Interdire la langue française au Québec

Vingtième anniversaire de la mort de Félix

En un jour de grande pluie
_ nous les enfants
_ avions transformé la maison en gymnase.
_ Pyramides de chaises, fuites dans les escaliers,
_ coups de sifflets, coups de balais, affrontements,
_ nous avions dépassé la limite de la tolérance.
_ Ma mère,
_ sur le bord de la crise de nerfs,
_ voit le ballon casser une vitre.
_ Très calmement, elle se lève,
_ met son chapeau et son manteau et dit: «Je m'en vais».
_ Et elle est partie.
_ Nous étions sûrs qu'elle rentrerait par la porte d'en arrière.
_ Elle n'est pas revenue.
_ Le poêle s'est éteint.
_ L'inquiétude et la peur se sont installées sans bruit.
_ La pire nuit de larmes
_ de hurlements
_ de panique
_ de cauchemars et de remords
_ que nous ayons connue de notre vie.
_ Les onze loups que nous étions étaient devenus onze
_ petits poussins,
_ tous malades,
_ quand elle est apparue le surlendemain.
_ Nous venions de sombrer dans le grand trou noir
_ du manque d'air.
_ À sa vue,
_ la maison devint chapelle de fleurs, de tendresse
_ et d'amour.
_ À partir de ce moment, nous avons couvé,
_ aidé,
_ protégé
_ et adoré notre mère jusqu'à la fin des temps.
_ La langue française devrait disparaître du Québec,
_ s'en aller et ne plus revenir comme une mère qui s'en va.
_ L'interdire pour un an.
_ Puisqu'on n'en veut pas. Qu'on en a honte.
_ Et qu'on la traite avec ses trois siècles sur le même pied
_ qu'une autre langue avec ses trois ans.
_ Nous méritons tous qu'elle s'en aille.
_ Plus de français nulle part,
_ ni au travail
_ ni à l'école
_ ni à l'église
_ ni au syndicat
_ ni au cinéma
_ ni au restaurant
_ ni à Radio-Canada
_ ni dans les journaux
_ ni dans l'affichage
_ ni dans le train
_ ni dans la chanson.
_ Fini, interdit et même payer l'amende si on la parle.
_ Nous la découvririons peut-être
_ et à six millions
_ l'imposerions logiquement et sans heurt,
_ comme chez tous les peuples du monde où la langue
_ de la majorité est la seule officielle.
_ À la Tour de Babel, elles étaient toutes officielles,
_ de là, la confusion.
_ LES TROIS CONDITIONS SUIVANTES SONT ESSENTIELLES POUR ÉVITER _ LA CONFUSION :
_ 1. Que le gouvernement éteigne vigoureusement le feu qui couve au lieu de l'attiser.
_ 2. Que les jeunes par cent mille volent au secours de leur langue maternelle en détresse.
_ 3. Que les vieux par centaines, cessent de mourir, de trahir et de fuir!
( ou serait-ce là notre marque d'une société distincte ? )


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1 commentaire

  • Lucille Labrie Répondre

    4 août 2008

    Magnifique prose malheureusement très véridique et actuelle
    Ce matin 4 aôut 2008 j'écoutais les 15 dernières minutes d' une ligne ouverte de Paul Arcand radio 95.8 et tous les intervenants se disaient en faveur de l'École bilingue dès la première année
    et une dame de Saguenay se disait frustrées de ne pas pouvoir mettre son tout petit à l'école anglaise
    Ces Québécois disaient se sentir petits et inférieurs, convaincus que rien ne fonctionnera dans leur vie s'il ne sont pas parfaitement anglicisés
    Je souhaitais avoir la chance de m'exprimer pour dire sarcastiquement que l'on abolisse donc l'école française puisque à les entendre cela est devenu une tare d'être francophone.
    400 ans de combats et on y était presque arrivé au pays français d'Amérique , mais là, il semblerait que l'on soit venu à bout de nous. ¨Cà aurait été long et ardu de faire de notre peuple des bons canadians, mais patience il n'en reste pas long à faire...
    Jacques Godbout prétend qu'en 2067 le Québec français sera disparu,plusieurs pensent qu'il devra hélas devancer sa date et de beaucoup .