Tous pour un

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Le Devoir relaie la propagande fédéraliste

« L’indépendance n’est ni à gauche ni à droite, elle est en avant. » Depuis l’entrée fracassante de Pierre Karl Péladeau en politique, cette phrase, empruntée à Bernard Landry et prononcée par le patron de Québecor pour justifier sa présence au Parti québécois, flotte dans l’air comme une odeur de parfum. On connaissait l’expression, M. Landry ne se privant pas tellement de répéter ses bons mots, mais jamais l’idée de donner préséance à la souveraineté, au-dessus de toutes autres considérations politiques, n’a-t-elle été aussi pressante que maintenant.

« Le pays avant tout », comme le prônait le cinéaste et militant souverainiste Pierre Falardeau, prend du galon aujourd’hui avec l’appui empressé des Gilles Duceppe, Jacques Parizeau, Bernard Landry, Lise Payette, Louise Harel, Jean Doré et jusqu’aux Gérald Larose et Marc Laviolette, au candidat-surprise. Depuis, on rappelle que le PQ a toujours été une coalition arc-en-ciel : c’est au Ralliement national, mouvement de droite, et non au RIN, mouvement de gauche, que René Lévesque a tendu la main en 1968. L’accession à la souveraineté, en d’autres mots, a toujours supposé une certaine alliance gauche-droite. Soit. On conçoit aisément que quelque chose d’aussi ardu que l’indépendance ne puisse se faire sans ratisser large. On peut comprendre aussi l’empressement de vieux militants qui, face à l’arrivée-surprise de M. Péladeau, voient une occasion unique, possiblement la dernière, de remettre le train de la souveraineté en marche.

Mais à quel prix ? Ce geste de solidarité à l’égard de Pierre Karl Péladeau masque le fait que les alliances d’hier ne sont pas du tout celles d’aujourd’hui. Si René Lévesque a effectivement préféré l’ex-créditiste Gilles Grégoire au redoutable Pierre Bourgault, c’est que la maison penchait déjà bel et bien à gauche. La direction comme la très grande majorité des candidats, les plateformes électorales, l’âme même du parti étaient, comme l’époque elle-même, résolument à gauche. Ouvrir la porte aux relents du nationalisme de droite qui vivotaient en marge de la « république des professeurs », comme on baptisait le gouvernement Lévesque à l’époque, inscrivait sans doute la chicane à l’intérieur des rangs ad vitam, mais ne changeait pas grand-chose quant aux orientations du parti.

Vous me suivez ? Même en espérant être le plus rassembleur possible, il faut quand même avoir une idée non seulement de qui mène la barque, mais par quelle direction on espère arriver à bon port. Les grandes phrases du genre, « ni à gauche ni à droite, la souveraineté est devant » ou encore (je l’adore, celle-là), « nous ne sommes pas des hommes et des femmes, nous sommes tous des êtres humains », magnanimes à souhait, suscitent toujours de chaleureux applaudissements, mais en gommant la réalité, en faisant fi des rapports de force qui sont à la base des institutions comme des individus. Ces phrases cachent que la neutralité n’existe pas et qu’avant de nous fondre dans le grand Tout, nous sommes des êtres définis par un contexte, une expérience et des idées particuliers.

Or, voici que 45 ans après la fondation du Parti québécois, l’air du temps a vachement changé. L’heure n’est plus tellement à gauche, même si certains candidats du PQ le sont toujours, alors que la direction du parti, elle, tangue d’un bord comme de l’autre en quête désespérée d’électeurs. Dans ce contexte, l’arrivée d’un Pierre Karl Péladeau, résolument à droite du centre, tout le monde s’entend là-dessus, n’est pas anodine. Il donne une volonté, voire une direction là où il n’y en a pas tellement et, surtout, une qui est en opposition à ce qui a toujours été compris comme étant celle du PQ.

L’arrivée inopinée de M. Péladeau bouleverse, non seulement le plan de match électoral de Pauline Marois, il chambarde aussi l’avenir du PQ. S’il continue d’avoir l’effet d’un épouvantail sur les nationalistes mous, ainsi que les militants de gauche qui prennent mal toutes les petites trahisons du PQ depuis un an, le candidat patronal n’aura d’autre choix, suggérait Pierre Curzi récemment, que « de faire un René Lévesque de lui » en créant son propre parti. Enfin, s’il est vrai que la politique est désormais la nouvelle vie du baron des médias. Si, par contre, PKP aide le PQ à arracher la majorité tant espérée, il deviendra de facto le nouveau king, mais avec des conséquences insoupçonnées pour ce qui est de l’orientation future du parti.

D’une façon ou d’une autre, loin de nous diriger allègrement vers un troisième référendum, la venue de Pierre Karl Péladeau promet davantage d’incertitude et de bouleversements.


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