La cour assidue qu’a livrée depuis de nombreux mois au maire Denis Coderre le chef de l’opposition à l’Hôtel de ville de Montréal et chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, vient donc de lui valoir une place au comité exécutif. Malheureusement cette situation de conflit d’intérêts a fait en sorte qu’il n’a pas rempli de façon satisfaisante le rôle de principal chien de garde de l’administration que les électeurs lui avaient confié en novembre 2013. «Il a baissé la garde sur un paquet d’enjeux», estime son successeur, Luc Ferrandez, qui lui reproche également d’avoir «poussé trop loin» ses éloges à l’égard du travail accompli par le maire qu’il voit comme un de ses amis.
Comme sous l’administration de l’ex-maire Gérald Tremblay, c’est à titre d’expert en transport urbain que Bergeron entre au comité exécutif. Son premier mandat consistera à prendre les moyens pour accélérer l’implantation d’un système léger sur rail (SLR) sur le pont Champlain et au centre-ville de Montréal de telle façon que ce dernier soit mis en service simultanément au nouveau pont en décembre 1918. En 2009, Bergeron s’était vu confier le dossier de l’échangeur Turcot mais, lâché par le maire qui avait capitulé devant le gouvernement Charest, il n’avait pu le mener à bien. Qu’arrivera-t-il cette fois-ci ? Le maire Coderre, qui n’est pas reconnu comme un grand défenseur de ce mode de transport, le soutiendra-t-il jusqu’au bout malgré les obstacles ?
Mais le nouveau chef de l’opposition croit que Bergeron est prêt à «avaler plusieurs couleuvres» pour arriver à ses fins, soit le SLR et le recouvrement de l’autoroute Ville-Marie. Persuadé qu’il va «mettre beaucoup d’eau dans son vin » Ferrandez l’avertit toutefois que la ligne de démarcation est la réforme des budgets d’arrondissements proposé par l’administration à laquelle il s’oppose vigoureusement en tant que maire de l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal appuyé d’ailleurs par de nombreux autres élus.
Projet Montréal doit revenir aux sources
En 2004, Projet Montréal a été fondé sur des principes de développement urbain durable et de réformes démocratiques autant sous l’aspect de la participation citoyenne que de la représentation électorale. Sa plateforme électorale de 2005, qui proposait des réformes institutionnelles et des mesures de planification urbaine, en témoignait éloquemment. Dans la plateforme électorale de 2013 on a toutefois observé des reculs importants. Tel que l’a noté Jonathan Durand-Folco sur son site Ekopolitica, les deux principaux reculs renvoient à la marginalisation de la question sociale et de la démocratie participative au profit de la gouvernance et de l’économie verte. Exit notamment des réformes importantes comme l’instauration d’un mode de scrutin proportionnel, la création de conseils de quartiers et l’implantation de budgets participatifs au niveau des arrondissements comme de la ville. Dans la mouture de 2013, conçue par la colistière de Bergeron, Janine Krieber (conjointe de l’ex-chef libéral Stéphane Dion) on se concentre plutôt sur la révision de la gouvernance de Montréal et des arrondissements et sur le principe du gouvernement ouvert (accès numérique aux données de la ville).
Suite au départ de son fondateur, qui était devenu un boulet sous bien des aspects, il est urgent que Projet Montréal donne un coup de barre significatif pour redevenir le parti progressiste qu’il était lors de sa fondation. Sinon il deviendra impératif qu’une nouvelle vague de militant.e.s de gauche lance un parti municipal véritablement progressiste et solidaire.
Paul Cliche, membre fondateur de Projet Montréal et ex-conseiller municipal du RCM
Montréal, 24 novembre 2014
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