Le 11 septembre, 5 ans plus tard

Un monde plus sûr... pour les Américains

Depuis 2001, le terrorisme a fait près de 19 000 victimes, dont seulement 8 aux États-Unis

17. Actualité archives 2007


Washington - Quelques jours après l'anniversaire des attentats du 11 septembre, le nombre de morts américains en Irak dépassera le nombre de morts dans les attentats de 2001. La question que bien des Américains se posent est de savoir s'il y a un lien à faire entre les deux.
Depuis plusieurs semaines, les ténors de l'administration Bush, à commencer par le président lui-même, mais aussi le vice-président Dick Cheney et le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld sont passés à l'offensive. Pour eux, la guerre en Irak n'est que l'un des fronts de la guerre au terrorisme. "Le conflit idéologique de ce siècle", a dit le président Bush, entre la démocratie et les "islamo-fascistes".
L'autre argument de l'administration sur la sécurité est de répéter qu'ils doivent bien faire quelque chose de bien puisqu'il n'y a pas eu d'attentats majeurs en sol américain depuis le 11 septembre 2001.
Mais bien des experts dans le domaine de la sécurité internationale sont en désaccord avec cette affirmation.
"Il est incontestable qu'il y a aujourd'hui plus d'attentats terroristes qu'il y a cinq ans, si on tient compte de la situation internationale et pas juste de ce qui se passe aux États-Unis. Il est évident que le monde est un endroit plus dangereux aujourd'hui que le 11 septembre 2001", affirme Will Dobson, rédacteur en chef de la prestigieuse revue Foreign Policy.
L'école du terrorisme
La situation en Irak est particulièrement préoccupante. "Les groupes terroristes recrutent plus rapidement que notre capacité de découvrir et de démanteler leurs cellules. L'Irak est devenu une véritable école du terrorisme qui est beaucoup plus dangereuse que les camps d'Oussama ben Laden en Afghanistan. En Irak, au lieu de s'exercer, ils le font pour vrai", dit-il.
Bien sûr, Al-Qaida semble être en déroute et ses dirigeants "sont en fuite ou vivent dans des cavernes", dit M. Dobson. Cela est un succès réel. Comme la situation en Afghanistan où, malgré le retour des talibans dans le sud du pays - la région où les troupes canadiennes sont actuellement postées - "il est indéniable que la situation des Afghans s'est améliorée depuis cinq ans et que cela contribue à la sécurité mondiale".
"Nous avons encore des chances de compléter notre mission avec succès en Afghanistan. On ne peut pas dire la même chose de l'Irak où les chances de succès sont vraiment devenues minces", croit M. Dobson.
Par contre, ce qui est inquiétant, c'est que l'on voit maintenant des groupes qui s'inspirent vaguement d'Al-Qaida qui font des attentats dans le métro de Londres et ailleurs.
Aux États-Unis même, la création du ministère de la Sécurité intérieure (Homeland Security) est loin d'avoir été un succès. "Ils ont surtout changé des boîtes de place à l'intérieur de la bureaucratie. Quant aux autres agences chargées de question de sécurité, elles sont loin d'être à la page. La CIA a beaucoup été critiquée après le 11 septembre, mais aujourd'hui encore, elle en est à tenter de recruter des analystes qui parlent arabe !" soutient M. Dobson.
Pas le droit à l'erreur
Le problème dans les questions de terrorisme, rappelle-t-il, c'est qu'il faut avoir raison 100 % du temps. "Une seule erreur et c'est un attentat réussi. Il n'y a pas de marge d'erreur possible", soutient-il. Dans ce contexte, le fait qu'il n'y ait pas eu d'autres attentats depuis 2001 pourrait relever autant de la chance que de l'efficacité.
Il reste que, selon les recherches effectuées par Foreign Policy, entre le 12 septembre 2001 et le 31 décembre dernier, plus de 18 900 personnes avaient péri dans des attentats terroristes, dont plus de 5000 en Irak seulement, alors qu'il y avait eu seulement huit morts en territoire américain.
Ce qui fait dire à M. Dobson que le monde est beaucoup moins sûr pour tout le monde, sauf, jusqu'ici en tout cas, pour les Américains. Mais pratiquement tous les experts du terrorisme interrogés par sa revue estimaient que la question n'est pas de savoir s'il y aura éventuellement un autre attentat terroriste contre les États-Unis. La véritable question, c'est de savoir quand il aura lieu.
Peu de changement
En fait, croit M. Dobson, ce qui est le plus remarquable, cinq ans après le 11 septembre, c'est que si peu de choses aient changé, alors que tout le monde pensait, ce jour-là, que plus rien ne serait pareil.
À part les mesures de sécurité bien visibles quand on prend un avion, les choses sont vite revenues à la normale. En moins de 40 jours, la Bourse avait retrouvé son niveau d'avant les attentats. Les exportations américaines ont baissé légèrement en 2001, mais sont en hausse constate depuis, il y a même considérablement plus d'immigrants qui entrent aux États-Unis aujourd'hui qu'il n'y en avait eu l'année avant les attentats.
Bien sûr, les budgets de la Défense nationale et de la Sécurité intérieure ont augmenté de 39 % depuis cinq ans. Mais aujourd'hui, c'est la possibilité d'un enlisement en Irak, surtout si les Américains se retrouvaient pris au milieu d'une guerre civile qui préoccupe les électeurs. L'augmentation des budgets n'est pas la garantie de plus de sécurité.
mcauger@lesoleil.com


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