Contrairement à ce qu'un témoin avait affirmé devant la commission Charbonneau, la fameuse fête chez les Catania à laquelle ont assisté Michel Bissonnet et plusieurs acteurs montréalais de la collusion a eu lieu alors que la proximité de l'entreprise avec la mafia avait déjà été étalée dans les médias.
La Presse révélait jeudi que l'homme fort de l'Équipe Coderre dans Saint-Léonard, le maire d'arrondissement Michel Bissonnet, s'est rendu chez les Catania à Piedmont, pour célébrer le 40e anniversaire de la conjointe de Paolo Catania. Des proches de la mafia et des acteurs montrés du doigt dans le scandale de la collusion à Montréal étaient aussi de la fête, dont des ingénieurs qui allaient plus tard reconnaître avoir été corrompus. La chanteuse américaine Gloria Gaynor, (I will survive) y était aussi pour offrir une prestation aux convives.
M. Bissonnet était arrivé aux côtés de Bernard Trépanier, alias «Monsieur 3%», le grand argentier d'Union Montréal qui allait être arrêté plus tard en même temps que Paolo Catania dans une opération de l'Unité permanente anticorruption.
Jusqu'ici, le témoignage d'un convive à la commission Charbonneau avait situé l'événement «entre 2004 et 2006». À cette époque, les liens étroits qui unissaient Construction Frank Catania à la mafia n'avaient pas été dévoilés publiquement.
Denis Coderre a d'ailleurs relevé la chose en réitérant son appui à Michel Bissonnet mercredi soir. «De toute façon, à l'époque, ces gens n'étaient pas accusés», a-t-il déclaré.
Mais hier, La Presse a pu confirmer de source sûre que la fête a plutôt eu lieu en octobre 2008. M. Bissonnet venait tout juste d'être élu maire de Saint-Léonard lors d'une partielle.
Un mois plus tôt, en septembre, La Presse avait révélé que le nom de Frank Catania, père de Paulo, et fondateur de Construction Frank Catania et associés, figurait dans le résumé de la preuve de l'opération Colisée de la GRC.
On découvrait que celui-ci avait été filmé au QG de la mafia avec le patriarche Nicolo Rizzuto pendant que celui-ci cachait une liasse d'argent dans ses chaussettes. Les cinq dirigeants du crime organisé italien s'étaient par ailleurs cotisés pour offrir un cadeau à M. Catania pour sa fête de départ à la retraite. Fête à laquelle avait aussi assisté Michel Bissonnet.
La nouvelle avait énormément fait jaser dans le monde municipal et au sein de l'industrie de la construction, étant donné l'importance de l'entreprise des Catania. Selon nos sources, des personnalités invitées à Piedmont le mois suivant ont d'ailleurs décliné l'offre pour ne pas être associées de trop près à la famille, mais Michel Bissonnet, qui dit connaître les Catania depuis des décennies, avait choisi de s'y rendre quand même.
Réactions des candidats à la mairie
«Soyons honnêtes: c'est un événement arrivé en 2004-2006, il [M. Bissonnet] était député et président de l'Assemblée nationale, il va à une fête. Là, on apprend des choses avec la commission Charbonneau. S'il y a des enquêtes policières, on réagit. On ne peut pas continuellement définir ce qui se passe il y a sept ans avec les yeux de 2013. À autre époque, [...] autre façon de faire. Aujourd'hui, c'est tolérance zéro. Avec ce qu'on sait de la commission Charbonneau, s'il y avait un événement actuellement, c'est sûr qu'on n'aurait pas la même réaction.»
- Denis Coderre, chef de l'Équipe Denis Coderre, lors d'une entrevue au 98,5 FM
«M. Bissonnet n'a clairement pas la crédibilité pour s'attaquer à l'enjeu de corruption. Dans les circonstances, le filtre Coderre doit s'appliquer. M. Coderre démontre qu'il n'y a pas la crédibilité pour s'attaquer à la corruption. Il est allé chercher des anciens d'Union Montréal, dont M. Bissonnet, ainsi que leur organisation et leur entourage.»
- Mélanie Joly, chef de Vrai changement pour Montréal
«Ça confirme ce dont on se doutait et ce qu'on disait depuis un certain temps sur l'entourage de M. Coderre.»
- Marcel Côté, chef de Coalition Montréal
«Je connais M. Bissonnet depuis huit ans. C'est un personnage coloré, très agréable à côtoyer. Mais il est de Saint-Léonard, de la tradition de Saint-Léonard. Frank Zampino était son dauphin. C'est une proximité avec... Je ne l'accuse de rien. Il a un très long passé politique, il a fait sa vie en politique.»
- Richard Bergeron, chef de Projet Montréal
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