Le français supplanté par l’anglais comme discipline scolaire

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L'anglomanie galopante menace le français

Dans son édition du 22 avril 2014, le quotidien Le Soleil nous apprenait que le ministère de l’Éducation a publié récemment une liste orthographique de quelque 2700 mots pour compléter le programme de français langue première du primaire. Cette liste, qui correspond au vocabulaire de base, doit servir d’outil de référence pour les enseignants en leur indiquant quels mots devraient être appris à chaque année de l’école primaire.

Ce genre d’outil pédagogique n’avait malheureusement pas été renouvelé depuis plusieurs années. Il aurait dû être mis à la disposition des enseignants bien avant. Ceux-ci le réclamaient depuis longtemps afin d’assurer une meilleure coordination de l’enseignement de l’orthographe à l’intérieur d’un même niveau et entre les différents niveaux du primaire.

Mais l’égarement le plus grave des fonctionnaires du ministère de l’Éducation est ailleurs. Ils ont retenu en 5e année plus de mots qu’en 6e «pour tenir compte de la possibilité d’offrir l’enseignement intensif de l’anglais langue seconde en 6e année et conséquemment de réduire le temps alloué à l’enseignement du français». En 5e année, la liste comprend en effet 822 mots, alors qu’en 6e elle baisse à 531, soit une différence d’environ 300 mots. On a bien lu: le programme de français se voit dorénavant subordonné à l’enseignement de l’anglais! Et cela est affirmé béatement par les fonctionnaires du ministère de l’Éducation comme une donnée pédagogique incontournable! Ils se défendront peut-être en alléguant que le programme général reste le même, parce que celui de 5e année aurait été augmenté d’une partie de celui de 6e. Pareilles arguties ne sauraient justifier le fait que le programme de 6e a été bel et bien réduit au profit de l’anglais.

Le gouvernement libéral qui vient d’être élu généralisera sans doute l’anglais dit «intensif» en 6e année dans tout le réseau primaire. Il convient de préciser que ce type d’enseignement n’est pas seulement intensif; il est aussi exclusif: le français langue première ainsi que les autres matières sont enseignés pendant une moitié de l’année, tandis que l’anglais langue seconde est enseigné exclusivement durant l’autre moitié. Dans ces conditions, le temps réservé au français et à tous les apprentissages qui y sont associés (grammaire, syntaxe, lecture, écriture…) ne peut que diminuer, ainsi que le reconnaissent eux-mêmes, sans la moindre gêne, les fonctionnaires du ministère de l’Éducation. Désormais, en 6e année, les jeunes francophones étudieront moins le vocabulaire de base de leur langue que leurs camarades de 5e, cela pour pouvoir se concentrer davantage sur l’étude de l’anglais langue seconde. On imagine ce qui arrivera pour les autres composantes plus complexes et plus importantes de la langue, comme la lecture et la capacité de rédiger des textes.

Mais quelle est donc cette obsession de l’anglais qui obnubile les francophones du Québec au point qu’ils en arrivent à négliger le fondement même de leur identité et de leur culture dans leur propre système d’éducation? L’attachement des Québécois francophones pour leur langue paraît bien superficiel et s’exprime surtout dans des discours convenus, mais moins dans des actions résolument en sa faveur. Il faut bien le dire: les Québécois francophones semblent accorder plus de valeur à l’anglais qu’à leur propre langue. Par conséquent, au lieu de simplement réduire les contenus d’apprentissage du français, il serait plus indiqué de faire de l’anglais la principale matière scolaire de notre système d’éducation, de la maternelle à la 5e secondaire. Et, tant qu’à faire, pourquoi ne pas ranger le français parmi les matières secondaires, voire optionnelles?


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    4 mai 2014

    A Tout le monde en parle ce soir, Lise Thériault (si j'aurais) ministre de la Sécurité publique, laisse planer le doute sur le sort qui attend le directeur général de la Sûreté du Québec (SQ), Mario Laprise.
    http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-quebecoise/201404/30/01-4762374-lise-theriault-reste-ambigue-sur-le-sort-du-patron-de-la-sq.php

  • Chrystian Lauzon Répondre

    3 mai 2014

    Couillard l’a dit en plein débat électoral télévisé sans soulever l’offuscation générale : l’anglais est la langue de travail désormais. Le français n’est plus perçu, valable, qu’en tant que « jolie » langue domestique de Molière. De domestique à serviteur, asservissement, c’est un pas que le PLQ est habitué de franchir… main dans la main avec Ottawa, ses supérieurs fédéraux.
    Faire une élection, être élu est une chose. Mais gouverner, c’est être entouré de fonctionnaires munis de pouvoirs discrétionnaires concrets surprenants.* Or, parmi eux, quelle est la proportion de fédéralistes et d’indifférents au bien de la nation québécoise politiquement? Les chiffres seraient surprenants, voire déprimants.
    Déprivatiser l’État, clientéler les marchands ayant investi les sociétés d’État, ne suffira pas. La purge LegaultCAQ serait peut-être une bonne chose si elle "renationalisait" un minimum l’administration publique gouvernementale en faveur du Québec et de ses citoyens contribuables qu'elle devrait servir avec fidélité et justice avant toute autre allégeance, soit celle à un roitelet fédéraliste d'ici ou une reine d'un ailleurs pancanadian ou Angloanglican.
    L’ironique est que Victor-Lévy Beaulieu ait pu croire que Couillard lisait un de ses livres devant lui en public par intelligence sensible à la langue française, alors que cette intelligence n’était qu’une ruse opportuniste de plus politiquement, flatterie piège dans lequel Victor-Lévy tomba en lui rendant en miroir publiquement cette flatterie et dévaloriser Marois par ce faire, cette dernière n’ayant pas besoin d’une telle attaque via l’ennemi pour nous laisser le mystère planer sur sa profondeur d’esprit stratégique. J’attends les mémoires, en ce sens, de Mme Marois pour mesurer le niveau de sa perception de la réalité, en espérant qu’elle en soit l’auteur unique.
    Que de méfiance devons-nous user pour savoir nous taire ou/et agir avec pertinence, mesurer en termes stratégiques ceux qui nous entourent, et non plus par une sensibilité émotive nationale ou littéraire qui nous fait nous tirer dans le pied.
    Nous baignons en eau boueuse parmi les poissons rouges les plus bigarrés et béats, sortant de partout avec imprévisiblité, et nos dents de piranha hésitent encore à se pointer pour se débarrasser de nos proies ennemies en dévoration absolue. C’est pourquoi, radicalement, l’indépendance doit se penser d’au-dessus du bocal, muni de la « croc-barre » apte à briser l’aquarium canadian lui-même qui contient les produits d’intoxication en milieu fermé, à un double niveau d’assiègement, interne et externe, local et linguistiquement étranger.
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    * « Le pouvoir discrétionnaire est un problème très classique en droit administratif et toujours actuel. Il s'agit du domaine de l'activité étatique qui échappe dans une certaine mesure au droit (à l'État de droit), de cette partie de l'activité administrative, qui est partiellement soustraite à l'emprise totale de la légalité. De nombreuses question (sic) se posent : pourquoi admettre que l'administration puisse se soustraire, même partiellement, à l'obligation de légalité ? Où doit se situer le pouvoir discrétionnaire ? Existe-t-il vraiment en droit positif un pouvoir discrétionnaire ? Ce sont là autant de problèmes qu'il convient de considérer en fonction d'une évolution profonde du droit positif, jurisprudentielle notamment. » cf. Pouvoir discrétionnaire en droit administratif :
    http://fr.jurispedia.org/index.php/Pouvoir_discr%C3%A9tionnaire_en_droit_administratif_(fr)

  • Henri Marineau Répondre

    3 mai 2014

    Comme il fallait s’y attendre, le nouveau ministre de l’Éducation Yves Bolduc sursoit à la décision du gouvernement péquiste antérieur d’instaurer un cours d’histoire nationale obligatoire au Cégep, profitant de la sorte du vent de contestation suscité par cette décision de la part de certains intervenants.
    D’un autre côté, le ministre Bolduc se montre favorable à favoriser au maximum l’implantation de l’anglais intensif en 6ième année pour le plus d’élèves possibles tout en se gardant de le rendre obligatoire compte tenu des problèmes pédagogiques que ce cours risque de soulever auprès des élèves en difficultés d’apprentissage.
    Indépendamment des motifs évoqués par le ministre, ces deux décisions laissent percevoir une idée de la couleur qu’il désire imprégner au sein du MEQ, à savoir la priorité à la langue seconde au détriment de la connaissance de l’histoire nationale.