Tout le monde le fait

Financement des partis - l’affaire Tecsult

Le réseau Télémédia a fait un tabac, dans les années 70, avec son slogan « Tout le monde le fait, fais le donc ». On pourrait accoler un slogan comparable aux formations politiques et aux firmes professionnelles qui violent la Loi sur le financement des partis : « Tout le monde le sait, tais-toi donc! »


Le Soleil révélait hier que la compagnie Tecsult, la deuxième société de génie au Québec au début des années 90, a versé illégalement des centaines de milliers de dollars au PLQ et au PQ pendant plusieurs années. Il a fallu une vérification de Revenu Québec et une cause devant les tribunaux pour découvrir le pot aux roses.
Tout le monde se doute bien que la Loi sur le financement des partis politiques est transgressée par de nombreuses firmes professionnelles qui dépendent des contrats gouvernementaux. C’est vrai au fédéral — on l’a vu chez Gomery —, c’est vrai au Québec, et c’est vrai au municipal. Il n’y a plus que les marguilliers qui échappent à ces magouilles, pour la bonne raison que les paroisses sont au bord de la faillite…
Ce qu’il y a d’étonnant, c’est que les mêmes politiciens québécois qui faisaient les vierges offensées pendant le scandale des commandites savaient que leurs partis contournaient les lois québécoises dans leurs activités de financement. Ceux qui ne le savaient pas ne voulaient pas savoir, ou étaient naïfs.
Il faut connaître le système pour comprendre à quel point il a été facile de contourner la loi. Les partis tirent leurs revenus de plusieurs sources, dont les contributions de l’État, les contributions des particuliers et la vente de cartes de membre. Cette année, les trois formations politiques à Québec se partagent 2,8 millions $, versés par le directeur général des élections, au prorata des votes obtenus au dernier scrutin, à raison de 50 ¢ par électeur. En 2006, cette participation de l’État n’a représenté que 13 % des revenus des libéraux, 17 % de ceux du PQ et 46 % de ceux de l’ADQ. Par contre, libéraux et péquistes avaient tiré respectivement 70 % et 52 % de leurs revenus, des contributions de plus de 200 $. C’est à cet article que certaines firmes contournent la loi. Comme elles n’ont pas le droit de faire des dons aux partis, elles le font par l’entremises de leurs employés, à qui elles remboursent discrètement les sommes versées. À moins de déclencher une enquête, il est impossible au directeur général des élections de connaître l’ampleur du phénomène.
Selon une source au Parti libéral, la loi de René Lévesque sur le financement populaire des partis était réaliste en 1977, en raison du militantisme des Québécois. Mais ce militantisme a rapidement diminué, en même temps que le taux de participation aux élections. Avec comme résultat que le véritable financement populaire s’est desséché, forçant les partis à recourir à nouveau aux contributions des entreprises.
Faut-il autoriser ces contributions pour mieux les contrôler? C’était la suggestion du juge Jean Moisan, qui a fait enquête sur certains aspects du scandale des commandites. Un groupe de réflexion du directeur général des élections, où l’on retrouve des représentants des trois formations politiques à l’Assemblée nationale, vient de conclure par la négative. Mais le DGE ne peut décemment laisser aller les choses sans miner la crédibilité de son institution. On voit mal, dans les circonstances, comment il pourrait se contenter des recommandations des politiciens, qui sont en conflit d’intérêts, sans connaître au préalable l’ampleur du problème. M. Blanchet ne se fera pas d’amis chez les politiciens s’il fouille dans ces poubelles, mais il n’est pas payé pour faire plaisir aux élus.
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L’automne, c’est la saison des publications. Dans mon courrier cette semaine, trois livres qui méritent mention, pour des raisons différentes.
D’abord celui de Mario Cardinal, l’ancien journaliste et ombudsman de Radio-Canada, qui lance un ouvrage sur Paul Gérin-Lajoie. Ce n’est pas le genre de livre qui fera fureur chez Costco, mais c’est une contribution à l’histoire du Québec et à celle de l’un des principaux artisans de la Révolution tranquille.
Autre contribution à l’histoire, mais beaucoup plus partisane : Comment ça marche à Ottawa. C’est signé Eddie Goldenberg, le compagnon de route de Jean Chrétien pendant trois décennies. Ça ne vaut pas les 34,95 $ qu’on en demande, mais ça contient des anecdotes amusantes qui méritent une consultation à votre bibliothèque locale. Par exemple, ce commentaire après sa première rencontre avec Stéphane Dion : « Je suis tout aussi étonné par la naïveté de cet universitaire spécialisé dans la chose gouvernementale, qui donne des cours sur le gouvernement sans vraiment en comprendre le fonctionnement. »
Un dernier livre, Jean-Pierre Charbonneau à découvert, qui dit avoir songé à devenir premier ministre après la démission-surprise de Bernard Landry. Sacré Charbonneau!
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