L’imposture du 150e

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Un goût amer





Ainsi, les Autochtones n’ont pas le cœur à la fête en ce 1er juillet. Justin Trudeau dit les comprendre. Bien des Québécois n’ont pas envie de fêter non plus. Mais eux, on leur dira de se taire et d’agiter leur unifolié. Pourtant.


D’abord, il y a le chiffre : « 150 ans. » Le Canada est bien plus vieux que ça. Jacques Cartier en 1534, ça vous dit quelque chose ? Autrefois, on qualifiait abusivement cette date de « Découverte du Canada ». Comme s’il n’y avait eu rien avant ; comme si ces territoires étaient vierges.


C’était insultant pour les Autochtones. On le comprend. N’empêche, Jacques Cartier a inauguré quelque chose : l’arrivée sur cette terre d’Européens qui allaient devenir Français du Canada, puis Canadiens.


Origines


Certains veulent aller à l’autre extrême. Une nouvelle rectitude politique parlera du Canada « depuis ses origines autochtones », selon ce qu’on peut lire sur le site internet officiel du 150e du Canada.


C’est évacuer facilement bien des vols, des batailles, des tentatives d’assimilation, etc. On comprend donc très bien que certains Autochtones manifestent contre le rappel de 1867.


Des Québécois aussi n’ont pas envie de fêter. À un moindre degré que les Autochtones, les francophones de ce pays ont été opprimés. Comme l’écrit le philosophe canadien-anglais Will Kymlicka (cité par Jean-Marc Fournier dans son fameux document), « L’incorporation des Canadiens français et des Autochtones dans la communauté politique canadienne fut non volontaire ».


Certes, René Lévesque l’a bien dit : le Canada n’est pas un goulag (ce qu’il fut à certains égards pour certains Autochtones).


Ce que le gouvernement fédéral voudrait toutefois qu’on célèbre — l’acte de 1867 — a bien des défauts, lesquels sont toujours présents, d’autant qu’ils ont été amplifiés par Trudeau père avec son coup de force de 1982, le rapatriement.


Fausse confédération


Philippe Couillard, en 2013, disait vouloir profiter du 150e pour obtenir réparation. Depuis, il a totalement changé de discours. Il a au fond capitulé en maquillant le tout dans un document Québécois, notre façon d’être Canadiens, qui n’est pas sans vertu historique, mais qui prône en définitive un dialogue sans conséquence.


Remontons 150 ans en arrière : le chef du Parti libéral, Antoine-Aimé Dorion, était... farouchement opposé à la « Confédération ».


« La Confédération que je demandais était une vraie confédération, qui donnait les plus grands pouvoirs aux gouvernements provinciaux et seulement une autorité déléguée au gouvernement général », déclarait-il en 1865.


Il prévoyait des « collisions fréquentes » entre les paliers de gouvernement « qui ne [feraient] que créer du malaise et des embarras de toutes sortes ». Dorion reprochait aux pères de la Confédération de travailler en secret et de se défier du peuple. En 1864, il écrit, à raison, que, lorsqu’il s’agit de « refaire la constitution, de poser de nouvelles bases à l’édifice politique, le peuple dont l’intérêt et la prospérité son affectés par ces changements doit être consulté ». Ce ne sera pas le cas en 1867. Mais pas plus en 1982 !


Or, en 1980, les Québécois avaient pu s’exprimer sur leur statut politique pour la première fois. Trudeau père leur promit qu’un « non » signifierait un « oui » à un renouvellement de l’Acte de 1867. Ils appuyèrent cette option à 59,56 %. On connaît la suite.


La fête, pour plusieurs, peut bien avoir un goût amer.


La citation de la semaine


« Oui, je te dirais, effectivement, qu’il s’agit d’une stratégie qui est féministe » — La ministre responsable de la Condition féminine, Lise Thériault, à la présentation, jeudi, de sa Stratégie gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes.




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