Whissell doit choisir entre l'asphalte et sa limousine

Charest - dilapidation, dissimulation et corruption



(Québec) Si vous faites «David Whissell et asphaltage» sur Google, vous trouverez plein d'articles sur les contrats octroyés par le gouvernement à la compagnie ABC Rive-Nord détenue en partie par le ministre. À tort ou à raison, M. Whissell fait l'objet d'une controverse depuis l'hiver dernier à cause de ses intérêts dans cette firme. C'est une controverse dont il ne sortira pas gagnant.
La politique et les affaires font rarement bon ménage dans le tumulte partisan d'un Parlement. À moins de vouloir mettre son parti et son gouvernement dans l'embarras pendant quatre ans, M. Whissell devra faire un choix : sa compagnie ou son poste de ministre.
Pauline Marois a appuyé sur le bon bouton lundi : ce qui est dérangeant, ce n'est pas que la firme ABC Rive-Nord fasse des affaires avec le gouvernement. C'est le fait que ce soit la firme d'un ministre et le fait qu'il puisse y avoir ne serait-ce qu'une apparence de conflit d'intérêts.
Vous allez me dire que je suis trop sévère si la controverse ne porte que sur les apparences? Tous les gens impliqués dans le service public savent, ou doivent savoir au départ, que les apparences sont tout aussi importantes que la réalité. Il en va de leur crédibilité et de la confiance qu'ils doivent inspirer à leurs concitoyens. C'est vrai pour un policier et c'est vrai pour un politicien.
La situation dans laquelle se retrouve le ministre est imputable en partie à la lenteur de Jean Charest, qui n'a pas tenu sa promesse de 2002 de créer un poste de commissaire à l'éthique et de doter les parlementaires d'un code de déontologie. La main sur le coeur, M. Charest en avait fait un engagement personnel.
Sept ans plus tard, les «apparences» de conflit d'intérêts de certains ministres ou ex-ministres, dont David Whissell et Philippe Couillard, le forcent à bouger, mais il est placé devant des faits accomplis. C'est ainsi que le printemps dernier, il a «adapté» son projet de code d'éthique à la situation de M. Whissell. Cela frise le ridicule et annonce des débats houleux cet automne. L'éventuel commissaire à l'éthique, si on finit par en nommer un et qu'il est sérieux, ne pourra décemment accepter une telle situation.
Le cas de M. Whissell est intéressant : personne n'a accusé le ministre d'être intervenu personnellement pour obtenir des contrats à la compagnie d'asphaltage ABC Rive-Nord. Mais l'octroi de contrats sans soumission à la firme du ministre, révélé plus tôt cette semaine, soulève des doutes sur le processus de sélection des entrepreneurs. Les fonctionnaires des Transports auront beau donner toutes les explications imaginables à ce genre de pratique, ils ne feront pas taire la controverse.

Depuis le scandale des commandites, le lien de confiance entre la population et les politiciens a été rompu, et ceux-ci doivent en tenir compte. Aucun gouvernement ne peut tolérer des situations apparentes de conflit d'intérêts chez ses leaders.
La controverse sur le cas de M. Whissell devient un obstacle à une discussion harmonieuse entre les partis concernant la mise en place d'un code d'éthique. Ne serait-ce que pour cette raison, le ministre doit choisir entre son engagement politique au sein du cabinet et son implication chez ABC Rive-Nord.
Je comprends qu'une décision de se retirer du cabinet dans les circonstances serait perçue comme une admission de sa part face aux allégations de l'opposition. Mais comme disent les parlementaires anglophones, il doit poser «un geste honorable». Il doit le faire pour des raisons d'intérêt public et par respect pour ses collègues du cabinet et du caucus qui n'ont pas besoin d'une telle controverse dans le quotidien de leur travail.


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