(Québec) Malgré une hausse importante de 45% des excédents nets depuis 2007 au Mouvement Desjardins, les ristournes distribuées aux membres ont chuté de près de la moitié durant cette même période.
Les données compilées par Le Soleil démontrent que depuis 6 ans, les ristournes annuelles versées aux membres de la coopérative de services financiers ont fondu de près de 50 %, passant de 592 millions $ en 2007 à 305 millions $ en 2012.
Or, parallèlement à cette baisse de ristournes, les excédents (équivalents des profits nets dans le secteur bancaire) ont fortement progressé depuis, passant de 1,1 milliard $ (2007) à 1,6 milliard $ (2012), en hausse de 45 %.
Pour l'année 2012, Desjardins a décidé de retourner à ses membres seulement 19 % de ses excédents nets. En 2007, le Mouvement des caisses populaires avait versé en ristournes 54 % de ses excédents nets.
Climat d'affaires
Que se passe-t-il? Chez Desjardins, on soutient que le climat d'affaires n'est plus le même depuis la crise financière de 2008. «Les ristournes sont à la base du réseau des caisses. Et au niveau des caisses, les marges bénéficiaires sont beaucoup plus serrées que par le passé notamment du côté des prêts», a fait valoir lundi le porte-parole de Desjardins, André Chapleau.
En 2012, le secteur des Particuliers et des Entreprises a notamment été mis à rude épreuve en enregistrant une baisse de ses excédents de 98 millions $ (-10 %), à 889 millions $, et ce, malgré une hausse de ses revenus.
Chez Desjardins, on explique que la forte concurrence que se livre le secteur bancaire, notamment du côté des prêts hypothécaires, et la faiblesse des taux d'intérêt sur les placements ont eu leurs effets. Résultat : des revenus nets d'intérêts en baisse de 25 millions $ et des revenus de placements qui ont glissé de 49 millions $.
Mais pourquoi alors ramener la crise de 2008 dans le portrait? Il faut savoir que cette année-là, le Mouvement Desjardins avait vu ses résultats financiers lourdement affectés par la crise financière planétaire. Desjardins avait notamment vu ses excédents nets fondre de 1,2 milliard $ par la radiation d'importants placements dans les fameux papiers commerciaux adossés à des actifs (PCAA). En 2008, Desjardins avait toutefois décidé de verser à ses membres 295 millions $ en ristournes.
Desjardins détenait pour plus de 2 milliards $ de PCAA quand le marché s'est effondré en 2007 et 2008. Leur valeur a ensuite été amputée de moitié dans le bilan de Desjardins. Aujourd'hui, les PCAA (devenus les BTAA) valent près de 1,5 milliard $.
Changement de philosophie
Le porte-parole de Desjardins reconnaît également qu'un changement de philosophie au sein de la haute direction est aussi à l'origine de cette baisse des ristournes aux membres observée ces dernières années. «Il y a une gestion plus prudente des excédents depuis quelques années», a-t-il souligné.
Le versement d'une partie des excédents en réserves plutôt qu'en ristournes serait la façon la moins coûteuse pour Desjardins d'augmenter sa capitalisation. Normalement, la coopérative verse le tiers de ses «profits» en redevances, le tiers va au développement et le dernier tiers sert à augmenter la capitalisation, précise-t-on.
Le Mouvement Desjardins dit d'ailleurs figurer parmi les institutions financières les mieux capitalisées au Canada avec des ratios de capital respectant le cadre réglementaire des normes de l'accord de Bâle II sur les risques financiers bancaires.
Contestation
Cette baisse des ristournes ne fait toutefois pas que des heureux chez Desjardins. L'an dernier, lors de plusieurs assemblées annuelles de caisses, des membres ont dénoncé cette situation.
À l'assemblée annuelle de la Caisse populaire de Trois-Rivières, la baisse des ristournes avait d'ailleurs suscité la grogne d'une majorité de membres alors que les salaires des dirigeants de la haute direction de Desjardins ont connu une forte progression depuis 2008.
«Les ristournes aux membres sont en baisse dans de nombreuses caisses, même si la crise de 2008 est de plus en plus chose du passé», avait notamment formulé Jacques Gingras, un membre de la Caisse de Trois-Rivières, en déplorant que le salaire annuel (avec engagements au régime de retraite) de la patronne de Desjardins Monique Leroux était passé de 1,6 million $ en 2008 à 3,1 millions $ en 2012.
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