25 ans sans s’enrichir

Pratte&Dubuc préparent le terrain pour l'indépendance: le Québec s'appauvrit DANS la fédération canadian...


En 25 ans, les travailleurs canadiens ont fait du sur-place. Leurs gains réels sont passés de 41 348$ à 41 401$. Un beau 53$ de plus en un quart de siècle! Pendant ce temps-là, les revenus de ceux qui sont au haut de l’échelle grimpaient de 16,4%, tandis qu’au bas de l’échelle, ils baissaient de 20,6%.

Il est évident qu’il y a là un énorme problème. Si les gens travaillent fort, si on multiplie les gestes pour que l’économie progresse, c’est pour que nous puissions améliorer notre sort et retirer les fruits de la croissance. Ça n’a pas été le cas. Et le modèle économique que révèlent ces données du recensement de Statistique Canada n’est pas soutenable.
Le premier réflexe, ce sera de retourner à la bonne vieille grille d’analyse. Et de conclure que le Canada a créé de la richesse, mais que l’accroissement de l’écart des revenus entre les plus riches et les plus pauvres montre que l’on fait face à un problème de redistribution de cette richesse.
Ce n’est pas ce que ces chiffres permettent de conclure. La stagnation des revenus du plus grand nombre montre que nous sommes d’abord et avant tout confrontés au fait que la création de richesse est insuffisante au Canada. Ensuite, elle se crée de façon très inégale entre les régions et les secteurs économiques, tant et si bien qu’on se retrouve avec une économie à plusieurs vitesses, avec des îlots de prospérité et des poches d’exclusion.
Ce qui explique l’immobilité des salaires, c’est que, depuis 25 ans, le Canada a perdu du terrain par rapport à ses partenaires. Ce n’est plus une des sociétés les plus prospères; l’écart de niveau de vie avec les États-Unis s’est creusé, l’investissement y est insuffisant, et surtout, la hausse de sa productivité est l’une des plus faibles du monde industrialisé. Des problèmes masqués par un taux de croissance élevé qui tient largement au pétrole et aux ressources.
L’évolution des gains des Canadiens suit d’ailleurs l’évolution de l’économie. La stagnation des revenus sur 25 ans masque un cycle plus complexe. Une période d’appauvrissement entre 1980 et 1990, après la dure récession que nous avons connue. Du sur-place entre 1990 et 2000, et une reprise, modeste, de 2,4%, entre 2000 et 2005.
Cela masque aussi d’importantes variations régionales, qui montrent que, quand ça va bien, cela se reflète dans les revenus. Entre 2000 et 2005, les gains des gens qui travaillent en Alberta ont augmenté de 7,8%, de 6,4% en Saskatchewan, de 3,7% à Terre-Neuve. Par contre, ils ont plafonné en Ontario, avec une hausse de 0,7%, et ils ont baissé de 0,3% au Québec.
Par ailleurs, les gens ont réussi à maintenir et à améliorer leur niveau de vie en compensant la stagnation des salaires par l’apport d’un second revenu. C’est ainsi que le revenu des couples a augmenté de 14,5% en 25 ans.
Les données du recensement aident aussi à comprendre pourquoi les revenus de la tranche supérieure, les 20% les mieux rémunérés, ont pu progresser. Cela tient largement à l’augmentation du nombre de ceux qui touchent plus de 100 000$ et plus de 150 000 $. Un phénomène qui se concentre dans certaines provinces, l’Ontario et l’Alberta, et dans certains secteurs, le pétrole et la finance. Et c’est ainsi que certaines professions, spécialistes financiers, avocats, comptables, ingénieurs spécialisés, géophysiciens, ont profité d’une économie qui roulait à pleine vitesse.
Pendant que le gros des travailleurs vivait à un tout autre rythme, par exemple les cols bleus et les travailleurs spécialisés qui ont souffert du déclin de l’industrie manufacturière, les nombreux employés des secteurs public et parapublic qui vivent depuis des décennies un régime de gel salarial. Et qu’au bas de l’échelle, on retrouve des exclus et des laissés pour compte, travailleurs peu qualifiés, immigrés mal intégrés.
Comment corrige-t-on cela? La redistribution fiscale classique ne mènera pas très loin. Il faut plutôt déployer de l’énergie et des ressources collectives pour s’attaquer aux racines du mal.
D’abord, investir encore plus dans l’éducation et la formation, parce qu’il y a un lien direct avec l’exclusion d’un côté, et la hausse des revenus de l’autre. Ce sont des diplômés universitaires qui se sont le plus enrichis. Ensuite, augmenter la productivité. Dans une économie saine, les salaires augmentent quand la productivité augmente. C’est vraiment la clé. Ensuite, briser un tabou, celui qui nous a menés à croire qu’il était normal que les hausses salariales ne dépassent pas l’inflation. Si la productivité augmente, cela doit se refléter dans les salaires.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé