Critique

Coup d'envoi du 400e de Québec: un ratage historique

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Québec 2008 - 400e anniversaire de la fondation du Canada?...



Près de 50 000 personnes se sont rassemblées à la place d'Youville pour assister au spectacle du 31 décembre qui donnait le coup d'envoi aux festivités du 400e anniversaire de Québec.

Québec -- Le soir du 31 décembre, près de 50 000 personnes se sont déplacées à la place d'Youville avec l'envie de donner une chance aux Fêtes de 2008. En raison du manque d'espace, la grande majorité d'entre eux n'auront presque rien vu et entendu de ce coup d'envoi supposé historique. Mais étaient-ils les plus à plaindre?
Longtemps avant le début du spectacle, le site débordait. À la limite de la bousculade, les gens tentaient tant bien que mal d'entrevoir les écrans géants installés devant le Parlement.
Les premiers arrivés étaient coincés dans une foule compacte, sans voies de sortie. Tous se posaient la même question: pourquoi ne pas avoir choisi un emplacement assez vaste pour accueillir tout le monde? Après tout, quand on invite, on s'arrange pour faire de la place...
De toute façon, le spectacle n'avait pas été conçu pour eux, mais pour la télévision. On voulait montrer le Québec «carte postale» avec en prime une belle grosse foule. Et c'est d'ailleurs une des rares réussites de cette vaste et pathétique entreprise.
Des duchesses, des squelettes et un «latin lover»
En guise d'introduction, on a vu apparaître sur les écrans une brochette de vedettes (Nicolas Ciccone, Marie Plourde, Pierre Lapointe, Véronique Cloutier, Kevin Parent...) souhaitant bonne fête à «la belle ville de Québec», comme s'il ne s'agissait que d'un simple anniversaire municipal. Le ton était donné: exit la profondeur historique de l'événement.
Puis le spectacle a commencé avec un grand «reel» interprété par les Batinses, la Bottine souriante et 200 «tapeux de pieds». Une performance qui n'avait rien d'original, mais dont le caractère énergique et festif servait bien l'occasion. Or cette entrée en matière plutôt réussie a été vite éclipsée par une déconcertante succession de numéros tous plus kitsch les uns que les autres.
Affublées de ridicules costumes de duchesses du carnaval, les chanteuses Claire Pelletier, Jessica Vigneault et Florence K sont venues gaspiller leur talent dans un insignifiant medley. Mais ce n'était rien en comparaison avec ce qui allait suivre: un rap navrant sur les «saints» des rues de Québec, interprété notamment par un ancien de Star Académie (misère!). Aucun propos, du vent, du bruit et une scandaleuse impression de vacuité. Il y a eu aussi cette déroutante chorégraphie de squelettes évoquant visiblement la «fête des morts» au Mexique (cherchez le rapport, le Sommet des Amériques peut-être?).
Autre idée pour le moins étrange, on nous balance l'humoriste Stéphane Rousseau dans un personnage convenu de «latin lover» roucoulant sur les belles femmes de Québec qu'il compte cueillir dans les chambres d'hôtel (misère, bis!). Et que dire de ces cow-boys sexy qui dansaient la salsa avec des demoiselles au look mariant Folies Bergères et coureurs des bois? Une belle revue de casino ratée.
Seul Bruno Pelletier a vu sa voix mise en valeur dans une nouvelle chanson sur Québec dont le texte ne passera pas à l'histoire. À la télévision, les images des Violons du Roy en arrière-plan impressionnaient. Or leur rôle s'est malheureusement limité à celui de fond musical.
Et tout au long du spectacle, cette impression d'enthousiasme forcé, de sourires gelés face à une foule perplexe et mal à l'aise. Et ce, sans animation, sans propos et avec pour seul fil conducteur l'omniprésence de clichés sur la ville de Québec.
Au lendemain du grand décompte, dans les rues de Québec comme sur les blogues, les gens affichaient une sorte d'incompréhension teintée de honte. Quel gaspillage! Quarante-cinq petites minutes à remplir, un an de travail, près de trois millions de dollars de fonds publics et on nous a servi ça.
Parce qu'il est le capitaine du navire, une bonne part de la responsabilité de ce ratage incombe au metteur en scène Denis Bouchard. On est en droit de se demander pourquoi la Société du 400e lui a confié la direction artistique de ce spectacle, certes rodé techniquement, mais au contenu faible et bâclé? À la décharge du maître d'oeuvre, comment les patrons du 400e ont-ils pu donner le feu vert à une proposition artistique aussi pitoyable?
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Isabelle Porter, Patrick Caux
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