En politique comme ailleurs, on n'est jamais mieux servi que par soi-même, surtout lorsqu'on cherche les fleurs et les compliments.
Stephen Harper, qui fête ces jours-ci le cinquième anniversaire de son arrivée au pouvoir, a bien compris ce principe: dimanche, il s'est occupé lui-même de dresser un bilan ultrapositif de son gouvernement, bien entouré de centaines de militants conquis d'avance.
C'est de bonne guerre, direz-vous - tous les chefs politiques font de même. Vrai, mais entre les critiques des partis de l'opposition, qui ne voient que du noir, et les grosses lunettes roses de M. Harper, il est parfois difficile de départager les bons coups des mauvais.
En cette période d'agitation préélectorale, ce qui frappe d'emblée dans le discours de Stephen Harper, c'est sa réplique quasi instantanée à la stratégie libérale qui consiste à demander aux Canadiens si le pays est mieux aujourd'hui qu'il y a cinq ans.
Rappelez-vous il y a cinq ans, rétorque M. Harper: les commandites, les affaires louches et la perte de confiance de la population envers le gouvernement.
Cette réponse est partisane, soit (comment pourrait-il en être autrement?), mais elle est intéressante dans le décor politique actuel parce qu'elle représente un test pour les libéraux.
Lorsque l'affaire des commandites a éclaboussé les libéraux, en 2003-2004, certains d'entre eux disaient qu'il faudrait au moins 10 ans à leur parti pour s'en remettre, en particulier au Québec. Aujourd'hui, sept ans plus tard, force est d'admettre que les libéraux n'ont pas fini leur traversée du désert, tant s'en faut.
Les conservateurs peuvent-ils encore «faire du millage» avec les commandites? On verra bien, mais le fait que Stephen Harper en parle à l'orée d'une possible campagne électorale démontre qu'il ne se privera pas de ramener le sujet sur le tapis.
Chose certaine, à voir les difficultés qu'éprouvent les libéraux dans le recrutement, la collecte d'argent et l'organisation d'événements au Québec, il est clair qu'ils traînent encore ce boulet.
Ajoutez à cela le fait que Michael Ignatieff n'arrive pas à percer, qu'il laisse même bon nombre d'électeurs indifférents, et vous comprendrez pourquoi plusieurs organisateurs libéraux craignent de subir toute une dégelée aux prochaines élections.
Revenons sur le bilan de M. Harper, cet exercice d'autocongratulation dans lequel le premier ministre a même vanté la transparence de son gouvernement. Transparence? La bonne blague! Jamais un gouvernement n'aura sombré dans une telle manie du contrôle de l'information que celui de Stephen Harper.
Quant à la paix constitutionnelle que M. Harper dit avoir restaurée, je ne sais pas où il a pris cette idée que la souveraineté montait en flèche avant son arrivée au pouvoir, mais cette affirmation ne résiste pas à une analyse sérieuse.
M. Harper ne s'est par ailleurs pas attardé - on le comprend - aux ratés de son gouvernement sur la scène internationale, à l'ONU notamment, ni au milliard de dollars dépensé l'été dernier pour les réunions du G8 et du G20 en Ontario.
Quant à sa promesse répétée d'en arriver un jour à un Sénat élu, elle aurait sans doute un peu plus de poids si M. Harper n'avait pas transformé la Chambre haute en bureau permanent pour ses organisateurs, en salle d'attente pour ses candidats montréalais ou, carrément, en cirque par des nominations, disons... étonnantes, pour rester poli.
Quelques réalisations énumérées par Stephen Harper sont toutefois indéniables: la baisse de deux points de la TPS, l'accent législatif sur la loi et l'ordre, la reconnaissance de la nation québécoise et les investissements dans l'armée.
Vous aimez ou pas, mais c'est du concret dans un bilan. Et cela reflète les promesses antérieures des conservateurs.
On connaît, de plus, les priorités de Stephen Harper pour la suite: abolition du registre des armes d'épaule, baisse des impôts des entreprises et fin du financement public pour les partis politiques.
Encore là, vous aimez ou pas, mais cela a le mérite d'être clair. Plus clair, en tout cas, que la faiblarde riposte des partis de l'opposition, en particulier celle de Michael Ignatieff, vague à souhait dans ses commentaires.
«Est-ce que l'économie canadienne se porte mieux après cinq ans? Je pense que la réponse est claire. [...] Nous avons perdu du terrain depuis cinq ans, a-t-il dit le week-end dernier. On aurait pu investir dans l'économie de l'avenir.»
Mais encore?
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