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Cocktails de financement: la commissaire admet son impuissance

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L'exceptionnalisme libéral a la vie dure

Les cocktails de financement sélect du Parti libéral du Canada commencent à faire des vagues. Les autorités fédérales ont reconnu jeudi avoir ouvert une enquête. Mais pour l’instant, ce sont les contributeurs à ces cocktails dont le comportement est scruté, pas les ministres y ayant assisté. Car la commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique reconnaît son impuissance à intervenir.

Depuis quelques jours, le gouvernement de Justin Trudeau est sur la sellette à cause de trois activités de financement du PLC donnant l’impression qu’il est possible d’acheter un accès aux décideurs. D’abord, le ministre des Finances Bill Morneau a assisté le 13 octobre dernier, à Halifax, à un cocktail privé auquel 15 personnes d’affaires ont pu assister moyennant 1500 $. Ensuite, M. Trudeau devait assister à un cocktail à 1500 $ le 29 septembre dernier, mais l’événement a été annulé à cause d’un voyage imprévu du premier ministre en Israël. Enfin, M. Morneau doit participer, le 7 novembre prochain à Toronto, à un cocktail dont les billets à 500 $ sont notamment vendus par le p.-d.g. de la pharmaceutique Apotex, qui fait officiellement du lobby auprès du ministère des Finances.

Jeudi, la commissaire au lobbying du Canada, Karen Shepherd, a apporté de l’eau au moulin en révélant qu’elle se penchait sur la question. « C’est quelque chose que je considère être sérieux […]. Il s’agit d’une situation qui crée potentiellement un conflit d’intérêts réel ou apparent, et c’est pourquoi je regarde cela de près », a-t-elle dit en comité parlementaire. Mme Shepherd a refusé de dire sur quel cas elle se penchait, mais chose certaine, ce sont les lobbyistes qui sont visés. « Je regarde ces choses du point de vue du lobbying », a-t-elle rappelé.

Des règles sans dents


Or, de son côté, la commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique admet ne pas avoir le mandat de scruter le comportement des politiciens dans toute cette histoire. « Il n’existe pas de code couvrant les activités politiques », a rappelé Mary Dawson, qui comparaissait juste après Mme Shepherd. « La Loi que j’applique se limite à régir les intérêts privés [des élus], ce qui bien souvent veut dire les intérêts financiers. »

Mme Dawson se désole de cette limite. Les histoires révélées ces derniers jours par les médias lui paraissent « peu reluisantes ». « Quelqu’un est en droit de se demander si les gens obtiennent un accès privilégié. Et je n’ai pas le mandat de faire enquête. […] Le mot “ éthique ” se trouve dans mon titre, mais c’est un mot qui ne se retrouve nulle part dans la loi que j’applique. C’est plutôt étrange. » Selon Mme Dawson, « les activités politiques doivent être scrutées de manière séparée. […] J’estime qu’il doit y avoir des règles ».

Il existe bien le document « Pour un gouvernement ouvert et responsable », quistipule qu’« il ne doit y avoir aucun accès préférentiel au gouvernement, ou apparence d’accès préférentiel, accordé à des particuliers ou à des organismes en raison de contributions financières ». Mais aucune entité indépendante ne veille à l’appliquer.

Au député conservateur qui s’en désolait, Mme Dawson a rappelé que cette règle a été mise en place par… Stephen Harper en 2010. Elle n’avait pas plus de mordant. Elle n’a qu’été mise à jour par les libéraux.

À Québec, le commissaire à l’éthique et à la déontologie, Jacques Saint-Laurent, reconnaît que son mandat est limité de manière similaire. « On a effectivement les mêmes critères », a-t-il indiqué au Devoir. Toutefois, le commissaire souligne que le Code qu’il administre stipule que la « conduite du député est empreinte de bienveillance, de droiture, de convenance, de sagesse, d’honnêteté, de sincérité et de justice ». Une déclaration suffisamment large pour lui permettre de prodiguer des conseils.
> Lire la suite de l'article sur Le Devoir


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