Une espèce menacée

Budget Québec 2010 - suites



Gens d’affaires et économistes ont ovationné Jean Charest au petit déjeuner hier matin, à la Chambre de commerce de Québec, pour l’effort de rationalisation des dépenses dans le budget Bachand pendant que la rue hurlait sa colère.
J’ai une théorie à ce sujet. La fameuse « classe moyenne » est devenue une espèce menacée d’extinction au Québec. Elle lutte dorénavant pour sa survie. Ses prédateurs, les gouvernements, l’appauvrissent sans merci.
Au Québec, lorsqu’un gouvernement veut relever fortement ses revenus, il doit inévitablement toucher les plus grosses strates de contribuables. Or, « faisons payer les riches » est un slogan enflammé de la vieille gauche des années 1960, mais dans les faits, les riches ne sont qu’une poignée de contribuables et ils sont déjà siphonnés au maximum. Il n’y a plus rien à sortir d’eux.
En chiffres arrondis, les personnes touchant des revenus de plus de 100 000 $ par année représentent moins de 3 % du total des contribuables et ils paient 25 % du total des impôts. Si on élargit aux 20 % des contribuables les plus fortunés, ce qui inclut maintenant la classe dite moyenne (!), ceux-ci paient plus de 70 % de l’impôt perçu par le gouvernement du Québec. À l’inverse, 40 % de la population québécoise ne paie pas un sou d’impôt, résultat du type de social-démocratie développée depuis 40 ans.
La possibilité d’imposition maximale du bassin de contribuables étant atteinte, le gouvernement doit donc se tourner vers les taxes et les tarifs pour augmenter ses revenus. C’est ainsi que la classe dite moyenne est doublement étouffée : elle paie à la fois les plus hauts taux d’impôt en Amérique et, en plus, on lui ajoute des tarifs et des taxes additionnels. La classe moyenne disparaît de la sorte rapidement : les gouvernements la ramènent au niveau de la pauvreté. C’est le nivellement par le bas.
Quant aux épargnés qui ne paient aucun impôt ou très peu parce que leurs revenus sont bas, ils sont tout aussi furieux au lendemain de ce budget, parce que le gouvernement les rattrape par les taxes, comme la TVQ, l’essence, l’électricité, etc.
Au total, cela fait beaucoup de monde!
Une taxe casse-cou
La nouvelle taxe dédiée à un fonds spécial pour les services de santé ressort par ailleurs comme l’une des causes principales du tollé qui monte depuis mardi. Cette formule de financement a le défaut de n’avoir aucun effet sur le contrôle de la demande de services, contrairement à une véritable franchise ou un ticket modérateur. Conséquemment, il ne sera pas plus facile d’avoir accès à un médecin de famille, les listes d’attente en chirurgie ne raccourciront pas et les salles d’urgence continueront de déborder. Nous paierons 200 $ de plus par année en 2012 pour la même piètre qualité de services. Quant à soulever une pareille colère, valait mieux donner le coup et introduire une vraie franchise!
Peu de crédibilité
Les citoyens sont enfin fâchés, parce qu’ils ne croient pas Jean Charest sur les cibles de réduction de dépenses annoncées, jugées en plus encore trop modestes et trop imprécises. Sur ce plan, il ne peut s’en prendre qu’à lui : quand on déjà autant menti à la population, celle-ci ne veut plus être prise pour une valise.
L’avenir de Jean Charest est probablement en jeu avec l’atterrissage périlleux de ce budget : ça passe ou ça casse.
Réagissez à cet article : jjacques.samson@journaldequebec.com


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