«À nous la rue!»

2000 étudiants manifestent au centre-ville de Montréal dans une ambiance festive

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Grève étudiante - novembre 2007

58 000 étudiants réunis au sein de 38 associations étudiantes étaient en grève hier, et plusieurs d'entre eux le seront également aujourd'hui.
Photo: Jacques Nadeau
«À nous la rue!», ont scandé quelque 2000 étudiants au centre-ville de Montréal hier sous l'oeil amusé ou curieux des Montréalais bloqués dans la circulation ou le nez collé contre la fenêtre d'un commerce. La manifestation s'est déroulée dans une ambiance festive, sans collision majeure avec les forces de l'ordre.
Les étudiants, dont près de la moitié avaient passé plusieurs heures à bord d'autobus jaunes pour venir marcher sous la pluie, manifestaient certes contre la hausse de 30 % en cinq ans des droits de scolarité. La liste des revendications s'allongeait cependant au-delà de ce principe: gratuité scolaire à tous les niveaux d'enseignement, réinvestissement massif dans l'éducation «libre de l'emprise du privé», services de garde pour les parents étudiants, abolition de la loi 43 qui interdit les moyens de pression des employés du secteur public, mise au rancart du plan de redressement à l'Université du Québec à Montréal...
La «répression policière» était également décriée par les grévistes, qui dénonçaient les interventions policières survenues plus tôt cette semaine au cégep du Vieux-Montréal et à l'UQAM. Cela n'a pas empêché les organisateurs d'inviter les grévistes à participer à un autre bed-in en soirée à l'UQAM, ouvrant la porte à un autre affrontement avec l'administration et, incidemment, avec les policiers. Toutefois, au moment de mettre sous presse hier soir, des étudiants étaient toujours réunis en conseil de grève à l'UQAM pour débattre de la pertinence de cette action.
L'Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE), qui avait en vain tenté de déclencher une grève générale illimitée cet automne, se réjouissait de la mobilisation d'hier, y voyant un pas de plus dans une «escalade des moyens de pression». Quelque 58 000 étudiants réunis au sein de 38 associations étudiantes étaient en grève hier, et plusieurs d'entre eux le seront également aujourd'hui.
«Le "momentum" va continuer. La session prochaine, nous devons le crier haut et fort, nous allons aller vers la grève générale illimitée. [...] Ç'a été une belle manifestation, il y a une belle énergie dans l'air. Cette énergie va se répandre à travers le Québec!», a tonné un des porte-parole, Christian Pépin, au terme de la manifestation, invitant à un nouveau rendez-vous pour une activité de perturbation à caractère économique ce matin.Si l'atmosphère était à la contestation pacifique, des étudiants s'avouaient néanmoins inquiets de la perception de leur mouvement par la population en général. Tout au long de la semaine, les médias ont fait état des violentes altercations entre les policiers et les grévistes. «Faites-nous un bon article, on n'est pas tous des vandales», a lancé au Devoir Peio, étudiant en art, caché sous une gigantesque marionnette représentant le futur recteur de l'UQAM, Claude Corbo. Peio avait passé les 24 dernières heures à réaliser son effigie de M. Corbo, «reconnu pour ses méthodes sévères» lorsqu'il était recteur dans les années 80, selon l'étudiant. «Le message qu'on veut lancer, c'est qu'on ne doit pas laisser l'éducation dans les mains des bureaucrates», a expliqué le jeune artiste.
Tout au long de la marche, des étudiants s'affairaient à sensibiliser les passants. Un commando de clowns, baptisé le BROUHAHA, pour «Bataillon révolutionnaire des olibrius utopistes hérétiques activistes hilares anticapitalistes», engageait systématiquement la conversation avec les badauds. «En se déguisant en clowns, ça aide à désamorcer des situations, c'est une bonne façon de parler aux gens sans qu'ils se sentent agressés», a expliqué le clown Grego, de l'UQAM.
Étudiante en anthropologie à l'Université de Montréal, Coralie distribuait des roses aux employés des commerces dans l'espoir d'adoucir un peu l'image des grévistes aux yeux du grand public. «Il y a beaucoup de gens qui, secrètement, pensent comme nous», croit la jeune femme. Elle dit comprendre la colère de certains de ses camarades étudiants qui ont eu maille à partir avec les forces de l'ordre: «Je suis contre la violence, mais il est légitime d'être en colère. Plus on réprime les gens, plus la colère devient forte.»
Dans la foule, les slogans classiques à propos de l'endettement étudiant et de la gratuité scolaire côtoyaient d'autres citations un peu plus réfléchies, notamment des phrases de Gaston Miron («Le monde est agrandi de nos espoirs et de nos paroles»), de Victor Hugo («Ouvrez une école, vous fermerez une prison») et d'Hubert Aquin («Je suis le symbole fracturé de la révolution du Québec»).
Une autre manifestation nationale est prévue le 22 novembre, cette fois-ci sous l'égide de la Coalition des forces étudiantes nationales, qui réunit des associations membres des fédérations étudiantes collégiale et universitaire (FECQ et FEUQ). La plupart des associations étudiantes de l'UQAM se prononceront lundi sur la poursuite ou non de leur grève. L'ASSE tiendra quant à elle un congrès le 2 décembre afin de définir son plan d'action pour l'hiver, qui pourrait bien comprendre une campagne de grève générale illimitée.
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