Une grave erreur

Le plan d'aide à l'industrie automobile est un cadeau à la mauvaise gestion et au corporatisme

Crise mondiale — crise financière



Les gouvernements canadiens et ontarien ont emboîté le pas à l'administration américaine en annonçant une aide de 4 milliards à l'industrie automobile.

Après l'administration américaine, c'est maintenant au tour des gouvernements canadien et ontarien d'annoncer une aide de 4 milliards de dollars à l'industrie de l'automobile. Plutôt que d'améliorer la qualité de leurs produits ou de trouver des moyens de réduire leurs coûts de production, les géants de l'automobile et leurs gros syndicats ont plutôt choisi de siphonner le portefeuille des contribuables canadiens.
C'est une grave erreur qui aura pour conséquence d'affaiblir l'industrie de l'automobile, de redistribuer l'argent des plus pauvres vers les plus riches, de subventionner plus de pollution et d'appauvrir dans son ensemble notre société, sans régler la crise économique actuelle.
Le gouvernement vient, ni plus ni moins, de décider de subventionner une bureaucratie corporative de GM et Chrysler qui a pris de mauvaises décisions et d'engraisser un gros syndicat ultra-corporatiste, les TCA.
Pourtant, les grands constructeurs automobiles ont besoin de restructurer de fond en comble leurs vieilles façons de faire pour assurer leur survie. Malheureusement, l'assainissement de leur gestion ne se fera pas à court terme parce que nos gouvernements vont récompenser les gestionnaires les plus médiocres.
Non seulement on aide les grands patrons multimillionnaires, mais aussi des employés de cette industrie qui sont loin d'être les plus nécessiteux. On prend notre argent pour donner des milliards à des travailleurs qui gagnent en moyenne plus de 50$ de l'heure, soit beaucoup plus que l'écrasante majorité des contribuables. Encore pire: contrairement à l'Administration Bush, le gouvernement canadien n'a pas exigé que les salaires et les règles de travail de ces deux entreprises soient concurrentiels avec ceux des fabricants automobiles internationaux avant de leur verser les fonds.
Loi de la faillite
Si on veut véritablement rendre GM et Chrysler rentables, qu'on les place sous la loi de la faillite et qu'on les laisse s'entendre avec leurs créanciers sur les meilleures façons de ramener leurs entreprises sur la voie de la profitabilité. D'ailleurs, l'aide annoncée ne garantit en rien la fin des difficultés de GM ou Chrysler.
Certains analystes prévoient déjà que le montant de l'aide devra s'élever à 75 milliards supplémentaires, dont 15 milliards proviendraient des gouvernements canadiens.
En voulant aider aujourd'hui une industrie, nos gouvernements ne font que pénaliser les forces les plus productives de notre société pour récompenser ceux qui ont pris des décisions farfelues et des risques trop élevés. On envoie également un signal aux autres entreprises en difficulté qu'elles peuvent continuer à perdre des milliards et être improductives puisque le gouvernement sera là pour les empêcher de payer le prix de leur incompétence. Après Bear Stearns, Citigroup et AIG, c'est au tour de GM et Chrysler de bénéficier des largesses de l'Administration Bush. Et voilà que le gouvernement canadien entre également dans cette danse de distribution de milliards.
Toutefois, si un gouvernement veut véritablement venir en aide à l'économie du pays en cette période d'incertitude, il doit plutôt commencer par réduire ses interventions et sa taille. Il s'agirait d'une forme d'aide neutre et le gouvernement agirait ainsi comme tout bon père de famille quand l'argent se fait plus rare. Il se serre la ceinture.
Unanimité politique
Ce qui est le plus surprenant lorsque ces interventions publiques catastrophiques surviennent, c'est que pratiquement tous les acteurs politiques applaudissent à l'unisson. Des républicains américains aux néo-démocrates canadiens, en passant par les souverainistes québécois, les conservateurs et les libéraux, il y a unanimité pour saluer cette prétendue aide.
En agissant ainsi, tous renient leurs idéaux. Comment des écologistes peuvent accepter de donner une subvention qui permettra de vendre plus d'autos, en bas du véritable prix du marché? Comment des sociaux-démocrates peuvent souhaiter taxer les plus pauvres pour aider de grandes entreprises? Comment des conservateurs peuvent s'opposer au libre-faire?
L'explication la plus évidente est que plusieurs de nos politiciens ne sont peut-être pas aussi socialistes, écologistes, conservateurs ou souverainistes qu'ils le prétendent. Ils sont possiblement, d'abord et avant tout, corporatistes. Près de 20 ans après l'effondrement du communisme, en cette période de soubresauts économiques, les tenants d'une véritable liberté de marché doivent maintenant se lever pour affronter un nouvel ennemi tout aussi dommageable pour notre bien-être économique: le corporatisme!
ÉRIC DUHAIME
L'auteur est un ex-conseiller politique de Mario Dumont.


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