Libre opinion - Indépendance: le sens et la vérité d’un mot

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Oui, Indépendance ! Et vous allez voir ce que vous allez voir...

Les mots ont un sens et une vérité. Comme le dit le poète et écrivain français Nicolas Boileau, « ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément ». Au Parti québécois, les mots ne veulent plus rien dire. Et particulièrement le mot censé désigner l’objectif ultime de cette formation politique pour l’avenir du Québec : l’indépendance. Bernard Landry vient de rétablir les choses.
Dans une allocution prononcée samedi, l’ancien premier ministre a clairement dit ce qu’il voulait. « Utilisons les bons mots. Regardons les choses en face : nous voulons l’indépendance nationale. »
Si c’est maintenant clair pour Bernard Landry, cela ne l’est pas pour le PQ. La première ministre Pauline Marois refuse cette clarté. Avant même son élection, dans un discours devant le Conseil national du parti en 2011, Mme Marois n’avait pas prononcé une seule fois le mot indépendance. En fait, oui, elle en avait parlé, mais pour évoquer un autre sujet. Voici ce qu’elle avait à dire. « Nous allons bâtir le Québec du XXIe siècle avec l’indépendance énergétique. Nous allons bâtir une majorité favorable à la souveraineté du Québec. » Au PQ, il semble plus facile de promettre l’indépendance énergétique que l’indépendance du Québec.
Le choix des mots est, dans la bouche de Mme Marois, une posture politique adoptée il y a plus de 30 ans afin de rassembler le plus grand nombre possible de Québécois autour d’une option constitutionnelle. En effet, depuis la fondation du PQ, le mot « indépendance » est banni du discours péquiste pour faire place au mot « souveraineté ». La substitution sémantique est compréhensible. Les deux mots ne veulent pas nécessairement dire la même chose. Denis Monière, ancien chef du Parti indépendantiste et professeur de science politique à l’Université de Montréal, a déjà expliqué la subtile et néanmoins réelle différence entre les deux. « En principe, l’indépendance et la souveraineté c’est la même chose. Sauf que la souveraineté est un concept élastique : on peut être plus ou moins souverain, mais on ne peut être plus ou moins indépendant. On est ou on n’est pas indépendant. »
Si la souveraineté et l’indépendance se prêtent à des définitions diverses, alors que veulent dire au juste les sondages où la souveraineté (c’est-à-dire l’indépendance pour les dirigeants du PQ) peine à atteindre 40 % ? Eh bien, rien. Lorsque la question posée est un artifice langagier destiné à tricher avec la réalité, elle est un leurre et sème la confusion dans les esprits.
Devant cette confusion, les nouveaux indépendantistes refusent désormais toute ambiguïté au sujet de l’option. Après le naufrage du Bloc québécois le 2 mai 2011, la parole s’est libérée chez ceux qui, depuis longtemps, affirment sans détour, mais à voix basse, que les stratégies fondées sur une astuce sémantique ou sur « des gestes de souveraineté » ne vont nulle part. Ils réclament la clarté afin que le choix des Québécois se fasse en toute conscience des enjeux. Jocelyn Desjardins, président du Nouveau Mouvement pour le Québec, représente bien cette génération de la rupture. Contrairement à Mme Marois et à ses partisans, il n’a pas peur des mots. Dans plusieurs textes publiés au cours des deux dernières années, le mot « indépendance » revient constamment sous sa plume. Tous n’ont pas encore ce courage. Ainsi, l’ex-député péquiste Jean-Martin Aussant a créé un parti « souverainiste », mais il n’utilise pas le mot « indépendance ». Il semble estimer que, si sa nouvelle formation parle constamment de « souveraineté », dès lors les Québécois y verront plus clair qu’avec le PQ.
Au moment où certains péquistes redoutent la folklorisation de leur idée maîtresse, les indépendantistes ont une obligation de clarté envers les Québécois. Le premier acte de cette démarche serait de cesser les circonvolutions sémantiques et de nommer la chose. Le sens et la vérité d’un mot seraient alors rétablis au bénéfice des uns et des autres. Bernard Landry vient de montrer le chemin.


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