LE SCAN POLITIQUE - Vivement opposés au traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, adopté le 23 juillet par l’Assemblée nationale, des syndicats d’agriculteurs s’en sont pris aux permanences de députés. Ce lundi, le local de Carole Bureau-Bernard a été recouvert de paille et d’oeufs.
«Elle nous a menti, elle nous a trahis». Pour les députés de La République en marche, le retour en circonscription a pu être délicat après l’adoption le 23 juillet du Ceta, le traité controversé de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada. Persuadés qu’il provoquera une concurrence déloyale, les agriculteurs sont vent debout contre le texte. Et certains l’ont fait savoir. Dans le Lot-et-Garonne, les syndicats de la FDSEA et des Jeunes Agriculteurs ont déversé, tôt vendredi matin, du fumier devant les permanences des trois députés LREM du département: Michel Lauzzana, Alexandre Freschi et Olivier Damaisin. Ce dernier n’a pourtant pas pris part au scrutin. «“JA” + “FDSEA 47” tenaient simplement à rappeler aux députés lot-et-garonnais qu’au-delà d’un vote de groupe et d’une majorité, ils sont élus dans le but de défendre leurs territoires et donc leurs agriculteurs... En ratifiant le Ceta, c’est tout un pan de l’économie lot-et-garonnaise qui est mis à mal!», se sont insurgés les deux syndicats dans un communiqué commun.
Une permanence murée
Une vingtaine d’agriculteurs de Haute-Saône s’en sont aussi pris, jeudi soir, à la permanence de la députée macroniste Barbara Bessot-Ballot, à Vesoul. La FDSEA, les Jeunes Agriculteurs du département ainsi que les producteurs de lait (FDPL) ont monté et cimenté un mur d’environ 2,5 mètres de haut. Avec de la peinture rouge, ils ont ensuite inscrit un message à destination de l’élue: «BBB (initiales de la députée, ndlr), les agriculteurs vous remercient». Barbara Bessot-Ballot a reçu plusieurs messages de députés LREM sur Twitter. «Tout mon soutien chère Barbara Bessot-Ballot. Ces intimidations n’ont pas leur place dans notre démocratie. Elles ne nous feront jamais plier», a notamment affirmé Stanislas Guerini, député de Paris et patron de La République en marche.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, le député-agriculteur LREM de Gironde, Pascal Lavergne, a lui aussi subi les actions des Jeunes Agriculteurs. Ses bottes de paille et ses round-ballers ont été tagués. «Menteur. Trahison. Tu oublies d’où tu viens», pouvait-on notamment lire en rouge. Le député a porté plainte. «Sur le fond, on peut discuter. Mais sur la forme, je n’accepte pas ces méthodes. Je veux savoir quels sont ceux qui ont fait ça et je veux parler avec eux», a expliqué Pascal Lavergne à la gendarmerie, selon des propos rapportés par Sud Ouest.
Vendredi après-midi, d’autres membres des Jeunes Agriculteurs de la Creuse ont également muré la permanence du député Jean-Baptiste Moreau. Un autre élu agriculteur qui a voté pour le Ceta. Sur Twitter, il s’est dit «outré par la bêtise de ce type d’action», assurant que «la défense de l’agriculture est à la base de son engagement politique. (...) Si j’avais le moindre doute sur le fait que le Ceta met en danger mes collègues éleveurs, j’aurais été le premier à voter contre!», a-t-il martelé.
Ce lundi, c’est à Noyon, dans l’Oise, qu’une nouvelle permanence a été vandalisée. La députée de la majorité Carole Bureau-Bonnard a vu son local recouvert de paille, et des œufs ont été jetés sur la façade. L’acte a, une nouvelle fois, été revendiqué par les Jeunes Agriculteurs. «Notre but prinicpal c’était de se faire entendre, pas de saccager, dégrader, ce n’est pas du tout notre but», a détaillé à BFMTV Claire Josselin, membre des Jeunes Agriculteurs. La parlementaire, quant à elle, parle «d’attaque contre la démocratie».
Dans un communiqué, le groupe LREM a «condamné les dégradations» et a réclamé «aux responsables nationaux» des syndicats impliqués «de condamner publiquement ces actes inacceptables et de prendre toutes les mesures qui permettront d’y mettre fin immédiatement».
Ces actes de vandalisme interviennent quelques mois seulement après les violences de certains «gilets jaunes» contre des permanences parlementaires. Selon un décompte réalisé par Le Figaro, plus d’un député sur dix en avait été victime.