au cours des dernières semaines, nombre d'observateurs ont dénoncé la «culture du secret» de la présidente de l’OQLF, France Boucher. (Photo La Presse)
Martin Croteau - Accusant les agences gouvernementales de ne pas fournir un portrait fidèle de l'état du français au Québec, des universitaires mettent sur pied un groupe de recherche indépendant consacré à la question linguistique.
Le coordonnateur de l'Institut de recherche sur le français en Amérique (IRFA), Patrick Sabourin, souhaite créer une institution citoyenne qui agira comme chien de garde de la langue. Il souhaite que son groupe organise des colloques, anime une page web et publie des rapports sur l'état du français au Québec et dans les autres provinces canadiennes.
«On est tannés que le gouvernement ait le monopole des idées en matière linguistique, tranche cet ancien membre du Mouvement Montréal français. Les seules références en matière linguistique au Québec sont l'Office québécois pour la langue française et le Conseil de la langue française.»
Le projet naît alors que l'OQLF baigne dans la tourmente. Au cours des dernières semaines, nombre d'observateurs ont dénoncé la «culture du secret» de sa présidente, France Boucher. Début mars, cette dernière a refusé de qualifier l'état du français au Québec en dévoilant son rapport quinquennal sur la situation linguistique, document dont elle avait retardé la publication de plusieurs mois.
Même le président du Conseil supérieur de la langue française, Conrad Ouellon, a blâmé Mme Boucher pour sa façon de gérer le dossier linguistique. Parmi les experts qui participeront aux travaux de l'IRFA, on retrouve le démographe Marc Termote. Ce chercheur avait réalisé une étude sur la langue utilisée au travail à Montréal pour le compte de l'Office. Mais celui-ci avait refusé de rendre son ouvrage public pendant plusieurs mois. Le groupe comprend aussi deux anciens membres du comité de suivi de l'OQLF: le sociologue Simon Langlois, l'ex-président, et le mathématicien Charles Castonguay. Rappelons que les experts de ce comité ont été évincés de la préparation du bilan quinquennal, publié au début du mois.
«L'appareil gouvernemental semble lié, juge M. Castonguay. Les fonctionnaires doivent répondre à des ministres. Les ministres font partie d'un gouvernement et il y a une politisation évidente de l'information sur la situation linguistique. Qu'il s'agisse d'un gouvernement libéral ou péquiste, c'est du pareil au même.»
M. Sabourin assure que son groupe se veut apolitique, objectif, impartial. «Nécessairement, si l'on se trouve à faire quelque chose de ce type, c'est qu'on considère qu'il y a une lacune, dit-il. Mais tous les chercheurs impliqués dans notre projet ne pensent pas de la même façon. Par exemple, MM. Termote, Castonguay et Langlois ont des différences de vues assez marquées.»
Il y a deux semaines, Québec a dévoilé un plan de 12 millions sur deux ans, pour promouvoir la langue française dans les entreprises, qui prévoit l'embauche de 20 nouveaux conseillers à l'OQLF. Au bureau de la ministre de la Culture, Christine St-Pierre, on se réjouit de la création du nouvel organisme de recherche. «Tout initiative pour faire avancer le dossier de la langue est la bienvenue», a indiqué son attachée de presse, Valérie Rodrigue.
Mais le Parti québécois ne voit pas les choses de cet oeil. «Cette idée confirme le malaise découlant de l'implication politique de la présidente de l'OQLF, explique le porte-parole du parti, Éric Gamache, dans un courriel. La ministre aura des explications parce qu'elle est, ultimement, responsable de la déception des chercheurs.»
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