Mario Dumont a magnifiquement illustré la parabole de la poutre et de la paille en parlant d'une «démobilisation» au PQ, parce que 6 députés sur 36 ne solliciteront pas un autre mandat.
Après que deux de ses propres députés eurent déserté les rangs du PLQ et que son adjoint, Gilles Taillon, eut décidé de déménager dans l'Outaouais pour s'assurer d'être battu, le chef de l'ADQ devrait plutôt s'occuper de ses ouailles.
Il n'y a pas si longtemps, M. Dumont aurait sans doute été bien heureux d'apprendre que certains des élus du printemps 2007 ne souhaitaient pas se représenter, ce qui lui aurait permis d'offrir leur circonscription à des candidats plus prestigieux qui auraient ajouté de la crédibilité à son équipe.
Aujourd'hui, sauf dans quelques circonscriptions que l'ADQ peut espérer conserver, le problème serait plutôt de leur trouver un remplaçant. L'ex-journaliste de TQS à Québec, Gérard Deltell, tentera de prendre la relève de M. Taillon dans Chauveau. Il est vrai que M. Deltell n'a jamais caché son intérêt pour l'ADQ et les idées qu'elle défend, mais il est surtout disponible. Ces jours-ci, il faut avoir une foi inébranlable pour abandonner son emploi pour défendre les couleurs adéquistes.
Quoi qu'en dise M. Dumont, le départ le plus significatif depuis que le déclenchement imminent d'élections ne fait plus de doute n'est pas survenu au PQ. Celui de Louise Harel marque sans doute la fin d'une époque, mais il ne constitue pas vraiment une surprise. En 2007, elle ne s'était présentée que pour éviter de donner l'impression qu'elle abandonnait le navire en plein naufrage.
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En revanche, personne ne s'attendait à ce que le ministre des Affaires intergouvernementales, Benoît Pelletier, jette l'éponge, même si on peut comprendre qu'après dix ans, un père de quatre enfants peut en avoir assez de faire la navette hebdomadaire entre l'Outaouais et Québec.
Depuis sa première élection dans Chapleau, en 1998, M. Pelletier a toujours été identifié à l'aile nationaliste du PLQ. Le rapport qu'il a signé en 1981, qui constitue toujours la politique constitutionnelle du gouvernement Charest, s'inspirait directement de l'accord du lac Meech.
Même s'il reconnaissait lui-même que le moment n'était pas propice à une reprise des négociations, M. Pelletier a vainement tenté pendant des années de convaincre son parti de ne pas laisser au PQ le monopole de la question identitaire.
Durant le premier mandat du gouvernement Charest, certains à Ottawa l'accusaient d'exercer une mauvaise influence sur le premier ministre, par opposition à sa collègue des Relations internationales, Monique Gagnon-Tremblay, qui semblait mieux comprendre que le Québec devait enfin apprendre à se comporter comme une province.
Il est étonnant de le voir prendre sa retraite précisément au moment où M. Charest semble avoir décidé de se porter à la défense des intérêts du Québec face à Ottawa. Peut-être estime-t-il que cette conversion est simplement temporaire.
Il est vrai qu'après avoir expliqué pendant dix ans que «le fruit n'est pas mûr», il aurait peut-être eu envie de relever un nouveau défi. C'était un secret de Polichinelle qu'il aspirait aux Relations internationales. Puisque Mme Gagnon-Tremblay a accepté de se représenter et que M. Charest ne peut rien lui refuser, M. Pelletier risquait de poireauter aux Affaires intergouvernementales pendant encore un bon moment.
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Si son départ constitue une surprise, que dire du retour de Robert Dutil? En avril dernier, l'ancien ministre avait fondé le parti de l'Union du centre pour protester contre les crédits d'impôt accordés aux régions ressources au détriment des régions du centre.
Il serait peu de dire qu'à la fin des années 1980, M. Dutil ne constituait pas un pilier du gouvernement Bourassa. En réalité, il était plutôt un objet de gêne. En 1988, le bureau du premier ministre avait été très indisposé d'apprendre que M. Dutil, alors ministre de la Famille, avait installé sa femme et ses enfants dans une commune aux pratiques douteuses connue sous le nom de Cité écologique de l'Ère du Verseau, située à Ham-Nord, dans la région des Bois-Francs. M. Dutil allait les rejoindre toutes les fins de semaine dans sa limousine ministérielle.
Malgré le respect dû à la vie privée, M. Bourassa trouvait que cet arrangement envoyait un curieux message. À un point tel que M. Dutil avait été démis de ses fonctions à la Famille et muté aux Communications.
Dans une élection qui se jouera peut-être sur quelques sièges, M. Dutil pourrait sans doute aider le PLQ à arracher Beauce-Sud à l'ADQ. La famille Dutil est une institution dans la région, et l'exemple de Maxime Bernier montre que les Beaucerons sont particulièrement indulgents envers les leurs.
Contrairement à leurs homologues libéraux, les chefs péquistes n'ont jamais eu le loisir de réserver des circonscriptions sûres à des candidats de leur choix, ce qui leur a souvent valu des déconvenues humiliantes et a parfois privé le PQ de recrues intéressantes.
Plusieurs souhaitaient qu'au congrès de juin 2005, les statuts du parti soient modifiés pour donner plus de latitude au chef. Au moment de se soumettre à un vote de confiance, Bernard Landry n'avait cependant pas voulu prendre le risque d'un affrontement avec les militants, qui ont toujours considéré le choix des candidats comme une prérogative non négociable.
Ce qui est souvent perçu comme un excès de démocratie présente au moins l'avantage d'éviter des parachutages aussi discutables que celui de M. Dutil qui, c'est le moins que l'on puisse dire, incarne une bien curieuse relève.
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mdavid@ledevoir.com
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