L'idée de la souveraineté est mise en berne

Triomphalisme canadian... pré-mâché!

Lucien Bouchard en compagnie de son éventuel successeur, Bernard Landry, en février 2001. Il quitte son poste, le 8 mars de la même année, refermant le chapitre ouvert par le référendum de 1995.
Photothèque Le Soleil

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(Québec) Le projet de pays du Parti québécois (PQ) a piétiné ces 10 dernières années. Ce piétinement a changé le visage de la politique québécoise. Il a permis à d'autres débats d'émerger.
Juste avant d'entrer dans le nouveau millénaire, le PQ de Lucien Bouchard pensait encore pouvoir organiser un troisième référendum sur la souveraineté à brève échéance.
Après tout, il avait échoué de peu à celui de 1995. Or, tous ses efforts ont été vains. Toutes ses stratégies se sont cassé le nez.
L'histoire de l'enlisement débute durant les derniers jours de 1999 et les tout premiers de 2000. Pour riposter au projet de loi sur la «clarté» référendaire du ministre fédéral Stéphane Dion, le gouvernement péquiste présente le projet de loi 99.
La législation prend appui sur le droit des Québécois à choisir leur avenir, sur l'intégrité territoriale du Québec et sur la règle du 50% des votes plus un.
Sans le dire, des péquistes rêvent de faire du projet de loi 99 le premier acte des nouvelles manoeuvres devant conduire le Québec à la souveraineté. L'échec est retentissant.
Un an plus tard, Lucien Bouchard paraît dépité. Rien ne fonctionne. Il regrette que les Québécois n'aient pas manifesté davantage de combativité devant les «offensives fédérales».
Ils sont «restés étonnamment impassibles», constate-t-il. Il fait allusion à la Loi sur la clarté référendaire et aux «bourses du millénaire».
Déçu que ces offensives n'aient pas permis au Oui de faire meilleure figure dans les sondages, il choisit de démissionner.
Le chapitre ouvert par le référendum de 1995 s'est fermé en ce jour où Lucien Bouchard a rendu son tablier. Nous sommes en janvier 2001.
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[L'ÉTEIGNOIR ET LE MIROIR AUX ALOUETTES->24783]

Robert Laplante, L'Action nationale, 15.1.01 - «L'homme qui pense avoir échoué à raviver la flamme souverainiste n'a jamais compris que c'est sa politique qui a eu l'effet d'un éteignoir. Lucien Bouchard s'est enfermé dans la gestion de la province de Québec. Or la politique provinciale est contraire à nos intérêts nationaux. [...] La politique provinciale nous tient comme des grenouilles dans un chaudron lentement porté à ébullition!»
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Ni Bernard Landry, ni André Boisclair après lui ne sont parvenus à «raviver la flamme». Aujourd'hui, Pauline Marois tente à son tour d'insuffler une nouvelle vitalité au projet souverainiste. Sans beaucoup plus de succès jusqu'ici.
Les sondages n'accordent jamais plus de 44 % au projet souverainiste. Très souvent, moins. On pourrait d'ailleurs ajouter que l'intensité n'est plus ce qu'elle était, même chez de nombreux souverainistes convaincus. La lassitude en a gagné plusieurs.
Comme en écho à ce qu'avait dit Lucien Bouchard, le péquiste François Legault s'est dit déçu de «l'indifférence» des Québécois lorsqu'il a quitté en juin. Sans en prendre conscience, il bouclait une boucle.
Gauche et droite
Cet enlisement a eu un effet concret : il y a eu un vide à combler. Or, il s'est rempli. D'autres débats politiques ont émergé. C'est là un fait majeur.
On ne peut plus dire aujourd'hui, comme naguère, que l'omniprésence de la «question nationale» plonge dans l'obscurité tous les autres sujets.
C'est aussi une affaire d'époque, mais le fait est que l'ADQ a pris véritablement son envol au début des années 2000. Et que ce parti, situé à la droite de l'échiquier politique, n'a cessé de grimper tout au long de ces années, jusqu'à l'implosion de l'an dernier.
À la gauche du PQ, Québec solidaire est né durant ces mêmes années, années pendant lesquelles les verts se sont aussi structurés. Des éléments significatifs liés au recul du projet de souveraineté.
Ce piétinement de l'idée de la souveraineté a eu une autre conséquence directe : la disparition de toute proposition de renouvellement du fédéralisme. La structure fédérale a évolué par touches et retouches ces dernières années, mais l'époque des possibles transformations de la fédération canadienne est désormais loin.
Le renouveau du projet souverainiste passera-t-il demain par les questions d'identité, dont le Parti québécois s'est emparé pour ne plus les lâcher? Pauline Marois veut le croire.
Notons tout de même qu'un débat similaire a été engagé dans d'autres pays par des partis politiques «centraux», des formations qui ne cherchent pas à réaliser quelque projet de souveraineté que ce soit. Cette question taraude tout l'Occident, en fait.


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