La victoire que souhaite le PQ est loin d’être assurée. Il est possible que les prochaines élections au Québec soient, du fait du scrutin à un tour, un sombre traquenard, plutôt qu’un processus démocratique: plusieurs éléments nous permettent d’envisager un scénario qui reconduirait au pouvoir un gouvernement Charest pourtant rejeté par la grande majorité de la population.
En effet, on a pu constater que dans les élections précédentes, des petits partis comme Québec solidaire ont pu efficacement diviser le vote progressiste pour contribuer à la réélection du Parti libéral du Québec.
Le pouvoir de nuisance de Québec solidaire, soit-disant “indépendantiste”, sera augmenté par le fait qu’un bon nombre de ses militants se sont investis dans le NPD, contribuant à la victoire d’un parti fédéraliste: il faut s’attendre à un “retour d’ascenseur” du NPD au profit de QS.
Par ailleurs, on voit déjà des militants de QS se mettre en ligne pour faire partie des 150 permanents rémunérés du NPD-Québec. Ces militants ont généralement une expérience organisationnelle que les nouveaux venus de la vague “orangiste” n’ont pas.
On aurait donc, dans l’échiquier politique québécois, non pas un support du Bloc (décimé) au PQ, mais une machine de guerre fédéraliste (NPD-QS) prête à la mise en oeuvre de toutes les stratégies … pour barrer la route au PQ. Je ne crois pas que les citoyens qui ont voté NPD en espérant des mesures sociales qu’ils n’auront pas (Harper ayant le pourvoir absolu), aient voté pour introduire au Québec un “cheval de Troie” fédéraliste !
Ce possible détournement d’un processus démocratique déjà fort imparfait, bloquerait toute voie légale à l’expression politique de la nation québécoise, et ne laisserait aux citoyens que la rue comme lieu d’institutionnalisation du pouvoir. Il serait à prévoir que, comme d’habitude, l’armée canadienne soit appelée pour écraser une expression politique extra-parlementaire.
Au lieu des larmes de crocodile de Monsieur Amir Khadir à propos de la défaite historique du Bloc québécois, il serait intéressant qu’il nous livre très honnêtement son point de vue sur la position exprimée, avant même les élections, par deux militants indépendantistes de son parti:
«On comprend les électeurs de gauche au Québec qui sont tentés de voter pour Jack et ses candidats. Mais attention ! Le signal progressiste qui sera envoyé en votant NPD pourrait être perverti si cela affaiblit l’opposition à Harper. Une défaite importante pour le Bloc serait une victoire non seulement pour Harper mais pour l’ensemble des dominants au Canada. » (François Cyr et Pierre Beaudet, «La question du NPD», Les Nouveaux Cahiers du Socialisme, 25 avril 2011; ).
L’offensive appréhendée d’une “cinquième colonne” de “phalangistes” fédéralistes contre la démocratie et contre la nation québécoise ne sera victorieuse que si elle n’est pas combattue avec stratégie et détermination. C’est pourquoi je crois que la vigile nationale doit se faire partout, y compris au sein du NPD.
***
Yves Claudé – sociologue
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5 commentaires
Yves Claudé Répondre
9 mai 2011On aurait pu remarquer aussi que mon emploi du terme “phalangistes” … était quelque peu outrancier, mais comme disait l’autre, « nous ne sommes pas dans un dîner de gala »…
Travaillant sur l’extrême droite, je suis à même de documenter certaines différences idéologiques et organisationnelles ... En utilisant le terme “orangiste” – d’ailleurs entre guillemets – je voulais métaphoriquement souligner le fait que les contradictions qui traversent le NPD, pour l’instant superficiellement colmatées par l’euphorie de la “victoire”, vont à moyen terme éclater au grand jour et faire surgir une tendance réactivement et radicalement anti-indépendantiste, à l’image des dérives partitionnistes qui sont apparues dans les marges du Parti libéral du Québec et de ses scories radicales (Parti Égalité, etc.). Cependant, du fait de la composition socio-organisationnelle du NPD, cette radicalité anti-indépendantiste sera principalement et stratégiquement située dans les structures dirigeantes de l’appareil du parti, à moins qu’une mobilisation salutaire des membres et élus québécois ne fasse obstacle à ce phénomène.
Les aspirants au pouvoir qui commencent à jouer des coudes dans l’ombre de Layton ont le profil autoritaire qui les révélera sous peu comme de redoutables “orangistes”. Il ne faut pas attendre que le travail du temps et des événements fasse son œuvre, pour mettre à jour les contradictions et les travailler avec les instruments de la dialectique ! La naissance d’un monde nouveau ne se fait pas par des voies “naturelles” !
Yves Claudé
Archives de Vigile Répondre
9 mai 2011Ne pas confondres les Oranges du NPD et les Orangistes de l'Histoire.
C'est comme comparer des pommes et des oranges.
Historiquement, le NPD est socialiste et syndicaliste.
Il a ses racines dans l'Ouest Canadien avec les agricultures. Mais plus important, c'est ce qui est advenus des Métis de Louis Riel. Son secrétaire personnel, un Ontarien anglais prénommé Henry, mais devenu Honoré, a rejoint le Socialisme International et est devenu un important syndicaliste américain.
Il était fortement opposé à l'Orangisme.
Le KKK illégal ? Pourtant il s'affiche assez bien aux USA.
Le sénateur Byrd fut un leader important du KKK.
Maintenant c'est l'ancien député de la Louisiane David Duke qui le mène.
Laurent Desbois Répondre
8 mai 2011Welcome to Canada, mon cher concitoyen!!!
@Yves Claudé - sociologue vendredi 6 mai 2011 05h49
http://www.ledevoir.com/politique/canada/322709/election-dans-berthier-maskinonge-ruth-ellen-brosseau-ne-figurait-pas-sur-l-acte-de-candidature
« La farce a assez duré ! Démission de Mme Brosseau
En tant que membre du NPD-Québec, je suis absolument sidéré par la manière dont les "orangistes" de Toronto gèrent la crise de notre parti au Québec, ainsi que l'extrême autoritarisme dont ils font preuve »
Puisque Le NDP nous dit que madame Brosseau est en formation intense pour la préparer à ses nouvelles fonctions, je vous suggère d’ajouter le livre suivant au syllabus de vos nouveaux recrus, y inclus ceux du ROC : « Loyalisme et fanatisme », Petite histoire du mouvement orangiste canadien, par Pierre-Luc Bégin, Les Éditions du Québécois, 2008, 200 p. (ISBN 2923365224).
Les Orangistes étaient le bras canadien du KKK… contre les nègres blancs Francophones!!!!
Il y avait des liens entre les orangistes et le KKK. Ils s’échangeaient des listes de membres. Il y a aussi une grosse différence…. Le KKK a été déclaré illégal aux USA, mais les Orangistes sont toujours actifs et légal au Canada.
Welcome to Canada, mon cher concitoyen!!!
Laurent Desbois
ex-franco-Ontarien,
fier Québécois depuis quarante ans
et canadian… par la force des choses et temporairement …. sur papiers seulement!
Yves Claudé Répondre
8 mai 2011Je serais très heureux d’avoir entièrement tort et que l’anonyme “dernier recours” ait raison sur toute la ligne … Mais la réalité est tenace, et les faits du passé ne sont pas sans conséquences sur ceux à venir ! À part quelques épisodes rapidement circonscrits, les quelques dissidents de QS, que ce soit sur la question nationale (officiellement et concrètement secondarisée) ou sur celle de la laïcité, ces dissidents ont été bâillonnés et remis dans le rang, comme Thomas Mulcair l’a été récemment dans le cadre du NPD, à travers une intervention médiatique musclée des orangistes de Toronto à son endroit.
L’anonyme “dernier recours” a bien le droit de penser que l’idéologie orangiste qui a justifié l’oppression de la nation canadienne (au sens propre de nation française d’Amérique) par les britanniques et néobritanniques depuis la Conquête, constitue une “sorcellerie fédéraliste”: il témoigne ainsi à sa manière d’une religiosité dogmatique qui imprègne une bonne partie de la base et de la direction de QS, et qui est un reliquat persistant de la mythologie maoïste dont ce groupe aspirant naïvement au pouvoir est l’héritier.
Le “succès” du NPD au Québec constitue en fait un double échec : échec à empêcher l’élection d’un gouvernement conservateur majoritaire et par conséquence échec à réaliser la moindre des mesures sociales que le populiste Layton a promis aux Québécois tandis qu’il occultait stratégiquement son idéologie orangiste.
Malgré les dénégations de notre courageux anonyme, un “cheval de Troie” fédéraliste a effectivement été introduit au Québec sous prétexte de progressisme, et il s’agit maintenant de l’en déloger ! Une éventuelle démarche pourrait être de revenir à une formule antérieure du NPD-Québec qui était une formation à la fois indépendante et indépendantiste…
En ce qui concerne QS, ce groupe politique doit nous démontrer concrètement qu’il change de cap : un premier gage de ce changement serait le rejet du multiculturalisme fédéraliste que QS cultive sous l’appellation fallacieuse de « laïcité ouverte ». Un second serait l’abandon de sa stratégie aveugle de division du vote progressiste sous-tendue par une perspective selon laquelle le pire (réélection répétitive du gouvernement Charest) serait le gage du meilleur !
Yves Claudé - sociologue
Archives de Vigile Répondre
8 mai 2011Certains militants de Qs ont aidé la campagne du NPD; d'autres ont aidé celle du Bloc. Certains croient que les problèmes majeurs du Bloc (et du PQ) se régleront en accusant le premier venu de sorcellerie fédéraliste.
Québec solidaire est un parti souverainiste depuis sa cération. Il a dernièrement relancé les débats sur la souveraineté que le PQ a mis de côté dans l'attente du "grand soir". La démarche de Qs est clairement expliqué site de la campagne: paysdeprojets.org