Sauver le patrimoine

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L'incapacité des Québécois à protéger leur héritage



Il a fallu que les médias sonnent l’alarme pour qu’on apprenne la destruction imminente à Berthier d’un monastère de grande valeur historique.




La ministre de la Culture Nathalie Roy est alors intervenue, in extremis, pour retarder la démolition de 30 jours, histoire de trouver une solution permettant sa conservation.




Berthierville




Ce triste épisode a néanmoins la vertu de ramener au cœur de l’actualité la question centrale du patrimoine. Trop souvent, on le constate, dès que la préservation d’un édifice semble un peu compliquée, le réflexe québécois consiste à tout raser.




On refuse de faire preuve de sentimentalisme devant les vieilles pierres. Le développement économique ne saurait être entravé pour de telles considérations. S’il est nécessaire de détruire une vieille maison pour construire une tour à condos ou même un stationnement, on le fera. S’il faut jeter par terre un monastère ou un couvent, on le fera aussi.




On fabrique ainsi un monde plat, beige, monochrome, ennuyant. Certains s’imaginent pourtant sincèrement qu’il sera meilleur. Ils se disent préoccupés par l’avenir. Mais leur avenir ne donne pas envie.




Pourtant, le souci pour le patrimoine est plus qu’honorable. À travers lui, on se préoccupe de la préservation des traces du passé dans le présent. Il ne s’agit pas d’une forme de fétichisme réactionnaire. Un peuple qui ne serait pas capable de conserver des traces matérielles de sa mémoire deviendrait inévitablement étranger à son passé, devenu soudainement fantomatique et nébuleux. Il se condamnerait alors à vivre dans le vide et dans l’insignifiance.




C’est pourtant le destin que nous réservent ceux qui nous promettent un monde jetable, qu’il faudrait déconstruire à chaque génération, pour en reconstruire un nouveau. Faire table rase est rarement, pour ne pas dire jamais, une bonne idée. Un peuple qui se laisse gagner par cette idée mutile son identité.




Lorsqu’on visite un village lointain ou une ville étrangère, on est tenté de se diriger vers son quartier historique.




On y entend l’écho des générations passées. Les vieux siècles, et même, de temps en temps, les siècles oubliés, nous parlent à travers ces monuments où d’autres hommes et d’autres femmes ont vécu des sentiments semblables aux nôtres, dans des époques ayant peu de chose à voir avec la nôtre.








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Église




Disons-le presque méchamment. Le Vieux-Québec a quand même plus de charme que Sainte-Foy et le Vieux-Montréal gagne notre cœur davantage qu’un quartier rempli de condos préformatés.




De passage dans nos villes et villages, on a l’habitude de visiter la vieille église, qui avait d’ailleurs été construite pour durer et résister au passage des générations, à la différence du centre commercial qu’on a construit en sachant qu’on allait tôt ou tard le déconstruire pour laisser de la place à quelque chose de plus moderne.




Qui lutte pour le patrimoine lutte pour un monde plus humain, moins sec, moins glaçant. Qui en sauve un morceau sauve un peu de l’âme de notre vieux pays.