La ministre de la Justice Stéphanie Vallée doit être soulagée de quitter la politique. Elle a fait son dernier tour de piste en rendant publiques mercredi les directives sur les accommodements raisonnables. Des directives tirées par les cheveux.
La conception libérale refuse le concept de laïcité au profit de celui de neutralité. La question irrite au plus haut point le premier ministre Couillard, qui s’accommodera raisonnablement de sa politique du cas par cas.
En clair, la ministre balaie dans la cour des villes, des établissements de santé, des réseaux de transport, des commissions scolaires, des ministères et des organismes publics, cette patate chaude qu’est le cas par cas.
Sincérité des croyances
Avec ces directives, une chatte y perd ses petits. Une femme veut porter la burqa pour recevoir des services de la Société d’assurance automobile du Québec ? La ministre affirme que l’employé qui fait face à ce cas de figure en référera à un « répondant », qui s’assurera du sérieux de la demande. Autrement dit, il se méfiera si la demande est faite le 1er avril ou le jour de l’Halloween. De plus, ce désir d’être couverte de la tête aux pieds doit être fondé sur une croyance sincère et se conformer à une pratique religieuse.
Le hic, c’est de percevoir la sincérité de cette croyance. Une croyance par définition est-elle sincère ? Et comment définir la sincérité ? Les suprémacistes blancs ne sont-ils pas sincères ? Les antisémites, très nombreux parmi les musulmans, précisons-le, croient toujours au complot juif. Sincèrement, peut-on ajouter.
L’accommodement doit, selon les directives de la ministre Vallée, respecter l’égalité entre les hommes et les femmes. L’on comprend ainsi que la charia ne peut pas se substituer aux tribunaux pour prononcer des divorces entre musulmans. C’est bien ce qui a failli se faire en Ontario il y a quelques années, alors qu’un comité formé entre autres de l’ancienne ministre ontarienne de la Condition féminine avait proposé cet « accommodement raisonnable » à une demande précise d’imams.
Vire-capot
Le gouvernement libéral du Québec n’a jamais souhaité appliquer les recommandations de la Commission Bouchard-Taylor. Charles Taylor vire-capot ne croit plus (y croyait-il sincèrement alors ?) à l’interdiction de porter les signes religieux pour les représentants de l’État, tels les juges et les policiers.
Les accommodements raisonnables existent depuis longtemps. Ils soulèvent peu de réactions lorsqu’ils portent sur des demandes pour faciliter la mobilité des personnes handicapées physiquement, par exemple. Ce sont les accommodements religieux qui posent problème. En particulier, lorsque ces demandes sont le fait de fondamentalistes qui les transforment en revendications politiques.
Les Québécois en majorité ne sont ni dupes ni intolérants. Ils réagissent simplement à des revendications qui contreviennent aux acquis de la décléricalisation de la société, qu’ils ont appelée de leurs vœux. Ils sont choqués d’être ramenés des décennies en arrière, au temps du catholicisme étatique.
Les Québécois sont prisonniers des chartes qui les régissent. La Cour suprême dans sa suprématie tranchera toujours en ces matières qui les inquiètent légitimement. Car il en va de leur identité.