L’arrogance du gagnant

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Couillard est trop baveux pour durer





Quand on est certain de garder le pouvoir, on est tenté par l’arrogance. On peut même devenir indifférent aux vœux de la majorité et au devoir de tout gouvernement de cristalliser les consensus pour en faire des lois.


On aurait dit que c’était le cas du gouvernement Couillard cette semaine. Malgré les fantômes des années Charest, les expulsions et les tensions internes, les libéraux peuvent être persuadés d’être réélus en 2018. Le caucus a même récemment eu droit à une présentation détaillée des raisons pour lesquelles la victoire est à peu près certaine. Les sondages sont imperturbables. L’économie se porte plutôt bien. Les libéraux partiraient avec de plus en plus de comtés sûrs: une cinquantaine seraient dans la poche.


De l’apaisement à la diabolisation


L’arrogance du gagnant, on l’a évidemment vue sur la question de la neutralité religieuse. Après l’attentat de Québec, un consensus commençait à poindre: la formule Bouchard-Taylor (prohibition de signes religieux pour les agents de l’État en situation d’autorité coercitive) allait rallier tous les partis. Le premier ministre s’apprêtait à saisir la main tendue des oppositions. Le débat serait mis en veilleuse pour longtemps. L’entourage de Philippe Couillard a beau dire qu’il n’en a jamais été question, plusieurs ont vu dans les appels du PM à un «débat apaisé» une ouverture en ce sens. Des membres de son caucus libéral espéraient un tel dénouement. Évidemment, lorsque Charles Taylor fit volte-face et désavoua la recommandation phare du rapport qui portait pourtant son nom, M. Couillard sauta sur l’occasion pour revenir à sa diabolisation de ce qu’il a appelé non sans démagogie la «discrimination vestimentaire». Gérard Bouchard a bien fait de le lui reprocher, d’ailleurs.


Vieux visés


Autre indifférence: pendant des mois, le ministre des Finances Carlos Leitao savait que plusieurs personnes allaient perdre jusqu’à 500 $ par année pendant cinq ans à la suite de sa réforme du crédit d’impôt «en raison de l’âge», annoncé dans le budget de 2015. Mais il a fallu la chronique de Michel Girard et des dénonciations en Chambre, pour qu’il annonce des mesures pour pallier ces pertes. Même quand ses décisions risquent de heurter sa clientèle naturelle, le gouvernement Couillard semble marcher à pas lent. Évidemment, on peut comprendre qu’un gouvernement, face au vieillissement de sa population, veuille ajuster sa fiscalité pour éviter que ses citoyens âgés ne soient encouragés à quitter trop vite le marché du travail. N’empêche, pénaliser des vieux gagnant 20 000 $ ou un peu plus n’aurait jamais dû faire partie de la solution.


Mode de scrutin utile


La semaine dernière, tous les partis d’opposition ont réclamé une réforme du mode de scrutin. Le système «uninominal à un tour», selon eux, serait dépassé; provoquerait des distorsions de représentation. C’est là l’antienne habituelle des oppositions, bien sûr. Même le PLQ, lorsqu’il a perdu le vote populaire en 1998 (il avait obtenu plus de voix, mais moins de sièges à l’Assemblée nationale que le PQ de Lucien Bouchard), avait entonné le même air. Après son retour aux affaires en 2003, le PLQ organisa une grande consultation. Mais le projet de réforme fut vite abandonné. Depuis, avec la division durable du vote francophone en plusieurs partis, le «mode uninominal à un tour» fait l’affaire des libéraux. La ministre Rita de Santis l’a clairement dit la semaine passée en Chambre: «À date, le système que nous avons nous sert bien», avant de préciser que son «nous» n’était pas que libéral, mais québécois... L’arrogance n’est jamais loin.







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