Le choix de la paix

Israël - Élection, mardi le 10 février 2009 - la montée aux extrêmes


Le premier ministre sortant Ehoud Olmert estime qu'Israël doit se retirer de Cisjordanie et partage le contrôle de Jérusalem avec les Palestiniens. Il doit aussi se retirer du plateau du Golan afin de conclure la paix avec les Syriens. Archives Reuters


Les Israéliens auront bientôt un gouvernement de coalition avec à sa tête une femme, Tzipi Livni, ou un homme, Benyamin Nétanyahou. Cela n'a pas vraiment d'importance. Le prochain premier ministre accède aux plus hautes fonctions au moment où des voix s'élèvent en Israël et ailleurs pour le presser de faire rapidement le choix de la paix avec les Palestiniens et les Syriens. Ce sera sa décision la plus difficile à prendre.
Si les gouvernements et les coalitions changent fréquemment, les grandes orientations politiques et économiques restent les mêmes, pour le meilleur et pour le pire. Les relations avec les Palestiniens et les voisins arabes en sont un bon exemple.

Dans une entrevue au quotidien Yedioth Ahronoth en septembre dernier, le premier ministre sortant Ehoud Olmert y livre son autocritique et son testament politique en invitant son successeur à briser avec la politique du passé et à faire le choix de la paix. «Ce que j'avance ici n'a jamais été dit par un leader d'Israël, dit-il. Mais le temps est venu de dire ces choses tout haut, le temps est venu de les mettre au grand jour.»
Pour lui, Israël est le pays le plus puissant du Moyen-Orient. Il peut se battre contre n'importe quel de ses ennemis, un à un ou tous réunis, et gagner. Mais après, que doit-il dire aux vaincus? Parlons! Alors, pourquoi faire la guerre afin d'atteindre ce que nous pouvons atteindre sans nous battre, de demander Olmert. Et d'avouer du même souffle que son intransigeance passée - son désir de voir Israël contrôler entièrement Jérusalem ou son rejet de l'accord de Camp David de 1979 sur le retrait du Sinaï - était une façon de nier cette réalité.
Israël, dit le premier ministre sortant, doit se retirer de Cisjordanie et partager le contrôle de Jérusalem avec les Palestiniens. Il doit aussi se retirer du plateau du Golan afin de conclure la paix avec les Syriens. «Nous devons prendre ces décisions, mais nous ne sommes pas prêts à entendre nous-mêmes que c'est là le choix qui s'impose.»
Il en a pour preuve l'attitude de ses prédécesseurs des 20 dernières années. «Lorsque je repense aux premiers ministres qui m'ont précédé, Sharon, Nétanyahou, Barak, et Rabin, d'heureuse mémoire, je peux affirmer que chacun a fait un pas dans la bonne direction mais qu'à un certain moment, à un croisement précis, alors qu'il fallait prendre une décision, cette décision n'a pas été prise», dit-il.
Bien entendu, Olmert n'était pas prêt à faire la paix à n'importe quel prix. Palestiniens et Syriens en connaissent les conditions exactes. Pour lui, un accord avec les deux est imminent. Et il faut saisir cette occasion, dit-il, car «le moment est propice». «La décision qu'il nous faut prendre est celle que nous refusons d'envisager en toute lucidité depuis 40 ans.»
Un «ami» à Washington
Sur le plan international, la décision à laquelle le prochain premier ministre israélien sera bientôt confronté évolue dans un nouveau contexte, particulièrement aux États-Unis. Le nouveau président Barack Obama est un ami d'Israël, mais son amitié ne peut ignorer les critiques qui s'expriment au grand jour aux États-Unis depuis plusieurs années et qui réclament une autre relation avec ce pays. Et ces voix ne viennent plus seulement des extrêmes, mais de l'establishment le plus distingué: Jimmy Carter, Zbigniew Brzezinski, Brent Scowcroft, de penseurs et d'éditorialistes influents, comme John Mearsheimer de l'Université de Chicago ou Fareed Zakaria de Newsweek, des revues conservatrices, comme National Interest, et de certains des négociateurs américains les plus chevronnés, comme Aaron David Miller qui invitait récemment les États-Unis à faire preuve de plus de fermeté envers Israël.
La paix, dit Olmert, est à portée de la main. Elle sera terriblement difficile à mettre en oeuvre, mais il n'y a plus d'autre option.
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L'auteur (j.coulon@cerium.ca) est directeur du Réseau francophone de recherche sur les opérations de paix affilié au CÉRIUM de l'Université de Montréal.


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