Énergie NB et la formule PPP prise un !

Tribune libre

Quelle belle occasion pour les gens d’affaires de démontrer la souplesse et l’à propos de la formule PPP pour sauver Énergie NB. Qu’en est-il ?
H. Reuben Cohen, éminent avocat de Moncton, a fait une intervention historique le 12 février 2010 dans le Telegraph Journal. Il estime que la décision du gouvernement de Shawn Graham de vendre des actifs d’Énergie NB à Hydro-Québec est une mauvaise décision. Cette décision selon Me Cohen répond à une situation de panique et elle oblitère l’analyse d’autres alternatives qui n’ont pas été étudiées. Parmi ces alternatives, nous mentionnons la formule PPP (partenariat public privé).
Le présent texte est écrit en fonction des paramètres de la 2e entente intervenue le 20 janvier 2010. Le prix en jeu de cette entente à payer par les québécois via leur Société d’État et leur gouvernement est de 3,2 milliards $.
Les réflecteurs sont tournés sur Énergie NB depuis l’annonce “surprise” d’une 1 ère Entente faite le 29 octobre 2009 à Fredericton par les 2 PM, Shawn Graham pour le Nouveau-Brunswick et Jean Charest pour le Québec. Le prix de vente d’Énergie NB d’alors était de 4,75 milliards $. Le prix a baissé lors de la 2e Entente.
Nous discutons de ce dossier depuis plus de 4 mois, bientôt 5 mois le 29 mars. Il saute aux yeux que les néo-brunswickois s’opposent beaucoup à la 1 ère et à la 2e Entente. Un récent sondage de Radio-Canada place cette opposition au-dessus de 75%. Même un ministre du gouvernement Graham au pouvoir, Victor Boudreau, reconnaît que le dossier de l’information a été très mal fait par les promoteurs du projet à commencer par une annonce surprise d’une Entente le 29 octobre 2009.
Au Québec, comment reçoit-on ce projet selon les paramètres de la 2e Entente du 20 janvier 2010? De manière presque dans l’indifférence. On boit les paroles de notre PM qui qualifie cette transaction de “gros bon sens”, que cette Entente porte sur des “actifs de qualité” et qu’une rentabilité de 10% est au rendez-vous dès la première année.
J’ai parlé plus avant de l’annonce surprise de la 1 ère Entente par les deux PM le 29 octobre 2009. Ce fut aussi une surprise pour les québécois. Qu’est-ce qu’Hydro-Québec et le Gouvernement du Québec vont faire pour sauver Énergie NB et ses 370 000 abonnés et débourser des milliards de $ pour payer une partie de la dette d’Énergie NB et de la province du Nouveau-Brunswick ? Le Québec est-il assez riche pour jouer un rôle de bien-être social avec son voisin?
N’existe-t-il personne au Nouveau-Brunswick pour redresser le navire d’Énergie NB, pays de mer et de pêcheurs qui s’y connaissent en “gros temps” ?
Depuis le 29 octobre 2009, nous disions que les réflecteurs sont tournés sur la société d’État Énergie NB. Ce que nous entendons surtout de la part des néo-brunswickois porte sur la dénonciation des hauts tarifs d’électricité qui nuisent à l’économie de la province. Ce sont autant les clients résidentiels, commerciaux et industriels qui se plaignent. Mais cette situation financière précaire ne résulte pas de la génération spontanée. À gauche et à droite, nous lisons toutes les horreurs qui ont été vécues par Énergie NB et qui existent encore aujourd’hui.
Nous énumérons ci-dessous quelques horreurs:
a) la centrale nucléaire Point Lepreau, actuellement en rénovation, est en retard dans sa nouvelle mise en service. Cette mise en service, incertaine, est annoncée pour janvier 2011. Les coûts de ce retard atteignent actuellement 500 millions $ et toucheront le 800 millions $ en janvier prochain. Et la cerise du nucléaire repose dans la gestion des déchets irradiés: il y en aurait plus de 2000 tonnes à Point Lepreau, encombrant la planète pour des milliers d’années.
b) il y a l’aventure du combustible “orimulsion” produit par le Venezuela. Ce pays a décidé d’interrompre la production de l’orimulsion; conséquence: la centrale Dalhousie utilisant ce combustible fermera bientôt. C’est une perte de 300MW de puissance de production sur la toile du réseau de production du Nouveau-Brunswick. Une autre centrale a été transformée pour brûler de l’orimulsion, soit la centrale Coleson Cove: des centaines de millions investis inutilement. On a dû revenir au mazout à Coleson Cove.
c) parlant de mazout et le charbon est dans la même famille, à chaque augmentation de 10$ le baril, une facture de 40 millions $ apparaît au bout de l’année pour Énergie NB. Et quelles sont vos prédictions pour le prix du pétrole durant les prochaines années? Une autre tuile attend Énergie NB.
d) Jean Charest a parlé beaucoup de l’acquisition “d’actifs de qualité”.
Parlons de l’actif de Point Lepreau qu’Hydro-Québec est prête à payer 1,4 milliard $. En expert d’Énergie NB a révélé que durant les 25 années d’opération de Point Lepreau entrée en service en 1983, cette centrale a bien fonctionné durant 10 ans. Les 15 dernières années ont été un cauchemar. Que pensez-vous qu’il arrivera à ce réacteur CANDU durant les 25 prochaines années SI la rénovation est réussie et si les permis nécessaires sont émis?
2e actif de qualité: les barrages hydrauliques sur le fleuve Saint-Jean, dont le plus important, le barrage et la centrale Mactaquac d’une puissance de 672 MW, soit 75% de la puissance des 7 barrages sur ce fleuve. Lundi dernier sur les ondes de Radio-Canada, le ministre Victor Boudreau du Nouveau-Brunswick a fait allusion aux coûts énormes que nécessitera la reconstruction de ce barrage. Il n’en a pas dit davantage. C’est un argument qu’il utilisait pour appuyer son argument que les néo-brunswickois seraient bien avisés d’accepter la 2e Entente de vente d’actifs à Hydro-Québec parce que la “patate chaude” du barrage Mactaquac serait dorénavant la responsabilité des québécois via la société d’État Hydro-Québec. On appelle cela un transfert de risque et ce n’est pas “gratos”.
Ce que nous apprenons d’autre part, c’est que ce barrage, le plus important par la puissance, serait atteint de la maladie du gonflement du béton appelée RAG. La conséquence de cette maladie: diminuer de moitié la vie restante de cet équipement de production important pour le Nouveau-Brunswick. Donnons une vie totale de 80 ans au barrage construit en 1968. En 2010, il a donc 42 ans et un solde de 38 ans de vie restante. En appliquant 50%, nous constatons qu’il faudra reconstruire ce barrage dans 19 ans au lieu de 38 ans, sans compté les coûts de colmatage temporaires. Ce constat diminue beaucoup la valeur marchande 2010 de ce barrage.
3e actif de qualité: il se trouve caché dans les chiffres des états financiers d’Énergie NB tels que disponibles sur internet. Le dernier bénéfice net de 2009 au 31 mars est de 70 millions $ et un coup d’oeil sur les 10 années antérieures est catastrophique. Que voulez-vous y faire, Énergie NB ne peut pas réaliser des miracles avec les équipements de production qu’elle possède. Voici la répartition en % par filière de production, chiffres de 2007: thermique (mazout, charbon): 53% nucléaire (quand ça fonctionnait) 25% hydraulique: 17% autres: 5%.
Une observation en passant: depuis que le nucléaire est en rénovation, c’est cette électricité qu’Hydro-Québec exporte vers le Nouveau-Brunswick par les 3 lignes d’interconnexion existantes, représentant 33% des besoins en électricité des néo-brunswickois. Ce 33% représente donc 4,6 TWh (milliards de kWh) selon le bloc patrimonial de 14 TWh garanti “à perpétuité” par Hydro-Québec dans la 2e Entente. Les 2 autres tiers du 14 TWh sont et seront pour plusieurs années à venir produits par les équipements polluants et désuets d’Énergie NB.
Puisque les lignes d’interconnexions existantes sont utilisées à pleine capacité, oubliez pour le moment la chanson de Jean Charest d’exporter via le Nouveau-Brunswick de l’énergie vers la Nouvelle-Angleterre. Et si cette possibilité est réelle, où sont les nouveaux contrats entre Hydro-Québec et la Nouvelle-Angleterre ? En terme de nouveaux contrats d’exportation et selon un article paru dans Le Devoir du 3 mars 2010 en page B1, on parle d’un trajet situé entre La Prairie au sud de Montréal et la ville de New York. Lorsqu’on regarde sur une carte du Québec la position du réseau de transport à 735 000 volts AC et le réseau à 450 000 volts DC, on est loin de la frontière du Nouveau-Brunswick. Il y a une forme de mirage dans les paroles de Jean Charest.
À preuve qu’un mirage en attire un autre: avez-vous entendu Jean Charest chiffrer sa promesse de rendement de 10% dès la première année, combien de millions? 10% de 1000 $ et 10% de rien, c’est toujours 10%.
Et la formule PPP dans tout ce marasme: posons-nous une question “qui tue”:
POURQUOI les milliardaires et millionnaires du Nouveau-Brunswick portant des noms comme Irving, McCain, Ganong, impliqués dans les 40 plus importantes industries du Nouveau-Brunswick n’ont pas levé la main pour faire signe au PM Shawn Graham disant: “Shawn! we got a very good news for you: we got the cash you need to revamp NB Power: we go in a partnership what Jean Charest like to say, the formula PiPiPi!” Mais cela est de la fiction. Selon une source qui préfère garder l’anonymat et connaissant bien sa province, cette personne m’a dit que la réponse au “POURQUOI” ci-dessus est: les Irving, McCain, Ganong et autres sont ceux qui recommandent à leur PM de transférer tous les risques aux québécois. La situation est trop risquée pour leurs milliards. Mais nous du Québec, nous sommes de bonnes poires et Jean Charest raffole de la salade de fruits. Québécois, le dodo z...z...z...z...z est-il terminé?
François A. Lachapelle, retraité. Montréal, 10 mars 2010


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