Le ministre Simon Jolin-Barrette s’est mis à la tâche de dépoussiérer la Charte de la langue française.
Il compte déposer un plan d’action « global » visant à renforcer la présence du français au Québec « dans les prochaines semaines ». Mais le déferlement d’une seconde vague de COVID-19 au Québec contrariera vraisemblablement son ambition. L’attention du gouvernement doit demeurer concentrée sur la crise sanitaire, fait-on valoir au Devoir.
Le ministre responsable de la Langue française s’est dit « choqué » mardi des résultats de l’Enquête sur les exigences linguistiques auprès des entreprises, des municipalités et des arrondissements de Montréal menée par l’Institut de la statistique du Québec.
Pas moins de 62,9 % des entreprises de l’île de Montréal exigent ou souhaitent des compétences linguistiques en anglais à leurs futurs employés, apprend-on à la lecture du document de 70 pages rendu public la semaine dernière. « Je suis choqué du point où on est rendus. […] Les Québécois ont le droit de travailler dans leur langue. [Ils] ont le droit de travailler en français », a déclaré M. Jolin-Barrette en commission parlementaire. « Ce n’est pas vrai que tous les postes nécessitent la connaissance d’une autre langue que le français », a-t-il ajouté.
L’élu caquiste trouve tout aussi « inacceptable » que 4 travailleurs montréalais sur 10 basculent vers l’anglais afin de communiquer avec des collègues ou des patrons. « Au Québec, en 2020, c’est inacceptable. On va redresser la barre », a-t-il souligné, tout en promettant un train de mesures « concrètes », « costaudes » afin que le français « redevienne la langue normale et habituelle du marché du travail et de la société québécoise ».
Charte de la langue française
M. Jolin-Barrette a notamment affirmé la « volonté du gouvernement » d’assujettir les entreprises à juridiction fédérale à la Charte de la langue française, qui a été adoptée par l’Assemblée nationale il y a 43 ans. « On est rendu là. Il n’y a pas de raison qui ferait en sorte que les Québécois ne puissent pas travailler dans leur langue et que la législation québécoise ne s’applique pas sur l’intégralité du territoire québécois », a-t-il affirmé.
Je suis choqué du point où on est rendus. […] Les Québécois ont le droit de travailler dans leur langue. [Ils] ont le droit de travailler en français.
Le ministre caquiste a également souligné la nécessité de favoriser davantage la francisation des personnes à l’emploi d’une PME. « Est-ce que la Charte de la langue française doit être appliquée ? Je me questionne », a-t-il dit, calé dans un fauteuil en cuir de la salle du Conseil législatif.
Simon Jolin-Barrette s’est aussi engagé à mettre en œuvre une disposition de la « loi 104 » adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale en 2002 visant à forcer tous les ministères, organismes et sociétés publics à utiliser uniquement le français dans toutes leurs communications écrites avec les personnes morales établies au Québec — ce à quoi les précédents gouvernements se sont refusés.
« Pourquoi ça n’a pas été fait ? C’est tellement petit et rapide. Et tout le monde est d’accord », a demandé la députée solidaire Ruba Ghazal durant l’étude des crédits budgétaires alloués à la protection et à la promotion de la langue française.
M. Jolin-Barrette s’est alors présenté comme un « promoteur » de l’article 1 de la loi 104. « Je peux vous assurer que ça va être fait », lui a-t-il répondu, avant d’ajouter : « Cela étant […] ce n’est pas aussi simple que ça, car il y a plusieurs ficelles à attacher ».
Le chef parlementaire du Parti québécois, Pascal Bérubé, est persuadé que l’équipe de François Legault n’a pas « l’intention d’ouvrir la loi 101 » d’ici la fin de la législature. « Si vous souhaitez notre collaboration, vous allez poser des gestes sérieux, pas un plan d’action qui va arriver avant des élections en disant : “On est nationalistes !”» a-t-il averti.