Au secours d’Anticosti

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Michel David met le doigt dans les divisions au PQ

On ne peut que donner raison aux partis d’opposition : à force de réitérer ses objections à l’exploitation des hydrocarbures de l’île Anticosti, le premier ministre Couillard expose son gouvernement à des poursuites judiciaires.

Le premier coup de semonce, à l’occasion de la conférence de Paris sur les changements climatiques, pouvait à la rigueur être attribué aux circonstances dans lesquelles il se trouvait, comme le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Arcand, avait préféré le croire.

Le problème est que M. Couillard va maintenant beaucoup plus loin. Non seulement il ne tolérera aucune « agression sauvage » contre ce joyau de notre patrimoine naturel, mais il intime aux fonctionnaires du ministère de l’Environnement de tenir compte de ses objections lorsqu’il faudra décider d’autoriser ou non les forages par fracturation.

Là encore, M. Arcand a beau assurer que « le certificat d’autorisation est tout à fait indépendant de la question politique », les fonctionnaires qui avaient été blâmés pour avoir autorisé TransCanada à forer dans une pouponnière de bélugas vont certainement y penser à deux fois avant d’aller à l’encontre des directives du premier ministre. Il y a bel et bien ingérence dans un processus qui devrait en principe être objectif.

Si l’étude hydrogéologique qui conditionne l’entente entre le gouvernement et ses partenaires privés évoque le moindre risque, comme elle le fera très certainement, on peut être sûr qu’il sera monté en épingle. Et si les forages sont interdits, ces entreprises pourront légitimement plaider la rupture de contrat, s’adresser aux tribunaux et réclamer un dédommagement.

Cela est trop évident pour que M. Couillard n’en soit pas conscient. Sa promptitude à manifester son aversion pour la fracturation à la moindre occasion ressemble même à une provocation délibérée, comme s’il souhaitait une confrontation.

Dans la lettre qu’il a publiée mercredi dans Le Devoir, l’économiste Pierre Fortin disait souhaiter que le gouvernement se montre aussi clair et ferme dans sa détermination à défendre le français qu’à protéger les cerfs de l’île Anticosti. On peut se demander s’il ne cherche pas plutôt à compenser sa tiédeur sur les questions identitaires par un souci accru pour l’environnement.

La CAQ a pris plaisir à évoquer le voyage de pêche au saumon que le premier ministre aurait effectué à Anticosti en compagnie de son ami Arthur Porter. On peut trouver cette compagnie douteuse, mais cela n’autorise pas à attribuer à l’égoïsme son désir de préserver cet écosystème unique. La coïncidence de cette préoccupation pour l’environnement avec son intérêt politique n’a cependant pas dû lui échapper. En cas de bras de fer avec les pétrolières, il y a tout lieu de croire que la population se rangera derrière lui.

La CAQ n’a jamais douté de la nécessité d’exploiter les hydrocarbures. « On a besoin de créer de la richesse » pour financer les services publics, a réitéré son chef, évoquant les 9,5 milliards de dollars que le Québec reçoit annuellement au titre de la péréquation et les 10 milliards de dollars de pétrole qu’il doit importer. Cet argument est cependant très affaibli par les perspectives de rentabilité plus qu’aléatoires à Anticosti, conjuguées avec la chute du prix du pétrole.

C’est néanmoins le PQ que ce débat risque d’embarrasser le plus. « Ce parti qui a abandonné l’environnement », a lancé le premier ministre. En accusant le gouvernement de vouloir renier sa signature, Pierre Karl Péladeau prend de facto le parti des pétrolières, ce qui ne peut que créer un autre malaise au sein du parti.

Elle est bien loin l’époque où Pauline Marois, revenue enthousiasmée d’un voyage en Norvège, voyait dans le pétrole la clé qui ouvrirait la porte de l’indépendance, en rassurant la population sur la viabilité d’un Québec souverain. D’où l’entente intervenue avec Junex et Pétrolia, que M. Couillard qualifie aujourd’hui d’« erreur impardonnable ».

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