Greenpeace a raison

Les causes de la pollution de nos eaux, incluant les cyanobactéries, sont connues depuis au moins 30 ans en Amérique du Nord.

EAU - Commerce de l'eau

Le porte-parole de Greenpeace a tout à fait raison. Les causes de la pollution de nos eaux, incluant les cyanobactéries, sont connues depuis au moins 30 ans en Amérique du Nord. Le Québec a aussi formé deux commissions sur l'eau, dans les années 1970 et 1990. En 1980, nous avons aussi publié un document simple et éclairant sur «L'eau et l'aménagement du territoire». Ce document a été un bon vendeur pendant plusieurs années chez l'Éditeur du Gouvernement.
Tout le blabla qu'on nous garroche aujourd'hui et qu'on veut poursuivre dans un «rendez-vous stratégique» n'est qu'un faux-fuyant. De grâce, politiciens, prenez le temps de lire les documents pré-cités et mettez vos culottes.
Les eaux sont du domaine public. Il appartient donc au gouvernement d'établir les règles à respecter par les citoyens. Ceux-ci doivent comprendre qu'ils sont les premières victimes de la pollution des eaux. On ne peut tolérer le «dumping» de pneus, de réfigérateurs, de carcasses d'autos, etc. dans un ravin qui contenait, au départ, une belle eau claire.
À l'État d'agir
Il appartient à l'État d'établir clairement, dans sa loi, quels sont les sites propices à recevoir une habitation. Il faut d'abord s'assurer qu'une fosse septique peut y être installée, à au moins 30 mètres du bord de l'eau. Si les crans de roche ne permettent pas une telle installation, pas d'habitation. Si un puits doit être foré, il faut qu'il le soit en amont de la fosse septique, aussi à au moins 30 mètres. L'État peut aider les propriétaires en leur fournissant un plan de fosse adéquate, au meilleur coût possible, et une copie aux municipalités, qui ont la responsabilité de vérifier chaque fosse bâtie où à bâtir.
L'État devrait aussi bannir le phosphore des savons de lavage de linge ou de vaisselle. Enfin, l'État devrait exiger qu'on protège la rive des lacs et cours d'eau en y maintenant des arbustes et des arbres d'espèces à fort enracinement, capables de bien contrer l'érosion des berges, au moins dans les premiers dix mètres de la rive. Et, de grâce, exigeons que les propriétaires cessent de cultiver des pelouses verdoyantes, fertilisées au phosphore et à l'azote, que les cyanobactéries adorent. Mais il n'appartient ni à l'État ni aux municipalités d'emprunter pour financer la rénovation de fosses déficientes. Ils ne le font pas dans les milieux ruraux.
Modifiler l'élevage du porc
Malheureusement, malgré tous les efforts des propriétaires d'habitations riveraines, bien des lacs et cours d'eau ne peuvent être sauvés sans l'aide des agriculteurs. Les zones rurales sont les plus susceptibles de polluer à la fois les eaux de surface et les eaux souterraines dont les propriétaires ont absolument besoin pour la survie de leurs famille et de leurs animaux. On a beau ergoter, mais l'agriculture peut être dévastatrice pour l'eau si on ne prend pas certaines précautions.
L'État n'aurait jamais dû permettre d'élever les porcs sur lisier. De soutenir qu'on peut doser l'application des lisiers, des liquides, pour que les plants de maïs puissent instantanément absorber les ions (phosphore, azote et autres) et laisser seulement l'eau claire pénétrer en profondeur dans le sol, s'évacuer par les centaines de kilomètres de drains puis dans les ruisseaux et rivières redressés aussi sur des centaines des kilomètres pour enfin aboutir à la fin dans les lacs, est une farce cynique.
Et que dire des eaux souterraines, essentielles aux agriculteurs eux-mêmes? Comment un non-éleveur de porcs sur lisier peut-il accepter de recevoir du lisier d'un voisin comme fertilisant ? Élever le porc sur litière solide, de paille par exemple, serait bien plus approprié. Le fumier épandu se mélange avec le sol lui donnant plus d'humus, donc une meilleure adsorption des ions en surface et une meilleure accessibilité aux racines. L'UPA doit se réveiller et comprendre qu'ils se tirent dans le pied. Sinon c'est à l'État d'imposer d'autres modes de gestion pour sauver nos eaux.
Enfin, il faut que l'État réalise que s'il ne prend pas le taureau par les cornes tout de suite, il y aura de plus en plus de lacs infectés. Et la plantation de milliers d'arbres sur les rives embellira le paysage et contrôlera l'érosion mais n'aura que peu d'effet sur les cyanobactéries. C'est un pansement sur une jambe de bois.
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Guy Lemieux
écologue, Québec


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