Le gouvernement Harper demandera bientôt à la Cour suprême de trancher: Ottawa peut-il créer une commission nationale des valeurs mobilières malgré le désaccord de trois provinces?
Jusqu'à ce jour, l'Alberta, le Manitoba et le Québec se sont fermement opposés à la mise sur pied d'une telle commission centralisée qui reléguerait leurs compétences aux oubliettes en matière de réglementation des marchés financiers.
Pour répondre aux critiques qui dénoncent depuis longtemps la présence de plusieurs organismes de contrôle, les provinces ont choisi de mettre sur pied un système de reconnaissance mutuelle de leurs réglementations respectives qui réduit de beaucoup les tracasseries administratives. Une seule province, l'Ontario, a refusé de souscrire à cette formule dite du «passeport» puisqu'elle revendique de recevoir la future commission nationale sur son territoire.
Ce n'est pas d'hier que les partis fédéralistes à Ottawa défendent l'idée d'une plus grande centralisation. Depuis la commission Macdonald sur l'unité économique du pays, en 1985, libéraux et conservateurs rêvent d'une centralisation de la réglementation qui irait de pair avec la centralisation des sièges sociaux, des banques, des maisons de courtage et de la bourse. Petit à petit, au fil des dernières décennies, le Canada s'est ainsi donné une toute nouvelle métropole financière exclusivement anglophone, Toronto, avec la complicité de ses représentants majoritaires à Ottawa. Le Canada est ainsi devenu le seul pays au monde dont on a déplacé la métropole économique en faisant croire qu'il s'agissait des forces du marché.
Malgré cela, le Québec tient toujours à conserver le contrôle sur les activités financières exercées sur son territoire. Mais, l'été dernier, le gouvernement Charest a mis de côté la bataille politique pour s'en remettre au jugement de la Cour d'appel. Et la semaine dernière, comme pour accélérer le mouvement, Ottawa décidait de porter la cause directement devant la Cour suprême qui, «comme la tour de Pise, penche toujours du même bord», disait Duplessis.
À cause de précédents arrêts favorables à Ottawa rendus par la plus haute cour en matière de commerce, il est fort possible que le Québec perde la bataille, même si la Constitution lui accorde pleine compétence en matière de droit civil duquel relève la réglementation des marchés. En abandonnant le combat politique au profit d'un dénouement judiciaire, le gouvernement Charest a donc pris le risque que le Québec soit amputé d'une autre partie de ses droits historiques, et que Montréal soit plus que jamais reléguée au statut de ville de province par rapport à Toronto. Cela fait très mal.
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