L'université égarée

UQAM - scandale financier


Incompétence ou pire? Le vérificateur général a soigneusement évité de répondre à cette question, mais ses révélations sur l'UQAM sont tellement ahurissantes qu'il serait difficile d'en rester là. Maintenant qu'on connaît les lacunes de gouvernance à l'origine du gouffre financier, on aimerait savoir si tout cela s'est vraiment fait en toute innocence.
La responsabilité du dérapage, on l'a compris, est largement partagée par le conseil d'administration (CA) de l'UQAM, par lUniversité du Québec (UQ) et par le ministère de l'Éducation. On n'en revient pas de toutes les questions qui auraient dû être posées, ou posées avec plus d'insistance, et qu'on a négligées. Est-ce vraiment un bon projet? Avons-nous les moyens de le réaliser? Comment vont les travaux? La situation financière? Et, surtout: prouvez-nous que ce que vous avancez est vrai, messieurs le recteur, le vice-recteur et le directeur des investissements? Que cela n'ait pas été fait, ou si peu, est inexcusable.
Certains faits, toutefois, sont plus dérangeants. Par exemple, lorsque le recteur et son vice-recteur déposent un document financier hyper touffu à moins d'une semaine de préavis, en demandant au CA de l'UQAM et à l'assemblée des gouverneurs de l'UQ de se prononcer rapidement pour éviter la perte d'une option d'achat - alors que cette option avait déjà pu être renouvelée dans le passé. Et toutes ces fois où la haute direction se contente d'informer le CA de ses décisions au lieu de lui demander de trancher. C'est ainsi que le budget global du Complexe des sciences (166 millions), ainsi qu'un pavillon entier du projet, n'ont jamais fait l'objet d'une résolution au conseil.
Les administrateurs auraient pu réclamer du temps pour réfléchir, solliciter des conseils externes et, même, ramener à l'ordre le recteur et ses deux seconds. Ils ne l'ont pas fait et c'est leur entière responsabilité. Mais il faut aussi se demander pourquoi la haute direction a procédé ainsi.
Sans oublier toutes ces réunions où le CA a reçu des informations inexactes. Quand le vice-recteur fait le point sur l'îlot Voyageur, en mars 2006, il présente un budget vieux de trois mois, qui ne tient pas compte de changements récents mais importants - suppression de 300 places de stationnement, ajout d'une garderie et d'une salle de 500 places, etc. Une autre fois, le directeur des investissements répond qu'il n'y pas de manque à gagner, alors qu'une analyse externe montre le contraire. Impossible de prendre des décisions éclairées dans de telles circonstances.
Le ministère de l'Éducation et l'UQ ont déjà annoncé des mesures pour éviter de tels dérapages, l'UQAM doit commenter aujourd'hui.
Le ministre de la Justice a aussi transmis le rapport du vérificateur général à son directeur des enquêtes criminelles, qui verra s'il y a matière à pousser l'affaire plus loin. On s'attend à une réponse claire et explicite. Vérifier si des gestes répréhensibles ont été commis et, le cas échéant, demander des comptes à ceux qui les ont posés: ça aussi, ça fait partie des mesures à prendre pour éviter que l'histoire ne se répète.
akrol@lapresse.ca


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