Le Parti libéral du Québec, visiblement encore décoiffé de l’ouragan caquiste qui a déferlé sur le Québec en 2018, cherche à reconnecter avec l’électorat francophone. En condamnant toute forme de nationalisme depuis 2003, les francophones ont finalement déserté la formation libérale à la dernière élection.
En préparation de leur 37e Congrès-jeune du Parti libéral du Québec, la Commission-Jeunesse a lancé le bal en affirmant que le parti devrait se doter d’une loi sur l’interculturalisme en rejetant définitivement le multiculturalisme canadien. La candidate à la direction du parti, Dominique Anglade, est entrée dans la valse libérale en s’engageant à inclure une même loi dans sa plateforme électorale. Finalement, ce fut le tour de Gaétan Barette d’enfiler ses souliers de danse en affirmant que le parti n’avait pas été assez nationaliste sous la direction de Philippe Couillard.
Voilà donc qu’après 15 années passées au pouvoir à nier toutes questions identitaires, sous le fameux symbole du soufflement sur les braises de l’intolérance, le PLQ veut revenir à ses racines, un parti d’abord québécois, mais tout de même fidèle à la fédération canadienne.
Pour comprendre les dernières métamorphoses libérales, faisons un peu d’histoire. Au début du 20e siècle, le PLQ était essentiellement une succursale du Parti libéral du Canada. Après La Grande Noirceur, où ils ont passé 15 ans sur les banquettes de l’opposition, les libéraux provinciaux avaient enfin compris qu’ils devaient incarner une vision plus nationaliste pour reprendre le pouvoir aux mains de l’Union nationale.
À partir des efforts autonomistes de Georges-Émile Lapalme, de Jean Lesage et de René Lévesque, le PLQ a été l’artisan de la Révolution tranquille. L’équipe du tonnerre avait alors affirmé le Québec comme une nation distincte, en plus de participer à son émancipation économique. Robert Bourassa incarnait la suite logique de ce positionnement politique.
Après le référendum de 1995, la vision politique du PLQ a drastiquement changé. Il fallait maintenant prendre acte de la victoire du NON. Finis les combats constitutionnels, les questions identitaires et la reconnaissance du Québec à l’intérieur du Canada.
Il fallait maintenant avoir les « deux mains sur le volant » pour s’occuper des « vraies affaires » et laisser de côté les « vieilles chicanes ». D'ailleurs, n'entendez-vous pas clairement la voix de Jean Charest lorsque vous lisez cette dernière phrase ?
Et donc, le PLQ s’est peu à peu métamorphosé pour devenir un parti d’abord Canadien à l’intérieur du Québec. La politique d’affirmation du Québec, signée par Philippe Couillard, Québécois, Notre façon d’être Canadiens était l’incarnation même de ce nouvel ancrage politique, qui plaçait l’identité québécoise comme un sous-produit de l’identité canadienne.
À la dernière élection, le réveil libéral a été brutal : seulement un électeur francophone sur 10 a voté pour le PLQ, récoltant du même coup le pire score de leur histoire. Depuis, les libéraux provinciaux sont perdus et désorientés.
Et maintenant ?
À la croisée des chemins, les libéraux veulent maintenant prendre leur distance face aux années Charest et Couillard. Ils veulent tâter le terrain du nationalisme civique et de l’interculturalisme. Soit.
Sauf que la reconnexion libérale avec le peuple québécois ne se fera pas seulement qu’avec quelques gestes symboliques, des discussions entre jeunes libéraux à un congrès ou des entrevues médiatiques. Ce devra plutôt être un travail de longue haleine qui s'écheleronna sur plusieurs années.
Et si les libéraux entérinaient une proposition qui permettrait au Québec de déroger de la loi fédérale sur le multiculturalisme canadien ? Question d’appliquer réellement l’interculturalisme comme méthode d’intégration des nouveaux arrivants si nécessaires à notre développement.
À ce moment, le PLQ signifierait bruyamment que le multiculturalisme comme doctrine d’état canadienne ne s’applique pas à la spécificité québécoise, et qu'elle est même contraire à ses intérêts vitaux.
Voilà, me semble-t-il, un geste fort pour affirmer le changement de cap nécessaire au Parti libéral du Québec.
Voilà, me semble-t-il, un geste puissant et nécessaire pour que le Parti libéral du Québec redevienne le parti autrefois dirigé par Robert Bourassa et Jean Lesage.