Syndiqués et patrons sont condamnés à s’entendre : le gouvernement du Québec écarte un recours à une loi spéciale afin de forcer les travailleurs du secteur de la construction à retourner sur les chantiers.
« On n’a pas connu de grève depuis plus de 25 ans, et ce que je souhaite, c’est que ça cesse rapidement, a déclaré la première ministre Pauline Marois, lundi après-midi, en marge de l’annonce d’un corridor de recharge électrique Québec-Vermont. Nous sommes très, très attentifs », a-t-elle toutefois ajouté.
Sincérité mise en doute
La grève des travailleurs devra se régler par la négociation, a répété tout au long de la journée la ministre du Travail, Agnès Maltais. « Il n’y a pas de loi spéciale. Il n’y en a pas en préparation. Il n’y en a pas dans ma vision », a déclaré l’élue en marge d’une annonce dans le quartier Limoilou, à Québec. « Ce n’est pas le gouvernement qui décide des conditions de travail dans l’entreprise privée », a-t-elle ajouté, avant de se tourner une nouvelle fois vers les parties patronale et syndicale. « N’attendez pas que le gouvernement règle le problème. C’est votre responsabilité personnelle d’aller chercher un compromis », a-t-elle lancé aux deux camps.
Pourtant, aux tables de négociations « ç’a été le calme plat » au cours de la première journée de grève, a indiqué le porte-parole de l’Alliance syndicale de la construction, Yves Ouellet. « On n’a pas eu de téléphone. »
Depuis minuit, lundi, les 175 000 travailleurs de la construction sont en grève pour une période indéterminée. Tous les chantiers du Québec - ou presque - étaient paralysés. Les méga-chantiers de La Romaine, du CHUM, du CUSM, avaient notamment troqué les bruits des marteaux et le vrombissement des moteurs des de véhicules lourds pour les slogans « grève générale illimitée, so, so, so, solidarité ! » des grévistes.
La partie patronale doute de la sincérité des cinq syndicats représentés par l’Alliance syndicale - c’est-à-dire le Conseil provincial des métiers de la construction (International) (CPQMC-I), la FTQ-Construction, la CSD-Construction, le Syndicat québécois de la construction, ainsi que la CSN-Construction -, a souligné la négociatrice de l’Association de la construction du Québec (ACQ), Lyne Marcoux. « Je pense qu’on peut en arriver encore à un règlement, sauf qu’il faudrait que les syndicats soient sincères, à l’heure actuelle, et nous démontrent que ce n’est pas autre chose qui est en dessous de cette grève-là », a-t-elle affirmé.
L’offre patronale marquerait « cinq reculs » si elle était mise en oeuvre, selon M. Ouellet.
L’Alliance syndicale de la construction réclame des hausses des clauses pécuniaires à hauteur de 3 %, puis 2,75 % annuellement pour les trois années suivantes, tandis que l’ACQ offre, au minimun, de suivre l’évolution de l’inflation. « Au minimum, la demande du porte-parole syndical de maintenir le pouvoir d’achat des travailleurs serait satisfaite », a assuré l’association patronale. Pas suffisant. « Tout ce qu’on leur demande, c’est qu’ils ne jouent pas sur le pouvoir d’achat des travailleurs », a fait valoir M. Ouellet, malgré les assurances de la partie patronale.
Labeaume en faveur d’une loi spéciale
Le maire de Québec, Régis Labeaume, « n’hésiterait pas », lui, à soumettre à l’Assemblée nationale un projet de loi spéciale pour relancer les chantiers au Québec. Les travailleurs de la construction « ne passeraient pas la semaine » avec lui aux commandes, a-t-il souligné. Quelque 200 000 $ sont nécessaires chaque jour pour maintenir le chantier de l’amphithéâtre de Québec, malgré l’arrêt des travaux. « Ça, c’est à part les retards, les réclamations. Tout ça. Juste avoir le chantier tel quel, ça nous coûte 200 000 $ par jour. »
La Fédération des chambres de commerce du Québec juge à première vue les demandes syndicales « démesurées », mais s’est gardée de demander l’adoption d’une loi spéciale.
Le secteur de la construction représente 7 % du PIB du Québec, soit 22 milliards de dollars.
Avec Jessica Nadeau
Avec La Presse canadienne
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