawa. Le projet accorde au Vérificateur général la responsabilité de produire un rapport sur l’état des finances publiques avant les élections.

Fonds des générations. Le projet fait passer de 100 millions à 500 millions par année les sommes virées au Fonds, en puisant dans la cagnotte de la taxe sur les boissons alcoolisées. Ce fonds vise à réduire la dette publique, évaluées à 206 milliards de dollars.

Fonds pour le développement du sport et de l’activité physique. Le projet fait passer la contribution de Québec de 55 à 60 millions par année, pour faire la promotion du sport et de l’activité physique.

Sans même faire le débat sur la pertinence ou non des mesures proposées par le gouvernement Couillard, un constat s’impose. Le projet de loi 28 est si vaste et il touche à tellement de domaines qu’il est impossible de faire un débat éclairé sur ses effets bénéfiques et ses inconvénients. Le mammouth est simplement trop gros à digérer. Le gouvernement aura réussi, d’une main de maître, à court-circuiter l’Assemblée nationale pour asseoir le pouvoir de l’exécutif sur le législatif.


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