Responsable

CDPQ-Subprimes - qui sont les coupables?

Dans le dictionnaire, un synonyme de responsable est comptable. Comme dans «je suis comptable de mes actes». Or, à la Caisse de dépôt et placement du Québec, où l'on doit trouver beaucoup de comptables au sens des HEC, il apparaît que peu de responsables s'y nichent. Au gouvernement -- libéral ou péquiste, puisque Henri-Paul Rousseau, aujourd'hui dans l'écurie de Power Corporation mais qui a assumé la présidence de la Caisse jusqu'à tout récemment et a insisté pour imposer son poulain Richard Guay, vite épuisé par la tâche, avait été nommé par le PQ -- au gouvernement, donc, on n'est pas plus responsable. Pourtant, il s'y trouve bien quelques comptables, au ministère des Finances entre autres.

En fait, il faut prendre de la hauteur pour constater que la notion de responsabilité est devenue très élastique. L'éducation, d'ailleurs, ne favorise guère le sens de la responsabilité. On explique plutôt aux enfants à comprendre leurs actions et celles de leurs amis en fonction de leur vécu. L'enfance malheureuse, la séparation de papa et maman, les difficultés financières de la famille, les mauvaises fréquentations sont les vraies causes des erreurs, des bévues, des coups fourrés des uns et des autres. Un enfant se comporte mal en classe. On convoque ses parents à l'école. «C'est pas lui», ou «c'est pas de sa faute», répliqueront les parents avec plus ou moins d'agressivité aux responsables scolaires. Non seulement la responsabilité est devenue l'affaire des autres, mais pour certains c'est une notion inapplicable à notre monde actuel.
Dans les bureaucraties du secteur public ou du secteur privé, la complexité des structures enterre la responsabilité. Ou alors, celle-ci est si bien atomisée que chacun a une infime part dans la décision. Autrement dit, la responsabilité est devenue collective, c'est-à-dire inexistante.
Pour l'opposition actuelle, les mauvais coups de la Caisse de dépôt sont l'affaire du gouvernement libéral, qui a transformé les objectifs de la Caisse pour la rendre des plus performantes. Ce dernier regarde du côté de la Caisse sans trop insister sur les personnes qui y siègent et qui sont ses amis. Il y a gros à parier que les résultats catastrophiques de notre institution bas de laine, lorsqu'on les compare à ceux enregistrés dans les autres provinces du Canada, ne seront jamais attribués à une ou quelques personnes.
Le seul système où la responsabilité continue d'être reconnue est le système judiciaire. Il existe encore une notion de culpabilité dans le cas où il y aurait violation de la loi. Et encore, les circonstances atténuantes, réductrices de peines, sont soumises, trop souvent, à l'influence du courant de déresponsabilité dans lequel nous baignons. Mais il n'en demeure pas moins qu'il est malsain de vivre dans une culture où la responsabilité n'est fonction que de la culpabilité au terme du Code civil ou criminel.
Verdict électoral
L'opinion publique québécoise sondée cette semaine estime que le gouvernement libéral est en bonne partie responsable des errances de la Caisse. Mais cela ne signifie pas que le parti au pouvoir soit éventuellement sanctionné. Seuls les résultats d'une future élection le diront. Et dans le cas de la Caisse, la responsabilité se définit aussi en fonction des limites que l'on pose à l'intervention directe du gouvernement dans sa gestion de la Caisse. Quelle doit être l'indépendance de la Caisse? Jusqu'où doit-on laisser cette institution devenir un instrument politique aux mains de ceux qui gouvernent momentanément? Le débat est ouvert indépendamment de la conjoncture actuelle.
L'érosion du sens de la responsabilité se poursuit depuis des décennies sans vraiment soulever de vagues, sauf dans des cas extrêmes très médiatisés. Pourtant, la primauté du droit des individus sur les droits collectifs impliquerait une éducation à la responsabilité personnelle. Hélas, la société, dont on se moque allègrement lorsqu'il s'agit de faire valoir son droit individuel, a le dos large. On la nie d'un côté et on l'accable de l'autre. Méfions-nous de ceux pour qui tout est la faute de la société, du système, du gouvernement, de la pauvreté, de la richesse, toutes ces réalités qui ne sont que des abstractions si on s'exclut soi-même de toutes ou de plusieurs de ces catégories.
On me permettra un exemple personnel. J'habite un quartier qui a pris valeur de symbole. En l'occurrence, le Plateau Mont-Royal. C'est le quartier de la gauche branchée, écolo, égalitaire et donneuse de leçons. Se promener sur les trottoirs les jours où les éboueurs ramassent les ordures est une expérience éprouvante. Les sacs de plastique sont éclatés, de vieux frigos et d'autres encombrements interdits se retrouvent dans les rues, bref, le discours écologique de ses habitants-défenseurs du recyclage ordonné et respectueux des normes est contredit sans vergogne par l'illustration de la déresponsabilité individuelle.
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denbombardier@videotron.ca


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