« Majorité opprimée », le film

Une démonstration de l’absurde par l’absurde d’une rare efficacité

L’égalité homme/femme et l’indépendance du Québec

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L'inacceptable trouve toujours refuge dans la « banalité » du quotidien

Le court métrage féministe « Majorité opprimée » de la réalisatrice Éléonore Pourriat, sorti il y a quatre ans sans faire de vague, reprend vogue et connaît un succès viral sur YouTube. Il dépeint une société sexiste où c’est la femme qui domine, les rôles masculins et féminins y étant inversés.

Pratiquement tout y passe, des petits harcèlements et humiliations courantes du quotidien jusqu’à l’agression sexuelle où la victime est plus ou moins prise au sérieux car posée comme étant en partie responsable de son malheur, en passant par des femmes torse nu dans la rue et des hommes voilés.
Cette soudaine popularité n’est pas étrangère aux récents reculs des droits des femmes en Europe, notamment à la loi anti-avortement adoptée en Espagne, et aux avancées du religieux dans la sphère publique dans plusieurs pays où la doctrine multiculturaliste a été instituée comme modèle d’intégration de l’immigration de masse, si tant est qu’il en soit un.
Plus près de nous, dans le contexte actuel du débat sur le projet de loi 60 , ce film, d’une efficacité remarquable, a le mérite de mettre en lumière l’absurdité d’un monde où règne la domination d’un sexe sur l’autre et la discrimination systématique et intégrée du « sexe faible ».
On peut sourire à imaginer un Charles Taylor, un Vincent Marissal, ou un autre de ces bien-pensants si vertueux et leurs fils, portant à la plage une cagoule et des manches longues à 35 degrés Celsius pendant que femmes et fillettes se prélassent dans l’eau de mer en petite tenue. Absurde cette image? Oui, absolument, et totalement.
Alors pourquoi la même absurdité n’est-elle pas aussi évidente dans la réalité où c’est la femme qui fait les frais du sentiment de supériorité de l’homme? La banalisation par l’habitude bien ancrée, tout simplement.
C’est ainsi que se passent les choses le plus naturellement du monde depuis la nuit des temps. L’indignation devant le traitement inégal des femmes par rapport aux hommes exige donc un effort constant de vigilance et de réflexion que trop de gens, femmes incluses, n’ont pas la conscience ou la volonté de faire.
On en est même rendu à pousser l’absurdité aussi loin que de défendre et cautionner le port du voile ou la ségrégation des sexes au nom de la sacro-sainte liberté de religion. Si l’égalité homme/femme est une valeur universelle, elle n’en est pas moins une valeur profondément québécoise depuis la Révolution tranquille. Ses artisans se sont battus sans relâche pour soustraire la femme du joug de la religion catholique et lui permettre d’être une citoyenne libre à part entière, et non plus la propriété des hommes de son entourage.
Du droit de vote au droit à l’avortement, rien n’est acquis, tous ces droits demeurent fragiles, comme en témoigne par exemple la détermination d’une certaine aile chrétienne intégriste du gouvernement Harper à vouloir remettre le débat sur l’avortement au goût du jour. Le retour en force du religieux au sein de l’État est donc une perspective qu’une majorité de québécois ne voit pas d’un bon œil, puisqu’elle sait fort bien la menace qu’elle constitue à long terme.
Tant de chemin a été parcouru depuis les années soixante pour faire évoluer les mentalités et changer la façon dont la femme est perçue dans la société, et tant de chemin reste à faire. Il est donc hors de question de reculer sur ce terrain miné de la religion. Être une femme est une condition naturelle, alors que croire en un dieu est un choix.
Le principe humain universel de l’égalité homme-femme doit par conséquent primer sur la liberté de religion. C’est ce que la charte des valeurs du gouvernement péquiste permettra d’établir. Ce positionnement du peuple québécois marque une fracture profonde d’avec le multiculturalisme canadien, qui encourage plutôt une fragmentation de la société en communautés qui s’ignorent.
En ce sens, la charte proposée par le Parti Québécois n’est pas qu’un projet de loi pour la laïcité. Il constitue la pierre d’assise d’un projet de société où tous, sans égard au sexe, à la religion ou la couleur de peau, sont égaux devant la loi, favorisant le vivre ensemble dans le partage d’une culture et de valeurs communes. D’où son qualificatif de charte des valeurs, et non de la seule laïcité.
La nation québécoise a bien le droit d’être qui elle est et d’exister comme telle, en se définissant elle-même selon ses propres paramètres. Lentement mais sûrement, elle est en train d’en prendre conscience, et il n’est pas loin le jour où elle comprendra que pour continuer d’être ce peuple accueillant à la culture si vibrante et déterminée à ne pas mourir mais plutôt à s’épanouir, elle devra accéder à son indépendance politique.


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5 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    19 février 2014

    Bon film !
    Quoique trop court.
    Imaginons que l'agent de police qui rédige le rapport soit l'agent 728.
    Des hommes s'occupant de jardins d'enfants ?
    C'était le cas avec les prêtres. Mais les scandales de pédophilie ont fait passer la société à favoriser le staff féminin.
    Courir seins nues, c'est légal à New York. Mais pas réaliste pour les poitrines fortes. D'ailleurs, des brassières sont conçues spécialement pour les joggeuses à fin d'éviter les entrechoquements des seins.
    Des hommes au foyer tandis que les épouses travaillent, cela existe, mais ces hommes sont dévalorisés.

  • Archives de Vigile Répondre

    19 février 2014

    En politique, on peut dire que l'égalité homme-femme est bien établie.
    Je me rappelle plus jeune lorsqu'on disait que s'il y avait plus de femmes en politique, ça humaniserait la politique et bla bla bla...
    Depuis qu'on a plus de femmes en politique, le sort des plus démunis de la société, par exemple, ne s'est pas amélioré pour autant. Elles ont su se montrer aussi dures que leurs confrères masculins.
    Et les femmes en politique ont démontré qu'elles étaient toutes autant au service du Système que les hommes. En ce sens, oui, il y a égalité dans ce domaine entre hommes et femmes.
    Cette attitude des femmes en politique a été encouragée par le Système. On sait que le Système cherche à effacer les identités ethniques, nationales et culturelles pour créer l'humain nouveau du Système ayant comme seule identité celle de producteur-consommateur devant répondre aux besoins du marché pour sa survie.
    Se pourrait-il alors que le Système cherche aussi à effacer la différence entre homme et femme en niant la dimension féminine qui fait la richesse de l’identité de la femme, un peu comme la diversité des identités nationales, ethniques et culturelles que le même Système cherche à effacer font la richesse de l'humanité?
    Cela irait dans le même sens.
    Pour moi, les hommes et les femmes sont égaux mais différents et cette différence constitue aussi une richesse pour l'humanité.

  • Archives de Vigile Répondre

    19 février 2014

    @ Lison,
    Au Québec, il y a 20 ans, lorsque Guy Paiement parlait du phénomène déjà marqué de la solitude et de l'absence d'enfants chez les couches défavorisées au Québec, il y avait pas mal moins d'immigrants ici en proportion.
    Ces gens seuls sans enfants étaient en majorité des Québécois pure laine.

  • Archives de Vigile Répondre

    19 février 2014

    @ Bélisle
    Lorsque vous parlez des américains qui vivent en couples aux USA, qui sont a la baisse, cela est surtout du au changement de population qui s'opère a l'intérieur des États-Unis.
    Dans les années 60, il y avait 85% des américains, qui étaient de souche européenne, alors que maintenant, la population de souche européenne est seulement de 65%. Les gens peuvent se déplacer d'un pays a un autre, mais, leurs cultures ne s'évapore pas par magie.
    La population des afro-américains est plus élevé maintenant que dans les années 60. Les études démontrent que les afro-américains ne se marient pas et sont très peu en couple, je ne connais pas les statistiques sur les latinos, mais, actuellement, plus de 75% des enfants afro américains qui naissent sont d'une mère monoparentale et la plupart de ces enfants ne connaitront pas leurs pères et ce père absent, naturellement ne participera pas a son éducation.
    Les études démontre que ces enfants sont surtout élevés dans la rue.
    http://www.dailymail.co.uk/news/article-2159476/Tennessees-deadbeat-dads-The-men-81-children-46-different-women--theyre-paying-child-support-them.html

  • Archives de Vigile Répondre

    19 février 2014

    Un peu comme c'est le cas aux États-Unis, il y a certainement égalité dans la solitude chez les hommes et les femmes du Québec.
    Au début des années 1990, Guy Paiement notait déjà qu'au Québec, c'était dans les couches socio-économiques les plus défavorisées qu'il y avait le plus de solitude et le moins d'enfants.
    Rien d'encourageant pour l'avenir du Québec.
    Il faut remarquer que c'est la même chose aux États-Unis. En 1960, 72% des Américains vivaient en couple. En 2010, en particulier à cause d'une économie de plus en plus déficiente, on en était à 51%.
    http://www.salon.com/2014/02/16/americas_miserable_economy_may_be_ruining_your_love_life_partner/
    Tout cela met en relief une certaine décadence de l'Occident.