Hydro-Québec - Non au choc tarifaire!

En voulant mettre fin à ce prix patrimonial, le gouvernement Charest renoue avec l'arbitraire en matière de tarification.

Budget Québec 2010

Le président d'Hydro-Québec, M. Thierry Vandal, a bien raison de ne pas se prononcer sur la nouvelle obsession ministérielle d'augmenter brutalement les tarifs d'électricité. D'ailleurs, ce n'est pas non plus au gouvernement de le faire, mais à la Régie de l'énergie. De grâce, évitons de revenir à l'époque où les politiciens fixaient les tarifs en fonction de leurs échéances électorales!
Il y a dix ans, le gouvernement du Parti québécois confiait à une nouvelle Régie de l'énergie la responsabilité de décréter les tarifs d'électricité sur la base des coûts de production. En 2000, le même gouvernement modifia la loi pour empêcher la Régie de mettre son nez dans ses projets de construction. Faute de calculer les tarifs sur la base des coûts, on décida alors d'inclure dans la loi un prix plafond pour un bloc de 165 MW qualifié de «patrimonial» parce qu'il était produit dans des installations déjà construites. En voulant mettre fin à ce prix patrimonial, le gouvernement Charest renoue avec l'arbitraire en matière de tarification.
Cet arbitraire est aussi évident dans le plan stratégique défendu cette semaine en commission parlementaire. On ne construit plus selon les besoins du Québec, mais selon les priorités du premier ministre. Or, à cause des importants surplus d'électricité prévus au moins jusqu'en 2017, les Québécois doivent s'inquiéter de la décision d'investir autant que 5 milliards par année dans des projets tous azimuts, dont près de la moitié ne sont même pas encore arrêtés.
Le gouvernement Charest veut construire pour vendre aux États voisins, soit. Mais aucun contrat n'est encore signé et le risque est élevé qu'on soit forcés de vendre au rabais «au lieu de laisser l'eau couler», comme on avait l'habitude de dire il y a 20 ans. Dans un contexte de surplus d'électricité et du prix peu élevé du gaz naturel, qui acceptera de signer des contrats à long terme à plus de 12¢ le kilowattheure? L'Ontario, par exemple, vient de commander une nouvelle usine thermique à TransCanada, propriétaire de l'usine de Bécancour à qui Hydro-Québec verse 160 millions de dollars par année pour ne pas produire.
En matière de tarification, on a tort de comparer le Québec à ses voisins. Tous les gouvernements qui se sont succédé depuis quarante ans ont utilisé l'électricité pour faire du développement. C'est ce choix de société, dirait-on, qui a incité l'ensemble des acteurs à préférer ce mode d'énergie, et non le marché. Rompre brutalement ce pacte entre les élites qui ont largement profité des grands projets et les consommateurs qui ont répondu à l'appel à une époque où l'électricité coûtait souvent plus cher que le gaz et le mazout constituerait une forme de trahison.
Les défenseurs du choc tarifaire disent aimer mieux ce scénario à celui d'une augmentation du fardeau fiscal parce que ce dernier est déjà plus élevé qu'ailleurs. Beau raisonnement! Puisque les Québécois gagnent moins que les autres et paient déjà plus d'impôts, de taxes sur l'alcool, sur le pétrole et même sur l'électricité, il leur faudrait maintenant accepter de bonne grâce de perdre un de leurs rares avantages financiers?
Qu'on se comprenne bien: s'opposer à un choc tarifaire ne veut pas dire nier l'importance d'une augmentation graduelle raisonnable et justifiée du prix de cette précieuse énergie. Depuis qu'on a créé la Régie, les tarifs ont grimpé de 18 %. Le mouvement doit se poursuivre, notamment en modulant les hausses en fonction des heures de la journée. Mais demander aux consommateurs d'électricité d'être la nouvelle vache à lait de l'État sous prétexte que les New-Yorkais paient leurs kilowattheures plus cher qu'eux, cette idée tient du masochisme.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé

-->