Pourquoi rien ne bouge quand il s’agit des GAFAM?

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Derrière les GAFAM, il y a l'ombre de Washington



Il n’y a pas de solution facile à la crise de financement que connaît le monde des médias.




Mais dans cette tourmente, un élément aura fait consensus : il faut taxer les géants du web, les fameux GAFAM, et ne pas attendre après Ottawa.




L’inaction procure aux GAFAM un traitement de faveur. Malgré leur présence numérique importante au Québec, ces entreprises réussissent à soustraire une part substantielle de leurs profits et de leurs ventes aux autorités fiscales.




Question d’équité




Nos propres entreprises de presse et de commerce au détail sont ainsi victimes de concurrence déloyale.




Celles qui font la promotion de notre culture, de nos artistes et qui participent directement à notre vie démocratique doivent, elles, passer à la caisse.




Leur péché : avoir une présence physique chez nous.




De leur côté, les gouvernements du Québec et du Canada renoncent à des revenus qui finissent par être pigés dans vos poches.




Malgré cela, le gouvernement du Québec a clairement fait savoir qu’il n’agirait pas rapidement. Il dit attendre que l’OCDE remette son prochain rapport et qu’Ottawa fasse le premier pas.




N’espérez pas trop




L’OCDE a pourtant remis un premier rapport sur la taxation des produits numériques en 2015. Depuis, l’Union européenne a commencé ses démarches.




La France a adopté une taxe sur le chiffre d’affaires de certains services numériques. Tous les pays du G8 sont en avance sur nous quant à l’adaptation de leur fiscalité aux nouvelles réalités numériques. Même la Russie !




Alors que la taxation des GAFAM est sur toutes les lèvres, au Québec comme ailleurs, on s’étonne que cette question n’ait toujours pas franchi la rivière des Outaouais.




Comment expliquer ce gênant laxisme canadien ?




Remontons dans le temps, à la dernière élection fédérale. Stephen Harper s’était engagé à ne pas augmenter le fardeau fiscal des Canadiens et à ne pas taxer les produits numériques. Mis au défi de faire de même, Justin Trudeau était tombé dans le panneau et avait emboîté le pas.




Pour tenir sa ridicule promesse électorale, le gouvernement Trudeau a préféré faire du sur place. Et même pire: il a obstinément refusé de taxer Netflix. Tout cela en échange d’investissements que la multinationale aurait peut-être faits de toute façon. Ce fut un scandale.




Attendre après le vide




Le fédéral ayant perdu toute crédibilité, Québec doit prendre les devants. Il faut rapidement explorer l’idée de taxer le chiffre d’affaires québécois des GAFAM.




Quelques pas ont d’ailleurs été faits quant à l’application de la TVQ aux produits numériques achetés à l’étranger, comme Netflix.




Ne risquons pas d’attendre après le vide. Le nouvel ALÉNA n’est pas encore ratifié par nos voisins du sud. Ottawa ne risquera pas de mettre les Américains en colère, en taxant leurs fleurons technologiques, avant que les eaux se calment.




Il y a aussi la politique. Fidèles à leur tradition, les conservateurs s’engageront peut-être encore à offrir un bar ouvert aux GAFAM.




Refusant d’admettre ses torts, Justin Trudeau pourrait être tenté d’emboîter le pas. Comment pourrait-il autrement justifier ses prises de position passées ?




♦ Jean-Denis Garon est professeur à l’ESG UQAM






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