Le commissaire Robert Lafrenière a obtenu le renouvellement de son mandat à la tête de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) en faisant arrêter l’ex-vice-première ministre Nathalie Normandeau, affirme Lino Zambito, qui témoigne mercredi au palais de justice de Québec. Il dit tenir l’information directement du député libéral Guy Ouellette, qui lui aurait confié que le premier ministre Philippe Couillard a forcé la nomination.
M. Zambito, ex-entrepreneur en construction et témoin vedette de la commission Charbonneau, a été questionné par Me Jacques Larochelle, avocat de Marc-Yvan Côté, mercredi matin. Il est le premier d’une série de témoins qui seront interrogés pour identifier les sources des fuites de renseignements policiers et de preuves qui justifient, selon la défense, l’arrêt des procédures dans la cause de l’ex-vice-président de Roche, de Mme Normandeau et quatre coaccusés.
M. Zambito a expliqué comment le député Ouellette, un ancien policier de la Sûreté du Québec avec qui il a eu de nombreux échanges, lui aurait indiqué que Denis Gallant, ex-procureur de la commission Charbonneau, était sur la «short list» pour devenir commissaire de l’UPAC. Or, le premier ministre aurait imposé son choix au conseil des ministres. «M. (Martin) Coiteux (ministre de la Sécurité publique), quand il se l’est fait imposer, il n’était pas de bonne humeur. Il aurait dit aux gens : vous allez vivre avec la décision», a raconté M. Zambito.
À son avis, Denis Gallant n’a pas été retenu parce qu’«il est trop honnête et c’est trop dangereux pour lui et le PLQ (Parti libéral du Québec)».
M. Zambito est revenu sur le témoignage d’un «enquêteur important» dévoilé la semaine dernière, selon lequel les arrestations Nathalie Normandeau, de Marc-Yvan Côté et de cinq autres personnes liées ont été devancées et sont tombées pile sur le jour du dévoilement du budget provincial, le 17 mars 2016.
Il a fait un lien avec son propre sentiment que l’UPAC a précipité son enquête et qu’il y avait un lien avec le renouvellement du mandat de Robert Lafrenière. En janvier 2016, il en avait d’ailleurs fait part aux policiers venus prendre son témoignage. En guise de réponse, il a obtenu un sourire, a-t-il rapporté.
«Le chat a sorti du sac la semaine passée. C’était un calcul de M. Lafrenière, il a mis à genoux les libéraux. J’aurais mal perçu qu’on arrête Mme Normandeau et que le lendemain matin, les libéraux mettent M. Lafrenière à la porte», a expliqué M. Zambito, qui présente l’ex-vice-première ministre comme «un bouc émissaire» désigné par les libéraux.
L’ex-entrepreneur a d’ailleurs recommandé aux enquêteurs de la SQ enquêtant sur les fuites de mettre sous écoute Robert Lafrenière et Jean-Louis Dufresne, l’ancien chef de cabinet de Philippe Couillard, pour en avoir le cœur net.
De la même façon, le témoin croit que le coulage d’informations qui déplaît à la défense «provient de la haute direction de l’UPAC».
Plus de détails à venir...
LE DÉPUTÉ OUELLETTE EN COUR JEUDI
Le député de Chomedey, Guy Ouellette, devra témoigner en cour, jeudi après-midi, dans le contexte des préparatifs du procès Normandeau-Côté. C’est l’avocat de Marc-Yvan Côté, Me Jacques Larochelle, qui l’a assigné. Le juge André Perreault a vérifié l’horaire de M. Ouellette avant qu’on lui envoie un subpoena. Le député peut donc participer au caucus présessionnel des libéraux mercredi et jeudi matin, puis se pointer au palais de justice de Québec. Deux autres personnes suspectées d’être à la source des fuites policières dans le dossier Normandeau-Côté ont aussi été convoquées. Il s’agit du policier Stéphane Bonhomme, qui aurait subtilisé les documents dans les locaux de l’UPAC, et de l’ex-policier de la Sûreté du Québec Richard Despatie, qui aurait servi de relais et dont le téléphone a été utilisé pour «appâter» M. Ouellette avant son arrestation en octobre.
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