Une fraude intellectuelle

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Les députés québécois doivent voter contre





Le débat sur l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Europe a débuté aujourd’hui à Ottawa, La mesure législative de la ministre du Commerce international, Chrystia Freeland, visant la mise en œuvre de l’AÉCG sera soumise à la discussion des parlementaires jusqu’à mercredi.


Fidèles à leurs habitudes, les représentants de la clique politique se contentent de démagogie dès lors qu’il est question de libre-échange, qu’il est interdit de discuter sous peine d’être condamné à la marginalité. Allons-y de quelques extraits du communiqué de presse concernant la mesure législative en question, car celui-ci nous donne une bonne idée des lignes communicationnelles que le gouvernement compte employer.


« L’AECG offre au Canada un accès au bassin de plus de 500 millions de consommateurs de l’UE. Les travailleurs canadiens pourront profiter d’un accès considérablement accru à ce marché constitué de 28 pays et dont l’activité économique génère chaque année 20 000 milliards de dollars. »


Le hic, c’est que les droits de douane sont déjà quasi-inexistants entre l’Europe et le Canada. Le traité porte sur autre chose, soit la mise en tutelle des États. L’autre hic, c’est que les « travailleurs canadiens » ne seront très certainement pas gagnants de l’AÉCG, pas plus que ceux des autres pays d'ailleurs. Les chercheurs de l’Université Tufts, qui ont efficacement démoli les méthodologies employées par les gouvernements libre-échangistes pour vanter l’Accord et dont l’étude est désormais disponible en français, concluent que la part des PIB nationaux consacrée au travail déclinera, que des compressions salariales surviendront, et que 230 000 emplois seront perdus d’ici 2023. Niveau profitabilité pour les travailleurs, on aura vu mieux ! 


Cette citation de la ministre est présente dans le communiqué de presse :


« En ratifiant l’AECG, le Canada fera une fois de plus la démonstration de son leadership pour un commerce international progressiste. Cet accord est un modèle par excellence : il ouvre la voie à une nouvelle génération d’accords commerciaux où la priorité est accordée aux services publics et à la protection de l’environnement et des droits des travailleurs. »


« Commerce international progressiste » est une expression beaucoup trop vide de sens pour que nous perdions du temps à la commenter. Ceci dit, s’il faut comprendre cette idée de priorité « accordée aux services publics » comme le fait que ceux-ci deviennent des occasions d’affaires prioritaires pour les transnationales, c’est absolument vrai. Si la ministre se targue au contraire d’être parvenue à défendre les services publics dans l’AÉCG, nous avons ici affaire à un mensonge grossier, s’agissant plutôt du premier accord qui ira jusqu’à forcer l’ouverture des contrats d’Hydro-Québec.


Autre citation lisible dans le communiqué :


« Les modifications apportées à l’AECG ont mené à la signature d’un accord plus progressiste et inclusif, hier à Bruxelles. C’est donc sans délai que je dépose au Parlement le traité de cet accord ainsi que le projet de loi visant sa mise en œuvre. Modèle par excellence, l’AECG profitera à la classe moyenne, au Canada comme en Europe. »


On s’étonnera de voir ici madame Freeland se réjouir des modifications, elle qui pleurait la mort (prématurée) de l’Accord lorsque les Wallons refusaient de l’approuver, ajoutant qu’elle ne comprenait pas qu’on rejette un partenaire aussi « gentil » que le Canada... Ajoutons que les modifications arrachées par les Wallons sont très loin de changer le plomb en or et qu'elles ne constituent qu'une nouvelle annexe à un AÉCG qui n'a aucunement été changé.


Toute cette affaire n’est qu’une vaste fraude intellectuelle où nous sommes pris pour des valises. Si nos députés québécois à Ottawa sont dignes de leur fonction, ils voteront contre cette mesure législative.



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Simon-Pierre Savard-Tremblay179 articles

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Simon-Pierre Savard-Tremblay est sociologue de formation et enseigne dans cette discipline à l'Université Laval. Blogueur au Journal de Montréal et chroniqueur au journal La Vie agricole, à Radio VM et à CIBL, il est aussi président de Génération nationale, un organisme de réflexion sur l'État-nation. Il est l'auteur de Le souverainisme de province (Boréal, 2014) et de L'État succursale. La démission politique du Québec (VLB Éditeur, 2016).





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