MARIAGE ET «UNION SPIRITUELLE»

Il faut respecter le Code civil!

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Pas de place pour les apprentis-sorciers en droit civil

Le ministre du culte qui célèbre un mariage peut-il, à la demande des conjoints, voire de l’un d’eux, s’abstenir d’en déclarer l’existence au directeur de l’état civil afin de le priver des effets juridiques dont il serait autrement assorti, comme le patrimoine familial et l’obligation alimentaire ? Le 2 février, la juge Christiane Alary de la Cour supérieure a répondu oui à cette question, comme l’y invitait la procureure générale du Québec dans sa plaidoirie. Selon la juge, le nouveau Code civil entré en vigueur en 1994 permet de dissocier les dimensions religieuse et civile du mariage. Bien que la décision du tribunal ait été portée en appel, certains ministres du culte pourraient être tentés de s’y référer pour justifier la célébration de mariages uniquement religieux. À notre avis, il y a lieu de couper court sans délai à leurs velléités, l’analyse historique des textes juridiques sur le mariage permettant de réfuter le raisonnement de la juge Alary.

Sous l’ancien Code civil, les ministres du culte tenaient leur habilitation à célébrer le mariage de la responsabilité que leur confiait l’État de dresser les actes d’état civil de mariage et d’en assurer la conservation au sein d’un registre officiel tenu en double exemplaire. L’un des deux exemplaires devait être transmis au début de chaque année au greffe de la Cour supérieure. Le manquement à cette obligation pouvait donner lieu à l’imposition d’une amende. Le Code envisageait également le cas du mariage célébré par un ministre du culte ne détenant pas le pouvoir de tenir registre. Malgré l’absence d’habilitation légale, celui-ci se voyait imposer l’obligation de dresser un acte de mariage et de le transmettre au greffe de la Cour supérieure. En somme, tous les mariages célébrés par un ministre du culte, habilité ou non, devaient être déclarés à l’État.

Nouvelles dispositions

Le nouveau Code civil a dépossédé les ministres du culte de leur responsabilité de dresser l’acte de mariage et de tenir les registres d’état civil. Leur habilitation légale tient désormais au numéro d’autorisation spécifique que le ministre de la Justice est appelé à leur délivrer. Afin de permettre l’inscription du mariage dans le nouveau registre d’état civil tenu par le directeur de l’état civil, le Code énonce que « [l]e célébrant établit la déclaration de mariage et la transmet sans délai au directeur de l’état civil ».

Certains insisteront peut-être sur le fait que le Code ne précise pas que le célébrant « doit » agir ainsi. Les commentaires du ministre de la Justice fournissent un élément de réponse à cet argument de texte. On peut y lire que « [le Code civil] oblige le célébrant à établir la déclaration de mariage et à la transmettre […] au directeur de l’état civil ». L’absence du verbe « devoir » ne saurait donc appuyer la thèse suivant laquelle le célébrant se verrait reconnaître la faculté, mais non l’obligation de déclarer le mariage. D’ailleurs, le Code énonce que le célébrant « s’assure de l’identité des futurs époux », leur « fait lecture […] des dispositions des articles 392 à 396 », « reçoit d’eux personnellement la déclaration qu’ils veulent se prendre pour époux » et « les déclare alors unis par le mariage ». De toute évidence, ces formalités sont obligatoires, même en l’absence du verbe « devoir ».

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