Laïcité: faire à notre manière

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Interdire les signes religieux aux enseignants : une mesure de simple bon sens

Quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage.


Voilà pourquoi les tenants de la liberté religieuse absolue critiquent durement les pays où la laïcité est plus solidement affirmée que chez nous.


Dire non


Devons-nous interdire aux enseignants­­­ de porter des signes religieux ?


La Suisse, par exemple, le fait depuis­­­ longtemps.


Bien entendu, il y a eu contestation judiciaire au nom – serez-vous étonnés ? – du droit de porter le voile islamique.


Notons en passant que personne ne va devant les tribunaux pour pouvoir porter un crucifix ou une kippa.


En 2001, la Cour européenne des droits de l’homme a validé l’inter­diction suisse.


Elle écrivait : « Même s’il est particulièrement important aux yeux de l’intéressée [...] le port du foulard et de vêtements amples reste une manifestation extérieure qui, à ce titre, n’appar­tient pas au noyau intangible de la liberté de religion ».


Bref, vous êtes libre de croire à ce que vous voulez, mais ce n’est pas un crime de ne pas vous permettre d’afficher cette croyance tout le temps et partout.


La foi se vit d’abord intérieurement.


La Cour rappelait aussi une double évidence : une enseignante est une figure d’autorité pour un enfant et, par définition, le voile vise précisément, du seul fait qu’il est visible, à envoyer un message religieux.


Vous avez peut-être entendu parler du tumulte autour de la garderie Baby-Loup, située à l’ouest de Paris.


Le règlement de la garderie interdisait expressément le voile islamique. Zéro problème.


De retour après un congé de cinq ans, une éducatrice refuse d’enlever le voile qu’elle porte désormais. En 2008, elle est congédiée.


L’affaire est devenue une saga judiciaire qui s’est terminée, en 2013, par la victoire de la direction : le licen­ciement est légal.


Dans son jugement, la Cour d’appel­­­ de Paris écrit que « les missions d’éveil et du développement de l’enfant [...] sont de nature à justifier des restrictions » à la liberté religieuse.


Le tribunal invoque aussi les « droits de l’enfant » et souligne l’importance de protéger « leur liberté de pensée, de conscience et de religion à construire ».


Dans plusieurs pays d’Europe, les restrictions ne se limitent pas à certains employés de l’État et peuvent s’étendre au secteur privé.


L’an dernier, cette même Cour européenne des droits de l’homme était saisie d’une affaire survenue en Belgique dans une entreprise privée de sécurité, et d’une autre, en France, dans le domaine de l’ingénierie­­­.


Les juges écrivaient : « L’interdiction de porter un foulard islamique, qui découle d’une règle interne d’une entreprise privée [...] ne constitue pas une discrimination directe fondée sur la religion ou sur les convictions­­­ ».


Faire autrement


Certes, le Québec n’est ni la France, ni la Belgique, ni la Suisse, et n’est pas en Europe.


Je veux simplement illustrer que la conception canadienne des choses n’est pas un horizon indépassable.


Le Québec peut faire autrement. Il doit faire autrement.