SOUVERAINISME

Dans l’attente d’un Québexit

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« Il importe aujourd’hui d’assumer la charge conservatrice du projet de pays. »

La semaine dernière, dans sa chronique du Journal, Antoine Robitaille se questionnait sur la sagesse, pour le mouvement indépendantiste québécois, de s’identifier au Brexit. Il se demande s’il vaudrait mieux regarder vers l’Écosse, qui désire sortir du Royaume-Uni pour demeurer dans l’Union européenne.  


Pourtant, les souverainistes québécois ont tout avantage à tirer des leçons du Brexit. Ce mouvement a non seulement réussi, contrairement au projet écossais, mais il s’est fondé sur des principes fondamentaux bien plus proches de ceux qui justifieraient un Québec pays aujourd’hui. 


Au-delà de son volet économique, l’Union européenne est une structure politique qui prive les nations de leviers essentiels à leur autodétermination et qui s’est engagée dans un processus incessant de centralisation. Elle s’agenouille devant l’autel du multiculturalisme, tout en empêchant ses États membres de décider par eux-mêmes leurs seuils d’immigration. 


La voix des nationalistes


Ainsi, le camp pro-Brexit s’est fait la voix des nationalistes opposés au « politiquement correct » et au multiculturalisme, invitant les citoyens à reprendre le contrôle sur leur avenir plutôt que d’être gouvernés par une puissance centralisatrice aux ambitions postnationales. Ce discours ne devrait pas être étranger aux nationalistes québécois, auxquels il ressemble énormément. 


Du côté de l’Écosse, le Scottish National Party joue la carte de la social-démocratie contre les conservateurs de Londres, choisissant plutôt de s’inscrire dans un courant progressiste, multiculturaliste et pro-européen. Or, quitter le Royaume-Uni sous prétexte d’autodétermination, puis se lier à nouveau les mains à Bruxelles revient à tomber de Charybde en Scylla. 


Surtout, le discours des souverainistes écossais ressemble à s’y méprendre à celui du Bloc québécois dans les années Harper, qui souhaitait dresser le bon Québec progressiste contre le vilain Canada conservateur. Non seulement cet argumentaire n’a-t-il pas ranimé la flamme indépendantiste, il a carrément fait fuir les nationalistes de centre-droit qui n’ont jamais voulu d’un pays pour plus de programmes sociaux, mais pour des raisons historiques et identitaires. 


Une inspiration


Plutôt que de se distancier du Brexit, les indépendantistes québécois ont tout avantage à s’en inspirer pour ancrer leur cause dans le contexte mondial actuel. Les Britanniques ont voté en faveur du Brexit pour contrôler leurs frontières, pour disposer de tous leurs pouvoirs et pour s’affirmer à nouveau comme nation. Ces motivations légitimes le sont tout autant au Québec. 


La victoire de la CAQ a prouvé l’appétit des Québécois pour un nationalisme d’abord identitaire avant d’être social-démocrate, et c’est précisément pourquoi il importe aujourd’hui d’assumer la charge conservatrice du projet de pays. Dans le climat politique qui est le nôtre, si une majorité vote oui à l’indépendance, ce sera pour rompre radicalement avec le multiculturalisme canadien et le conflit frontal entre ses ambitions postnationales et l’État-nation québécois. 


Loin d’être un repoussoir, le Brexit devrait servir d’inspiration pour les nationalistes et les indépendantistes québécois. 


Étienne-Alexandre Beauregard, Étudiant au baccalauréat en philosophie et science politique à l'Université Laval.


Impliqué dans le mouvement nationaliste québécois, notamment comme attaché politique à l'Assemblée nationale entre 2019 et 2020 et comme blogueur.



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