Chrétien et Pelletier innocentés

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Devant les barreaux malgré les graffitis-commandites et fraudes organisées qu'ils auraient dû empêcher...

Jean Chrétien et Jean Pelletier. (Photos PC)

Les jugements rendus jeudi par le juge Max Teitelbaum, de la Cour fédérale, revêtent évidemment une grande importance pour l'ancien premier ministre Jean Chrétien et son chef de cabinet de l'époque, Jean Pelletier. Mais ils sont aussi très importants pour les citoyens touchés par une enquête publique et pour les responsables des politiques dont les décisions peuvent être influencées par les conclusions et les recommandations de telles enquêtes.

MM. Chrétien et Pelletier s'adressent aux tribunaux depuis deux ans et demi dans l'espoir d'obtenir réparation pour les conclusions injustes et erronées concernant leur rôle et leur responsabilité dans l'affaire des commandites. Tout en affirmant que les deux hommes n'avaient pas personnellement commis d'actes répréhensibles, le commissaire Gomery avait conclu qu'ils devaient être tenus responsables de la mauvaise gestion du programme des commandites parce que le premier ministre aurait demandé à M. Pelletier de diriger ce programme à partir du Bureau du premier ministre. Le tribunal a écarté ces conclusions factuelles sans fondement, ordonnant que "les conclusions qui figurent dans le rapport ... et qui ont trait au demandeur(s) (MM. Chrétien et Pelletier) sont infirmées".
MM. Chrétien et Pelletier ont été complètement innocentés. Leur réputation n'a pas été souillée par le blâme d'une commission d'enquête. M. le juge Teitelbaum a conclu qu'ils devaient être innocentés à cause des commentaires injustes, accusateurs et non étayés, formulés par M. Gomery et son porte-parole durant les audiences et après, de même qu'en raison de la "préoccupation à l'égard des médias" manifestée par le commissaire. Le tribunal conclut:
"La nature des commentaires faits aux médias est telle qu'aucune personne raisonnable ... ne pourrait conclure que le commissaire trancherait les questions en litige de manière équitable."
Le commissaire doit, d'abord et avant tout, déterminer les faits - découvrir ce qui s'est passé pour satisfaire l'intérêt public et prendre de sages décisions dans le but d'éviter des problèmes à l'avenir. Les juges, et les commissaires, peuvent commettre et commettent effectivement des erreurs. Nous connaissons tous des situations où les tribunaux ont, dans des causes importantes, erronément conclu à la culpabilité d'un innocent. Un enquêteur qui a des idées préconçues quant à la nature des faits - avant même d'avoir examiné la preuve - aura tendance à interpréter les informations qui lui sont soumises de manière à appuyer ses conclusions initiales.
Une telle attitude comporte de graves dangers, tant pour les personnes concernées que pour le pays. Les individus entraînés dans la tourmente d'une enquête publique sont à la merci du commissaire. Une réputation, qui est pour plusieurs leur attribut le plus précieux, risque d'être entachée à vie par une conclusion de blâme. Parfois, pour tirer pleinement profit d'une enquête publique, il faudra identifier des coupables. Mais personne ne devrait avoir à payer ce prix quand sa conduite - comme celle de MM. Chrétien et Pelletier - a été irréprochable. Et toute politique fondée sur des erreurs factuelles sera malavisée.
Le jugement du juge Teitelbaum constitue une mise en garde contre les ravages que peuvent entraîner des commissions d'enquête qui perdent de vue leur objectif initial. Si les futurs commissaires tiennent compte des avertissements de la Cour fédérale - éviter les médias, ne pas révéler leurs impressions et conclusions avant la fin des travaux, laisser leur rapport parler de lui-même - nous ne nous en porterons que mieux.
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Peter K. Doody
L'auteur est associé du cabinet Borden Ladner Gervais LLP et est un des avocats de l'ancien premier ministre Jean Chrétien.


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